« Aujourd’hui je comprends qu’on s’engage en dehors du PS » le constat amer d’un jeune socialiste

« Aujourd’hui je comprends qu’on s’engage en dehors du PS » le constat amer d’un jeune socialiste

Avec l´élection de François Hollande en 2012, le PS n´a jamais été aussi dominateur. Cinq ans plus tard, il s´effondre, et doit vendre son siège historique de Solférino. À travers les témoignages de figures du quinquennat, le documentaire « L’adieu à Solférino » revient sur ce tournant de la gauche. Mehdi Chalah est porte-parole national des Jeunes Socialistes depuis un an. Engagé depuis 10 ans dans le mouvement, il nous livre son regard sur ce documentaire et le socialisme aujourd’hui. 
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S’il se dit encore très attaché à l’identité socialiste, Mehdi Chalah insiste sur une mutation nécessaire du PS. Pour le porte-parole du Mouvement des Jeunes Socialistes, le PS est un parti en difficulté, qui n’arrive pas encore à redevenir un parti de masse.

 

Ce documentaire revient sur le quinquennat de François Hollande, et les fractures qu’il a occasionnées au sein du Parti socialiste. Ce quinquennat, les choix politiques fait par François Hollande, sont-ils à l’origine des scissions au sein du PS ?

Ce documentaire reprend bien les fractures qu’il y a eu au cours du quinquennat, les éléments qui ont pu constituer des fractures. Moi je l’ai vécu de l’intérieur en tant que militant mais aussi en tant que collaborateur parlementaire. Évidemment les fractures qui sont dessinées, celle de la déchéance de nationalité, celle du pacte de responsabilité et celle de la loi travail, sont à chaque fois des éléments qui ont fait que la gauche s’est posée des questions. Savoir si elle gouvernait sur sa ligne politique, et sur la ligne politique sur laquelle elle avait été élue ?

 

Et ces fractures sont-elles aujourd'hui refermées ?

Je pense qu’on est un parti qui est toujours en difficulté et qui n’arrive pas encore à redevenir un parti de masse. Évidemment que le quinquennat a laissé des traces au Parti socialiste, notamment dans nos relations avec nos partenaires de gauche, et puis surtout dans les liens que l’on peut avoir avec la population. On a fait beaucoup dans ce quinquennat, je crois qu’il faut toujours le dire et le rappeler. Ça a été un quinquennat utile mais on a effectivement eu trois, quatre… zones d’ombre qui sont peu finalement dans un quinquennat, mais qui ont fait que nous avons été mal jugés par la suite.

 

Le déménagement du siège du Parti socialiste de la rue de Solférino, au cœur de Paris, à Ivry-sur-Seine, fin 2018, c’est le moment qui est filmé dans le documentaire : c’est un tournant, c’est le symbole de la chute du parti ?

Non, je ne crois pas que ce soit un symbole de la chute du parti. Il faut aussi je crois savoir considérer, qui nous sommes, ce que nous sommes et ce que nous sommes devenus. Et je dois dire que le mouvement socialiste en France est un mouvement qui continue, qui perdure, peut-être différemment. Et qui donc doit évoluer, doit peut-être passer par des étapes d’évolution. Et en l’occurrence là, ça s’organise par un changement de siège pour se retrouver dans une ville plus populaire, en dehors du 7e arrondissement de Paris.

Le mouvement socialiste n’existe pas qu’à travers le Parti socialiste. Et donc même si effectivement le siège de Solférino était un symbole de la conquête du pouvoir par la gauche, je veux croire que changer ses locaux, muter localement et nationalement, ce soit aussi lui permettre de redevenir un vrai parti.

 

Mehdi Chalah
Mehdi Chalah

Être socialiste aujourd’hui ça veut encore dire quelque chose ? Pour vous, ça signifie quoi ?

Oui ça veut dire beaucoup. Moi je suis très attaché à cette identité socialiste. Je crois d’ailleurs que cette identité socialiste elle n’existe pas qu’à travers le Parti socialiste. On a dans la société, et on le voit à chaque élection, un bon nombre de candidats, d’élus, de militants, de sympathisants, de bénévoles, qui se disent issus du mouvement socialiste. Moi j’y suis à titre personnel très attaché, je me suis engagé au PS quand j’avais 15 ans, j’en ai aujourd’hui 26. Vous imaginez ce que ça peut constituer dans la construction de vie d’un adolescent, du moment où il s’engage à aujourd’hui. Et donc évidemment je continue à vivre avec cet héritage en moi, avec ces valeurs, avec ces idées. Et je crois que finalement le PS peut évoluer, peut changer, peut avoir des moments difficiles, et on est dans un moment difficile. Mais l’idée socialiste, elle ne peut pas mourir.

 

Faut-il continuer à militer dans un parti qui a perdu autant de poids, quand on est jeune engagé en politique ?

C’est une question qu’on se pose. C’est une question que chacun est libre de se poser. Évidemment quand je m’engage dans ma ville par exemple sur une liste qui n’est pas celle qui est investie par le Parti socialiste (ndlr : liste Roubaix en commun), je le fais aussi parce que je fais partie de ces jeunes, qui, engagés depuis 10 ans au grand Parti socialiste, ont envie d’exercer des responsabilités pour mettre en œuvre ce pour quoi ils se sont toujours battus. Et effectivement aujourd’hui c’est compliqué de s’imaginer un avenir au sein du Parti socialiste ou en tout cas d’imaginer pouvoir avoir des responsabilités et donc pouvoir mettre en avant finalement ses idées. Donc je comprends tout à fait les jeunes, et les moins jeunes par ailleurs, qui s’engagent dans leur ville, dans leur département, en dehors aussi parfois du Parti socialiste.

Mais par contre il y a une limite, c’est-à-dire que je crois que l’engagement il se fait dans le cadre des valeurs, et on ne peut pas avoir été 10 ans militant au PS et aujourd’hui finalement s’engager derrière un gouvernement qui finalement fait une politique de droite. Ça c’est une limite à mon avis à ne pas franchir.

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