Agriculture : le Sénat rejette un budget « pas à la hauteur »

Agriculture : le Sénat rejette un budget « pas à la hauteur »

Les sénateurs avaient prévenu qu’ils ne voteraient pas les crédits de la mission Agriculture en l’état. En forte de baisse, ce budget est particulièrement fustigé par rapport à l’affaiblissement du dispositif pour l’activité des travailleurs saisonniers.
Public Sénat

Par Helena Berkaoui

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« Une mise au régime sec », « un budget sans vitalité ». Fidèle à son rôle de représentant des territoires, le Sénat a sévèrement jugé le budget alloué à l’agriculture dans le cadre du projet de loi de finances 2019. Les crédits alloués à la mission agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales est, cette année, en baisse de  16,8 % et l’augmentation par l’Assemblée nationale de 75 millions d’euros n’a pas suffi à satisfaire les sénateurs.

Cette augmentation visait pourtant à rétablir partiellement les exonérations de cotisations sociales accordées pour les emplois de travailleurs occasionnels (TO-DE). Un sujet qui a déjà suscité une polémique durant l’examen du budget de la sécurité sociale avec le nouveau ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume. L’ancien sénateur qualifiait lui-même cette mesure de « technocratique et mortifère » (lire notre article). Un revirement qui n’est pas au goût de ses anciens collègues.

« J'ai besoin de vous », assure Didier Guillaume aux sénateurs 

Le rapporteur spécial de la commission des finances, Alain Houpert, n’a d’ailleurs pas hésité à raviver le débat : « Dans le sombre panorama de l’emploi agricole, le seul type d’emploi qui conserve un peu de dynamisme c’est l’emploi saisonnier et bien voilà que vous le pénalisez Monsieur le ministre. La réforme des exonérations de cotisations sociales pour les TODE ne peut être acceptée par notre Assemblée et vous le savez d’autant mieux qu’il n’y a pas si longtemps vous l’affirmiez vous-même avec force et brio ici même ». « J’ai besoin de vous » a quant à lui clamé le ministre de l’Agriculture en reconnaissant que la situation économique des agriculteurs n’était pas acceptable.

Mission Agriculture : "J'ai besoin de vous " assure Didier Guillaume aux sénateurs
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« La vérité c’est que la réserve de crise du budget de l’agriculture n’en est pas une »

Les incertitudes sur l’issue du Brexit pour l’agriculture française et la diminution ont été également invoquées par les sénateurs pour dire leur incompréhension face à ce budget. « C’est donc au moment où le budget de la PAC s’apprête à diminuer de 15 % en euros constants que le budget de la mission recule de plus de 200 millions d’euros soit 10 % à périmètre constant », s’est emporté le sénateur LR, Laurent Duplomb. Le sénateur s’est également ému de la baisse de 100 millions d’euros de la réserve de crise, censée couvrir les aléas auxquels sont exposés les agriculteurs. « La vérité c’est que la réserve de crise du budget de l’agriculture n’en est pas une, elle ne sert qu’à financer des apurements communautaires, aucun euro n’a été déboursé cette année contre des aléas agricoles ».

Pour tenter de corriger le tir, les sénateurs ont adopté plusieurs amendements, notamment sur la question de la sécurité sanitaire. Celui déposé par Laurent Duplomb vise à augmenter les effectifs de la direction générale de l’alimentation afin de renforcer les contrôles à l’importation de denrées alimentaires. Un autre amendement, porté par la sénatrice socialiste Nicole Bonnefoy, entend lui aboutir à la création d'un fonds d'indemnisation des victimes des produits phytopharmaceutiques. Agriculteur de formation, le sénateur socialiste, Jean-Claude Tissot, a vu son amendement visant à rétablir les dotations allouées aux Jeunes agriculteurs adopté. Ces dotations étaient en diminution de 1,3 million d’euros dans le projet de loi initial.   

