20 départements sous surveillance : « Pourquoi ne pas prendre les décisions maintenant ? »

20 départements sous surveillance : « Pourquoi ne pas prendre les décisions maintenant ? »

Le Premier ministre a annoncé ce jeudi que 20 départements étaient désormais placés en vigilance renforcée. Comme à Nice et Dunkerque, ces départements pourraient connaître un renforcement des restrictions. Alors que les décisions seront dévoilées et mises en place le 6 mars en fonction de l’évolution sanitaire, certains sénateurs regrettent l’absence de confinements territorialisés dès maintenant.
Public Sénat

Par Héléna Berkaoui

Temps de lecture :

6 min

Publié le

Mis à jour le

Ce n’est plus dix mais vingt départements qui sont désormais sous surveillance. Ce jeudi 28 février, le Premier ministre a annoncé que ces départements pourraient connaître un renforcement des restrictions proche de ce qui a été décidé à Nice et Dunkerque. Dans ces agglomérations, un confinement le week-end sera instauré dès demain, en plus du couvre-feu à 18 heures. Cette semaine, « les préfets engageront des concertations avec les élus pour inviter sans attendre les habitants à la plus grande vigilance et envisager, dans tout ou partie de ces territoires, des mesures de freinage », a déclaré Jean Castex précisant que ces territoires pourraient faire l’objet de mesures de confinements locaux à partir du week-end du 6 mars si la situation continuait à se dégrader.

Les départements concernés recouvrent toute l’Ile-de-France, le Rhône, les Bouches-du-Rhône, une grande partie des Hauts-de-France, la Drôme, la Moselle, la Meurthe-et-Moselle mais aussi l’Eure-et-Loir. « Ces territoires cumulent des indicateurs défavorables : un niveau d’incidence élevé, autour ou supérieur à 250 cas pour 500 000 habitants ; une part de variants supérieure à 50 % ; une pression hospitalière proche du seuil critique et enfin une circulation virale qui commence à s’accélérer sérieusement », indique le Premier ministre.

« On est en train de perdre la course de vitesse contre les variants »

Sénatrice écologiste du Rhône, Raymonde Poncet n’est pas surprise de cette annonce : « Sur les indicateurs, on était déjà un peu tendu sur le nombre de lits en réanimation », commente-t-elle. Cependant, elle s’inquiète que les mesures ne soient pas prises maintenant. « On est en train de perdre la course de vitesse contre les variants », s’alarme Raymonde Poncet. Pour elle, la stratégie vaccinale mériterait d’être revue à l’aune de l’apparition des nouvelles souches variantes. Surtout, la sénatrice plaide pour que la propriété intellectuelle des vaccins soit suspendue : « Il faut qu’on mobilise une production massive, le vaccin doit être un bien commun ! ».

Chez le chef du groupe socialiste au Sénat, Patrick Kanner, le sentiment est proche suite aux annonces de Jean Castex. Le sénateur du Nord constate que « le virus se développe plus vite que les solutions de blocage ». Le sénateur du Nord rappelle qu’à Dunkerque les alertes ont été émises trois semaines avant que le gouvernement ne décide de confiner les week-ends. « On est toujours en décalage », souffle-t-il.

« Si on fait le compte des départements concernés, on doit être autour de 30 millions de personnes, c’est-à-dire que la moitié des habitants de ce pays sont dans une situation inquiétante et on attend une semaine ! Pourquoi ? », interroge Patrick Kanner. Cela fait aussi plusieurs semaines que son collègue socialiste, Bernard Jomier, médecin de formation, appelle à un confinement territorialisé (lire ici). « Le seul point positif c’est qu’on accepte de remettre le couple préfet/élus au cœur du dispositif », concède toutefois Patrick Kanner. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a déjà annoncé par la voix de son premier adjoint qu’elle allait proposer au gouvernement un confinement de 3 semaines dans la capitale afin « d’avoir la perspective de tout rouvrir » à son issue, y compris bars, restaurants et lieux culturels.

