Assouplissement des 80 km/h : « On se fout de notre gueule ! » selon le sénateur LR Michel Raison
Alors que les députés ont donné aux départements et aux maires le pouvoir de revenir sur la limitation à 80 km/h, le sénateur LR Michel Raison estime que « le gouvernement fuit les responsabilités et veut absolument l’imposer aux départements en se dédouanant ».

Assouplissement des 80 km/h : « On se fout de notre gueule ! » selon le sénateur LR Michel Raison

Alors que les députés ont donné aux départements et aux maires le pouvoir de revenir sur la limitation à 80 km/h, le sénateur LR Michel Raison estime que « le gouvernement fuit les responsabilités et veut absolument l’imposer aux départements en se dédouanant ».
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La décision était mal passée dans certains territoires et avait été l’un des détonateurs de la crise des gilets jaunes. L'Assemblée nationale a adopté jeudi soir l’assouplissement des 80 km/h sur certaines routes secondaires, en donnant la responsabilité aux départements et aux maires d'adapter la vitesse. Via un amendement LREM, cette compétence a en effet été élargie aux maires, « après avis de la commission départementale de la sécurité routière, sur la base d'une étude d'accidentalité portant sur les sections de routes concernées ».

Lors de l’examen du texte à la Haute assemblée, les sénateurs avaient ouvert la voie en donnant aux présidents de départements et aux préfets le pouvoir de dérogation. Le gouvernement s’y était alors opposé, avant que le premier ministre Edouard Philippe, initiateur des 80 km/h, n’accepte en mai dernier de reculer. Mais les députés ont retiré la compétence aux préfets.

Pour le sénateur LR de la Haute-Saône, Michel Raison, pourfendeur des 80 km/h au Sénat, le vote des députés n’est pas satisfaisant. « Le gouvernement fuit les responsabilités et veut absolument l’imposer aux départements en se dédouanant » selon le sénateur, qui souligne que les routes nationales resteront à 80 km/h, « c’est inadmissible ». « Ils font semblant de laisser revenir sur les 80 km/h pour faire plaisir au peuple » lance Michel Raison. Il mise plus sur les « automatismes » des voitures et la « prévention » pour faire reculer les morts sur les routes. Entretien.

Les députés ont adopté, dans le cadre de l’examen de la loi sur les mobilités, la possibilité pour les départements, mais aussi pour les maires, de revenir aux 90 km/h sur les routes secondaires. Saluez-vous cette décision ?
Le drame, c’est que le gouvernement fuit les responsabilités et veut absolument imposer des responsabilités aux départements en se dédouanant, c’est pour ça qu’il retire la possibilité de décider pour les préfets et les routes nationales (décidée par le Sénat, ndlr). Et il essaie de décourager les départements avec ce soi-disant risque pénal. C’est inadmissible de dire qu’on peut remettre des routes à 90 km/h dans les départements et que des routes nationales vont rester à 80 km/h. C’est incompréhensible. Ils font semblant de laisser revenir sur les 80 km/h pour faire plaisir au peuple.

Reste que la ministre des Transports, Elisabeth Borne, souligne que 127 vies ont été sauvées au second semestre 2018 grâce aux 80 km/h…
Le chiffre est faux. J’en suis sûr car ils fonctionnent avec des moyennes. Au deuxième semestre, il y a eu 82 morts de moins qu’en 2017, ce n’est pas la même chose. La démonstration de l’efficacité des 80 km/h n’est pas faite. Ils racontent leur soupe. Ils disent que 2018, c’est l’année du siècle. Mais c’est la même année que 2013 en nombre de morts. Fin 2017, ça avait commencé à baisser.

Mais la possibilité donnée aux maires de revenir sur les 80 km/h ne va-t-elle pas dans le sens d’une plus grande confiance donnée à l’échelon local ?
Je ne connais pas de route qui traverse des hameaux ou communes qui sont à 80 km/h. C’est insignifiant. Je suis curieux de savoir le nombre de kilomètres concernés. Je roule beaucoup dans mon département. En général, les zones communales peu peuplées sont à 70 km/h.

La vitesse excessive est la première cause de mortalité sur les routes. N’est-il pas logique d’agir ?
C’est faux. La vitesse excessive, ce n’est pas la vitesse à 90 km/h, c’est au-delà. Et pourquoi on ne met pas la limite à 110 sur autoroute ? On se fout de notre gueule ! Comme ils aiment prendre leur responsabilité, qu’ils les prennent. Et à l’inverse, 80 km/h, c’est excessif sur certaines petites routes. Le conducteur doit adapter sa vitesse aux conditions et à la route. Les plus graves accidents sont pour 30% liés à l’alcool et à l’inattention. On me répond que plus la vitesse sera élevée, plus l’accident est fort. Mais encore une fois, la vitesse est excessive par rapport aux conditions.

Les 80 km/h n’apportent absolument rien à vos yeux ?
Je reconnais que les 80 km/h ne changent pas énormément le temps de parcours sur un petit parcours. Mais il y a tout l’aspect psychologique et l’énervement. Mais ils ne savent pas tout ça. Ils font des calculs théoriques. Et sur le plan environnemental, je n’ai pas moins consommé depuis que c’est passé à 80 km/h. Par contre, sur autoroute, entre 110 et 130 km/h, il y a plus d’un litre d’écart de consommation en diesel. De toute façon, la vitesse idéale pour qu’il n’y ait pas de mort, c’est 0 km/h.

Les accidents de la route sont dramatiques. Mais pour les limiter encore, on a d’autres leviers utilisés par les fabricants, comme améliorer les automatismes. Par ailleurs, l’Etat ne donne pas d’argent à la sécurité routière. Avec le pognon qu’on récupère des PV, on pourrait faire plus de prévention dès le plus jeune âge.

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