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Cela pourrait être le premier obstacle du gouvernement Barnier, avant même l’adoption du budget 2025 d’ici la fin de l’année. Les députés du Rassemblement national ont confirmé qu’ils entendaient déposer, dans le cadre de leur niche parlementaire prévue le 31 octobre, un texte d’abrogation de la réforme des retraites. Du côté du Nouveau Front populaire, qui proposait le retour de la retraite à 60 ans dans son programme, l’idée de devancer le RN en mettant une proposition similaire à l’ordre du jour dès l’ouverture de la session ordinaire à l’Assemblée fait aussi son chemin. Rien n’assure toutefois que les deux familles politiques joindraient leurs voix pour faire adopter un tel texte. « Nous ne serons pas condamnés à voter la proposition de loi de ces hypocrites, qui sont responsables du fait qu’aujourd’hui nous avons un partisan de la retraite à 65 ans à Matignon », fustigeait le sénateur communiste Ian Brossat, invité de la matinale de Public Sénat ce 9 septembre. Quelques minutes plus tard, sur le même plateau, le député Rassemblement national Sébastien Chenu rétorquait, accusant la gauche de « sectarisme ». Mathématiquement, la réforme des retraites, adoptée dans la douleur au mois de mars 2023, trouve tout de même une majorité contre elle à l’Assemblée. Face à ce constat, le nouveau Premier ministre Michel Barnier a donc tenté d’arrondir les angles en annonçant le 6 septembre, sur le plateau de TF1, son souhait d’ « ouvrir le débat sur l’amélioration de cette loi pour les personnes les plus fragiles », sans pour autant « tout remettre en cause ». « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme » Quelles « améliorations » le gouvernement Barnier pourrait-il apporter au texte ? Au sein de la droite et du bloc central, le retour à la retraite à 62 ans semble en tout cas exclu. « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme. On l’a votée avec beaucoup de difficultés, on garde les acquis », défend un cadre de la majorité sénatoriale. Quelques ajustements du texte ne sont donc pas à exclure, ne serait-ce que pour « répondre », estime-t-il, à l’initiative parlementaire du RN et aux syndicats, qui prévoient une manifestation le 1er octobre. La ligne rouge des 64 ans n’interdit pas, par ailleurs, de rediscuter d’autres points de la réforme. Au Sénat, l’introduction de nouvelles mesures sur l’emploi des seniors semble par exemple faire consensus au sein de la majorité. À l’occasion de l’examen du texte, la chambre haute s’était déjà exprimée en faveur de l’instauration d’un « index seniors », censé pousser les entreprises à davantage de transparence sur l’emploi des salariés en fin de carrière, et sur la création d’un « CDI seniors », nouveau contrat de travail exonéré de certaines cotisations. Les deux amendements avaient finalement été censurés par le Conseil constitutionnel. « Il faut reprendre cet aspect là des choses, pour associer à cette réforme des retraites un véritable changement de politique vis-à-vis de l’emploi des seniors. Il faut sans doute aussi travailler, en lien avec les partenaires sociaux, sur la question de la pénibilité notamment dans les métiers du bâtiment ou de l’aide à la personne », propose la sénatrice centriste Élisabeth Doineau. En revanche, pour la rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale, une remise en cause complète de la réforme serait « suicidaire » : « Il faut être lucide face aux réalités budgétaires du pays, pour ne pas entraîner la France vers de nouvelles dépenses qui seraient un naufrage. » « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans » Les déclarations de Michel Barnier, qui a indiqué que les « améliorations » qu’il entendait proposer respecteraient « le cadre budgétaire », ont donc de quoi rassurer les défenseurs de la réforme. À gauche, l’accueil de l’annonce du nouveau Premier ministre est évidemment beaucoup plus froid. « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans, puisque l’essence même de cette réforme c’est le report de l’âge de départ à la retraite », dénonce la sénatrice Monique Lubin, qui défendait déjà en février dernier une proposition d’abrogation de la réforme. 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