Assurance chômage: le gouvernement va dévoiler une vaste réforme
Bonus-malus pour les entreprises abusant des contrats précaires, durcissement des règles d'indemnisation, accompagnement renforcé des chômeurs.....

Assurance chômage: le gouvernement va dévoiler une vaste réforme

Bonus-malus pour les entreprises abusant des contrats précaires, durcissement des règles d'indemnisation, accompagnement renforcé des chômeurs.....
Public Sénat

Par Fabrice RANDOUX

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Bonus-malus pour les entreprises abusant des contrats précaires, durcissement des règles d'indemnisation, accompagnement renforcé des chômeurs... l'exécutif détaillera mardi une refonte vaste et controversée de l'assurance chômage, présentée comme la dernière pierre de ses réformes du marché du travail.

Après avoir mis "fin à la peur de l'embauche" avec les ordonnances sur le Code du travail, "réformé la formation professionnelle et l'apprentissage pour développer les bonnes compétences", "il faut maintenant achever ce vaste mouvement de réformes et conduire celle de notre assurance chômage", a expliqué Edouard Philippe lors de son discours de politique générale mercredi.

Aux côtés de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, le Premier ministre détaillera mardi les mesures, décidées sans les partenaires sociaux après l'échec fin février de la négociation interprofessionnelle.

L'exécutif justifie la réforme, annoncée par Emmanuel Macron en juillet 2018, par le fait que les règles actuelles n'inciteraient pas les chômeurs "au retour à l'emploi durable" ni les entreprises à développer l'emploi stable, comme en témoigne l'explosion des CDD de moins d'un mois, voire de moins d'un jour.

Il fait le pari que sa réforme générera des "effets de comportement" qui permettront d'accélérer la baisse encore lente du chômage mais aussi de réduire l'endettement de l'Unedic (35 milliards) avec des économies de 1 à 1,3 milliard d'euros par an.

Muriel Pénicaud à l'Elysée, le 22 mai 2019
Muriel Pénicaud à l'Elysée, le 22 mai 2019
AFP/Archives

Côté entreprises, cela passera par l'application d'un "bonus-malus" sur les cotisations d'assurance chômage, calculé en fonction du taux de rupture de contrats donnant lieu à inscription à Pôle emploi.

Cette promesse de campagne d'Emmanuel Macron avait cristallisé toute la négociation entre syndicats et patronat et a fait débat au sein de l'exécutif, Matignon y étant réticent.

Au final, ce bonus-malus sera limité aux "5 à 10" secteurs d'activité les plus consommateurs de contrats courts, principalement des services, comme l'hôtellerie-restauration, et il sera appliqué dans une fourchette plus resserrée qu'envisagé.

Cela n'a pas suffi à calmer l'ire du patronat, d'autant qu'Edouard Philippe a également annoncé une mesure "transversale", sous la forme d'une taxe forfaitaire sur "les CDD d'usage", des CDD sans limitation de durée, de renouvellement, ni de prime de précarité.

Côté demandeurs d'emploi, le gouvernement va instaurer la dégressivité sur les allocations les plus hautes, s'appuyant sur un chômage des cadres faible à moins de 4%. Si cette mesure, qui ne sera pas appliquée aux seniors, a provoqué la fureur de la CFE-CGC, qui l'a qualifiée de "populiste et d'inefficace", elle sera surtout symbolique puisque moins de 30.000 personnes touchent plus de 4.000 euros d'indemnités par mois.

- "taper dur" -

Les syndicats s'alarment surtout de l'impact plus conséquent d'autres mesures, rappelant que la moitié des 2,6 millions d'allocataires indemnisés touchent moins de 860 euros.

Or, le gouvernement pourrait durcir les conditions d'accès à l'assurance chômage, en passant de 4 mois travaillés sur les 28 derniers à 6 mois sur 24, une mesure à impact budgétaire fort et immédiat.

Autres modifications en vue, celles des règles du cumul emploi-chômage et du calcul de l'indemnisation. Elles sont actuellement plus favorables, pour la même quantité de travail, aux personnes alternant contrats courts et inactivité qu'à celles travaillant en continu à temps partiel.

