Attaque au Niger : peut-on mieux sécuriser les ressortissants français ?

Attaque au Niger : peut-on mieux sécuriser les ressortissants français ?

Après l'assassinat de 8 personnes au Niger, dont 6 humanitaires français, dimanche 9 août, le président Emmanuel Macron a déclaré vouloir renforcer la sécurité des Français dans ces zones. Mais alors que 5 100 soldats français se battent au Sahel à travers l'opération Barkhane, « on ne peut pas mettre un soldat derrière chaque expatrié », estime le sénateur LR Christian Cambon. « Il faut une solution politique » à ce conflit, juge son collègue PS Jean-Yves Leconte.
Public Sénat

Par Michael Pauron

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Le président Emmanuel Macron a annoncé ce mardi 11 août que les mesures de sécurité des Français au Sahel seront « renforcées », après la mort de huit personnes, dont six humanitaires français de l'ONG Acted, dimanche 9 août dans une attaque au Niger.


Le président français n'a cependant pas précisé comment il comptait s'y prendre. Mais, trois jours après cette attaque, le ministère des Affaires étrangères a finalement placé l’ensemble du pays en zone rouge (« formellement déconseillée »), à l’exception de la capitale, Niamey.

« La menace terroriste est très élevée »

« En raison de la situation sécuritaire dans toute la région, la menace terroriste pesant sur le Niger, en particulier hors de la capitale et près des frontières, est très élevée », a indiqué le Quai d’Orsay dans ses conseils aux voyageurs.

Pour rappel, la zone où a eu lieu ce drame était jusque-là classée « orange », soit « déconseillée sauf raison impérative ». Deux autres couleurs sont actuellement utilisées pour qualifier un pays : le vert, qui correspond à une « vigilance normale », et le jaune, pour une « vigilance renforcée ».

Les zones « rouge » gagnent du terrain

Dans la zone sahélienne, qui comprend une partie du Sénégal et de la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Tchad, mais aussi le Burkina Faso et le nord du Nigeria, le rouge grignote un peu plus de terrain à mesure que des attaques se produisent.

En mai 2019, lorsque deux touristes français sont enlevés dans le parc de Pendjari, au nord du Bénin, la zone était, comme à Kouré, classée orange. Elle est depuis passée en rouge. Un drame pour les popuplations locales qui se voient ainsi privées de ressources touristiques essentielles.

« La visite touristique au Niger me paraît une aberration »

« La visite touristique au Niger me paraît une aberration, la zone orange, on ne s'y rend que si on a une raison impérative de s'y rendre, donc, en gros, c'est une interdiction », a déclaré le général Dominique Trinquand, le 11 août sur France 5. « Il va falloir bannir ces zones multicolores, et en arriver à des zones d'interdiction. Au Niger, c'est Niamey, et rien d'autre, et encore, à Niamey il y a eu des attentats », a-t-il conclu.

« Je ne suis pas favorable à la remise en cause du code couleur des pays », réagit le socialiste Jean-Yves Leconte. Le sénateur des Français établis hors de France précise : « Si vous voulez vraiment sécuriser et faire en sorte que des zones qui sont hors de contrôle puissent reprendre la voie d’un contrôle par l’État plutôt qu’être aux mains de terroristes, il faut permettre à un minimum de personnes d’accéder aux populations. »

« Énormément de Français risquent de se retrouver en zone rouge »

Pour lui, « les opérations humanitaires dans des zones non sécurisées, si elles ne sont pas suivies, si on n'y va pas assez, bénéficient aux terroristes qui utilisent ces installations pour se faire bien voir des populations locales. Par ailleurs, si on remet en cause le code couleur actuel, le risque est qu'énormément de Français se retrouveront en zone rouge, et ne voudront pas forcément partir, comme c'est le cas au Mali. »

De plus, il pointe la responsabilité politique qu'impliquerait un tel choix, dans un contexte où « les conseils aux voyageurs sont déjà mal perçus par certains pays », mais aussi la contradiction dans le discours en mettant « en rouge des zones que nos soldats sont censés sécuriser ».

« On ne peut pas mettre un soldat derrière chaque expatrié »

Alors que les 5 100 soldats français de l'opération Barkhane peinent à sécuriser la zone, malgré sept années de présence, l'armée peut-elle fournir une meilleure protection aux expatriés ? Pour le sénateur Christian Cambon, qui se dit inquiet pour les soldats français, « on ne peut pas mettre un soldat derrière chaque expatrié ». Et de rappeler que « même avec 70 000 hommes, on ne pourra pas régler le problème ».

« Il faut une solution politique, pas que militaire », estime Jean-Yves Leconte. Et de conclure : « Les victimes, habituées aux risques, ont certainement tout fait pour les limiter. Quand on est sur place, on sait qu’il faut être vigilant aux enlèvements. Mais ce mode opératoire est une rupture. C’est nouveau, inquiétant et terrible. »

Dans la même thématique

SIPA_01112686_000045
4min

Politique

Pourquoi commémore-t-on l’abolition de l’esclavage le 10 mai en Métropole ?

Depuis 2006, le 10 mai est la date de la journée nationale officielle de commémoration des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions. Une cérémonie à laquelle participe le président de la République ou le Premier ministre. Dans les territoires d’Outre-mer, les commémorations ont lieu à d’autres dates. Explications.

Le

Attaque au Niger : peut-on mieux sécuriser les ressortissants français ?
6min

Politique

Agences de l’état : Laurent Marcangeli ne veut pas fixer d’objectif chiffré pour éviter la « formation d’anticorps »

Auditionné par la commission d’enquête du Sénat sur les agences de l’Etat, Laurent Marcangeli est revenu sur la méthode du gouvernement pour « simplifier » l’écosystème des agences et opérateurs de l’Etat. Les plans ministériels devraient être finalisés à la mi-juin et ce travail pourrait donner lieu à un projet de loi, voire une proposition de loi, a annoncé le ministre de la Fonction publique.

Le

Attaque au Niger : peut-on mieux sécuriser les ressortissants français ?
7min

Politique

Présidence des LR : Laurent Wauquiez cible le « en même temps » de Bruno Retailleau

A 10 jours de l’élection du président des Républicains, Laurent Wauquiez laboure les terres de la droite pour aller chercher une victoire face au favori, Bruno Retailleau. Ce mercredi, dans un restaurant du XVe arrondissement de Paris, le chef de file des députés de droite a présenté sa candidature « de rupture » avec le pouvoir en place. Membre du gouvernement, l’élection de Bruno Retailleau à la tête des LR ferait prendre le risque, selon lui, d’une dilution de la droite dans le macronisme.

Le