Après un discours particulièrement scruté à la Sorbonne, Emmanuel Macron a répété sa volonté « d’ouvrir le débat » sur la mutualisation des armes nucléaires françaises avec les autres Etats de l’Union européenne. Si le président de la République est resté flou sur ses propositions, ces déclarations ont suscité un rejet quasi unanime au sein de la classe politique française.
Au QG de Fillon, stupeur après le « 21 avril » de la droite
Par Public Sénat
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Une heure avant les résultats, les jeunes militants venus au QG de François Fillon y croyaient encore. « On va aller au bout » assurait Redhouane. 20 heures, les visages de Macron et L e Pen apparaissent sur les écrans. Tout s’écroule. Yeux écarquillés et mines des mauvais jours. François Fillon est éliminé du premier tour de la présidentielle.
« Une défaite lourde, brutale, sans précédent », ne peut que constater le député LR Damien Abad, « c’est un échec cuisant pour la droite, un 21 avril à front renversé » ajoute-t-il. Quinze ans après la défaite de Lionel Jospin, c’est autour de la droite républicaine d’être éliminée. Maigre consolation, Benoît Hamon, le candidat PS, subit une claque monumentale.
Une heure avant, « des chiffres contradictoires »
Une heure avant la désolation, des premiers chiffres circulent. L’espoir est encore là : Macron en tête, suivi de Fillon et Le Pen au coude à coude. Mais dans l’entourage de Bruno Retailleau, coordinateur de campagne, on est prudent : « On a des chiffres contradictoires. Deuxième ou troisième. On est dans l’expectative ».
Vers 19h, une sénatrice n’a pas plus d’info : « Je viens d’appeler Gérard Larcher, qui n’en a pas ». Quelques minutes avant 20 heures, on parle d’élimination. Elle est vite confirmée.
Pleurs et ambiance morose
Un étage plus bas, les militants et permanents de la campagne attendent le candidat pour son allocution. Silence de mort. Des « Fillon, Fillon » commencent, sans grand enthousiasme. Il arrive. Face aux « obstacles trop nombreux et trop cruels », François Fillon constate et assume sa défaite. « L’abstention n’est pas dans nos gênes, surtout quand un parti extrémiste approche du pouvoir ». Des « non ! » sont lancés dans la salle. François Fillon continue : « Il n’y a pas d’autres choix que de voter contre l’extrême droite », « je voterai en faveur d’Emmanuel Macron » annonce le perdant.
« Ah non ! » laisse échapper un jeune militant de 19 ans, Axel, qui « n’a pas tranché » encore s’il votera pour le leader d’En marche ! Un « Bouh » isolé est même entendu au fond de la salle. François Fillon s’éclipse, laissant les militants avec une défaite sur les bras. Une jeune fille pleure dans le fond de la salle. Son ami a les yeux rouges aussi. Ils ne veulent pas parler à la presse. Ambiance morose. Une femme d’un certain âge en veut aux médias : « Tout est de votre faute ». Une autre, « militante de la première heure », pense aussi « voter blanc » pour le second tour.
« Vue la campagne, je ne sais pas s’il y avait une solution gagnante… »
Au-delà de la déception, pour le jeune directeur de campagne, Vincent Chriqui, « c’est très frustrant. On n’a pas pu débattre de notre projet comme souhaité ». « Les affaires ont été difficiles », « ça a rendu tout le reste plus complexe » reconnaît-il. Voir Macron en tête lui reste au travers de la gorge. « Une supercherie » selon Vincent Chriqui.
D’autres parlent de « hold-up » de la part de celui que la droite qualifie d’héritier de François Hollande. Mais sous couvert d’anonymat, un responsable de la campagne admet qu’« on a peut-être mal géré les affaires. On aurait peut-être dû moins en parler. Mais il fallait se défendre » dit-il. Il ajoute : « Vue la campagne, je ne sais pas s’il y avait une solution gagnante… »
Certains sarkozystes mettent la responsabilité de la défaite sur le dos de Fillon
Déjà, certains s’empressent de mettre la responsabilité de la défaite sur le dos du candidat. A commencer par les sarkozystes, qui aimeraient prendre leur revanche lors des législatives, avec un François Baroin en chef de meute. Eric Woerth, qui a pourtant fait partie de l’équipe de campagne, affirme sur Europe 1 que « ce n’est pas la droite qui a perdu l’élection, c’est François Fillon »… « C’est le poids des affaires qui a abimé l’image de François Fillon » ajoute dans les couloirs du QG le député Daniel Fasquelle, trésorier des LR, lui aussi sarkozyste. Un autre est plus direct encore : « Les idées de droite et du centre sont majoritaires dans le pays. Fillon n’est pas qualifié à cause des affaires ».
Mais les causes de la défaite sont plus complexes, rappellent d’autres élus. « C’est un peu fastoche d’accabler François Fillon » souligne Hervé Mariton, qui appelle aussi à voter Macron, « le moins pire ». Regardez :
« Si on polarise toute notre défaite sur le candidat, ce serait se méprendre » selon Damien Abad, qui demande pour sa part des « Etats généraux de la droite après les législatives ». « On est écartelé entre Le Pen et la gauche libérale qui nous a pris sur nous », ajoute le député. Il souhaite que son parti joue « plus collectif ».
L’élection imperdable est perdue
Demain matin, un comité politique se réunit à 10h30 au QG, suivi à 17 heures d’un bureau politique. Dans la convocation, les participants n’ont pas reçu d’ordre du jour… Le risque pour la droite : repartir dans ses divisions. Mais une nouvelle bataille s’annonce déjà, celle des législatives. Elle l’aiderait à ne pas imploser. Pas tout de suite. « Le scrutin va maintenir l’unité » pense un responsable du parti.
Car les Républicains espèrent se refaire en juin. « Si Macron est élu, il sera incapable d’avoir une majorité » est persuadé Daniel Fasquelle. « Tout le monde a compris que Macron allait être élu Président. Mais quelle majorité aura-t-il pour gouverner ? » demande le député Lionel Tardy. « On a raté la présidentielle inratable, on ne va pas rater les législatives qui sont ratables » rigole un élu qui garde malgré tout son sens de l’humour. Damien Abad ne croit en revanche pas que la droite aura la majorité absolue en juin : « Ce sera difficile de gagner les législatives. La vérité, c’est que personne n’aura peut-être de majorité. Un objectif raisonnable c’est d’être le premier groupe à l’Assemblée ».
Les membres des Républicains évoquent aussi facilement la suite car beaucoup avaient en réalité anticipé le résultat. Mais ce soir, c’est une défaite historique de la droite française. L’élection imperdable est perdue.