Muriel Pénicaud avait créé la polémique en affirmant que cela aboutissait à ce qu'un demandeur d'emploi sur cinq ait droit à une allocation mensuelle supérieure à son ancien salaire mensuel moyen.

Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, avait souhaité que la prime de fin d'année accordée par les entreprises soit
Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, avait souhaité que la prime de fin d'année accordée par les entreprises soit "obligatoire", et non sur une base volontaire, le 10 décembre 2018 à Paris
AFP

Le gouvernement compte mettre fin à cette possibilité mais "si on tape dur sur ces personnes qui ont une indemnisation très basse, moins de 1.000 euros, la CFDT essaiera d'être mobilisée", a prévenu vendredi son secrétaire général, Laurent Berger.

Les syndicats ne se font cependant guère d'illusions concernant la sensibilisation de l'opinion à l'indemnisation des chômeurs, l'exécutif ayant par ailleurs écarté la question toujours inflammable des intermittents du spectacle.

Ces mesures ne s'appliqueront a priori en outre qu'aux nouveaux entrants à partir de début 2020.

Pour vanter "l'équilibre" de sa réforme, le gouvernement mettra aussi en avant la réalisation d'une autre promesse de campagne, l'indemnisation de davantage de démissionnaires et d'indépendants.

Enfin, il compte renforcer l'accompagnement des chômeurs, une demande récurrente des partenaires sociaux. Alors que Pôle emploi a perdu 800 postes dans le budget 2019, Edouard Philippe a promis "de nouveaux moyens" pour ces nouvelles mesures d'accompagnement.

Partager cet article

Dans la même thématique

General policy speech by Prime Minister at Senate
10min

Politique

Budget : comment le Sénat va réduire l’effort demandé aux collectivités de 4,6 à 2 milliards d’euros

La majorité sénatoriale veut revenir sur l’effort demandé par le gouvernement aux collectivités. Le premier ministre a déjà fait des gestes devant les régions et les départements. « Un premier pas », reconnaît le sénateur LR Stéphane Sautarel, mais insuffisant. Pour compenser l’allègement de l’effort sur les collectivités, la majorité sénatoriale entend renforcer les économies sur d’autres ministères, notamment sur la « jeunesse, la recherche ou la culture ».

Le

7min

Politique

Insécurité dans les territoires d’Outre-mer : « Nous, les maires, nous sommes en première ligne pour lutter, mais on n’a pas de moyens pour le faire »

A la veille de l’ouverture du 107e congrès des maires à Paris, des élus des Outre-mer se sont retrouvés à Issy-les-Moulineaux ce lundi 17 novembre. Alors qu’ils font face à une criminalité et une délinquance grandissantes, dans des territoires en proie au narcotrafic, les maires, aux côtés de la délégation sénatoriale aux Outre-mer, ont plaidé pour un « choc régalien ».

Le

Paris : session of questions to the government at the French National Assembly
6min

Politique

Budget 2026 : quels scénarios dans un calendrier de plus en plus contraint ?

Avec encore plus de 1 500 amendements restant à examiner en une semaine à l’Assemblée sur la partie recettes du projet de loi de finances, le calendrier budgétaire est de plus en plus contraint. Dans une assemblée divisée et avec le renoncement du gouvernement de recourir au 49.3, la possibilité d’une adoption des deux lois de finances avant le 31 décembre 2025 relève presque de la politique-fiction.

Le

Paris: Salon europeen de l Education
4min

Politique

Budget 2026 : Un rapport du Sénat dénonce « un coup dur porté à la jeunesse », avec une réduction de l’enveloppe dédiée au service civique

Comme en 2025, la mission sport, jeunesse et vie associative subie une sérieuse coupe dans le budget. Le service civique voit son enveloppe budgétaire réduite de 20 %, soit 114,4 millions d’euros par rapport à l’année dernière. « Se priver d’un dispositif qui fonctionne au moment où on a besoin de faire du lien social, c’est incompréhensible », regrette le rapporteur des crédits, Éric Jeansannetas (PS).

Le