Arnaud Beltrame ou la figure du héros

Arnaud Beltrame ou la figure du héros

Les invités de l’émission « On va plus loin » réfléchissent, après la journée d’hommage national à Arnaud Beltrame, à la représentation du héros dans notre société.
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Mercredi 28 mars, lors de d’hommage national qui a été rendu à Arnaud Beltrame, le président de la République a salué un homme incarnant « l’esprit français de résistance ».

Gérard Longuet, sénateur (LR) de la Meuse et ancien ministre de la Défense, acquiesce : « Ce n’est pas quelqu’un qui prend une balle perdue. Ce n’est pas un hasard. Il est préparé à l’action, à l’intervention. Dans cette intervention, il choisit l’attitude la plus courageuse et la plus dangereuse. C'est-à-dire celle de poser son arme et d’aller au-devant d’un risque absolu (…) C’est vraiment la dignité du service de la nation qui apparaît avec force. »

Bénédicte Chéron, historienne et spécialiste des relations armée et société, va plus loin : « La cérémonie d’hommage à Arnaud Beltrane n’est précisément pas une cérémonie d’hommage à une victime mais une cérémonie d’hommage à un combattant (…) Cette figure d’Arnaud Beltrame revêt déjà les caractéristiques de ce qu’on appelle un héros, au sens le plus fort du terme. C'est-à-dire de cette figure qui rencontre une attente sociale, qui a un sens politique, qui a un sens pour une société dans son ensemble. »

Olivier Christin, également historien, directeur du centre européen des études républicaines et auteur d’une tribune dans Libération (« Un sens ultime du dévouement ») parle d’exemplarité : « Prendre un risque pour montrer ce que c’est que la détermination de gens qui vivent dans un état libre et qui ne sont pas terrifiés par l’usage de la violence (…) : c’est ça qui fait un geste exemplaire. Un geste de bravoure militaire est difficile, dans certains cas, à donner en exemple à des jeunes ou à des enfants (…) Il est un héros, en dehors de l’issue tragique. » Et il ajoute : «  C’est un geste pour autrui. Ce n’est pas un geste pour la gloire. Et donc, il peut servir d’exemple parce qu’il peut dire à tout le monde que, chacun à sa place, peut accomplir des actes vertueux. »

 

Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale, a demandé aux enseignants d’associer les élèves à cet hommage. Rémy Sirvent, professeur des écoles et secrétaire national du SE-Unsa [un des principaux syndicats de l’enseignement – NDLR], explique comment s’y employer, malgré les difficultés : «Pour les enfants le héros, c’est quelqu’un qui gagne à la fin ». Compliqué, donc pour eux de voir que, quelqu’un qui est mort « a gagné », aux travers des « valeurs qui sont portées ». « Ça demande un temps d’appropriation, un temps de distanciation, de l’émotion légitime que ressentent les enfants » analyse-t-il.

 

Bénédicte Chéron fait bien le distinguo entre la figure du martyr et celle du héros : « Ce lieutenant-colonel, au moment des actes, n’est pas rentré dans le supermarché pour mourir. Il est entré pour agir, pour faire son métier. En ce sens-là, il n‘est pas une figure de martyr, au sens où les jihadistes peuvent avoir ce genre de modèle. C’est là où il faut faire la différence (…) On constate qu’historiquement (…) les figures de héros combattants français ont disparu de notre imaginaire national (…) Et là, on a une figure de quelqu’un qui (…) revêt les caractéristiques de ce qu’on appelle un héros dans une société. On voit bien que l’intention de donner son nom à des rues, à des places dans les villes (…) montre qu’il y avait un vide et que ce visage vient occuper un vide. »

 

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