Le maire LR de Metz François Grosdidier, qui s’est prononcé à de nombreuses reprises en faveur d’un reconfinement local et « fort » en Moselle, a jugé « très méprisants » les propos du Premier ministre Jean Castex à l’égard des élus. Avant d’annoncer une « surveillance renforcée » de 20 départements dont la Moselle, Jean Castex avait évoqué ceux qui appellent « à un confinement dur et immédiat » en prétendant que « quatre semaines et puis on est débarrassés » du virus. « Malheureusement, notamment en raison de la propagation des variants, c’est loin d’être aussi simple », avait-il balayé. « C’est vraiment travestir et caricaturer les propos », a estimé François Grosdidier auprès de l’AFP. « On est un certain nombre à demander des reconfinements locaux et forts pour appuyer sur le frein parce que toutes les mesures qui ont été prises de couvre-feu, même de couvre-feu avancé, n’ont jamais inversé la tendance », a souligné le maire de Metz. La seule fois où « la tendance a été inversée dans le pays, c’est lors du premier confinement », a-t-il fait valoir.

La France a commandé des traitements contre le virus

Moins incisif, le sénateur LR, René-Paul Savary pose la même question. « Compte tenu des critères affichés, on peut se demander pourquoi ne pas prendre des décisions maintenant, il y a un moment où il faut trancher », affirme le sénateur, lui aussi, médecin de formation. Il pointe toutefois un motif de satisfaction : l’arrivée de nouveaux traitements contre le virus.

Olivier Véran a, en effet, annoncé que la France avait commandé des dizaines de milliers de doses d’anticorps monoclonaux qui arriveront d’ici la mi-mars. « C’est une thérapie connue qui est déjà utilisée depuis un moment dans d’autres pays, son rôle est d’éviter les effets secondaires », explique René-Paul Savary. « On aurait cependant pu réagir il y a deux mois, on veut être les premiers de la classe sur le rang du contrôle et on se retrouve les derniers sur la rapidité. Cela traduit aussi un manque de confiance pour les scientifiques étrangers », estime le sénateur.

Aux yeux du président du groupe centriste, en revanche, la stratégie du gouvernement trouve grâce. « Le gouvernement a les informations appropriées pour prendre ces décisions et je fais confiance aux autorités sanitaires. Sur quels arguments pourrait-on discuter les décisions du Premier ministre ? Et puis, je pense que les Français apprécient de ne pas être confinés maintenant », tranche pour sa part Hervé Marseille.

La France a enregistré plus de 25 000 nouveaux cas de contamination par le coronavirus au cours des dernières vingt-quatre heures, après 22 000 il y a une semaine, a renseigné Olivier Véran lors de la conférence de presse. Aussi, plus d’un cas sur deux est désormais lié au variant anglais, quand le variant ne représentait moins de 40 % des cas il y a une semaine. La stratégie du gouvernement reste la même : « Tout faire pour retarder » un confinement national afin de « laisser à la vaccination le temps de produire des effets ».

Dans la même thématique

Police operation “Place Nette” secteur Las Planas a Nice
5min

Politique

JO Paris 2024 : les recommandations du Sénat vont éviter le crash de la lutte antidrone

Depuis un an et demi, le sénateur LR Cédric Perrin s’inquiète des failles du système de lutte antidrone qui sera déployé lors des Jeux Olympiques. Elu à la tête de la commission de Affaires étrangères et de la Défense du Sénat en octobre dernier, il avait diligenté une mission d’information confidentielle sur le sujet. Ce jeudi, il indique que la Direction générale de l’armement a suivi ses recommandations.

Le

Le president francais, Emmanuel Macron et son homologue le president de la Republique democratique du Congo Felix Tshisekedi lors d’une conference de presse apres un dejeuner de travail au palais de l’Elysee a Paris
4min

Politique

Emmanuel Macron persiste sur l’envoi de troupes en Ukraine : « Je n’exclus rien, parce que nous avons face à nous quelqu’un qui n’exclut rien »

Dans une interview accordée au journal britannique The Economist, le chef de l’État réaffirme son discours d’« ambiguïté stratégique » vis-à-vis de la Russie. Le président de la République continue donc d’envisager une intervention de troupes françaises, « si les Russes devaient aller percer les lignes de front » et « s’il y avait une demande ukrainienne », faute de quoi « nous n’aurons plus de sécurité en Europe ».

Le