Budget de l’Etat: la Cour des comptes critique le recours aux fonds dédiés

Budget de l’Etat: la Cour des comptes critique le recours aux fonds dédiés

Un satisfecit et une mise en garde: la Cour des comptes a salué mercredi les progrès accomplis dans la gestion du budget de l...
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Par Valentin BONTEMPS

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Un satisfecit et une mise en garde: la Cour des comptes a salué mercredi les progrès accomplis dans la gestion du budget de l'Etat, tout en critiquant le recours croissant à des fonds dédiés, qui échappent au contrôle du Parlement.

Dans son rapport sur l'exécution du budget 2018, qui comprend des analyses détaillées de chacune des missions budgétaires de l'Etat, soit un total de près de 3.000 pages, la Cour estime que "la dynamique d'amélioration" s'est poursuivie l'an dernier.

"En 2018, l'exécution a été mieux maîtrisée qu'au cours des années précédentes", souligne la haute juridiction financière. Cette amélioration s'explique notamment par "une programmation plus sincère des dépenses", ajoute-t-elle.

Selon Bercy, les dépenses de l’État se sont élevées à 325,2 milliards d'euros, soit 1,1 milliard d'euros de moins que l'objectif de la loi de finances initiale. Sur un an, la hausse atteint 0,3%, contre 3,2% en 2017.

Le déficit du budget de l’État est passé pour sa part de 67,7 milliards à 76 milliards d'euros, mais cette hausse, inférieure aux attentes, s'explique principalement par les baisses d'impôts, qui ont atteint 13,5 milliards d'euros.

"Les sous-budgétisations ont été limitées à 1,5 milliard d'euros contre 4,4 milliards en 2017", a souligné lors d'une rencontre avec la presse le président de la Cour Didier Migaud, saluant les "efforts réalisés" par Bercy pour "sincériser" les comptes publics.

Selon l'ancien élu socialiste, "ce satisfecit général" ne doit cependant "pas occulter certaines pratiques", qui continuent de rendre la politique de l’État "complexe", "instable" et "peu lisible".

Pour la Cour des comptes, les "crédits budgétaires" ne correspondent en effet qu'à "une partie du financement" des politiques publiques, qui passe aussi par "l'affectation de taxes" dédiées ou "un recours croissant aux fonds sans personnalité juridique".

"Ces contournements portent atteinte à la cohérence du cadre budgétaire et limitent la capacité du Parlement à appréhender dans leur globalité les enjeux financiers associés à l'action de l’État", ajoute-t-elle.

- "remise en ordre" -

Les fonds sans personnalité juridique, dits "FSPJ", sont des véhicules financiers contrôlés par l’État, mais gérés par des tiers. Ils permettent à l’État de "sanctuariser" les dépenses pour certaines politiques publiques.

Selon la Cour des comptes, au moins 154 structures de ce type existent actuellement en France. Ces dispositifs "se multiplient sans examen préalable de ceux qui existent déjà (...) Il s'en crée en permanence", relève Didier Migaud.

Lundi, Emmanuel Macron a ainsi annoncé au cours d'un déjeuner à l'Elysée la création d'un fonds d'investissement culturel de 225 millions d'euros afin d'aider les entreprises du secteur à se développer, après avoir lancé en 2018 le Fonds pour l'innovation et l'industrie.

Doté de 10 milliards d'euros, ce dernier devrait être abondé à terme par des cessions de participations publiques dans le Groupe ADP ou la Française des jeux, doit servir à financer des "innovations de rupture", principalement dans l'industrie.

La Cour des comptes estime que ce fonds, qui doit produire des revenus annuels de 250 millions d'euros, repose sur "une mécanique budgétaire inutilement complexe" et pourrait "trouver sa place dans le budget général" de l’État, ainsi que plusieurs autres structures, comme le Fonds du service public de l'énergie.

"Je ne partage absolument pas les analyses et les critiques du président de la Cour des Comptes sur le fonds d'innovation de rupture", a déclaré à l'Assemblée nationale le ministre de l’Économie Bruno Le Maire.

"Oui il faut retirer du budget ces fonds pour l'innovation de rupture, parce que sinon, ils sont systématiquement réduits année après année, alors que là, ils sont sanctuarisés", a ajouté M. Le Maire.

Quels montants financiers, à travers ces structures, échappent au contrôle des parlementaires? Pour Cécile Fontaine, conseillère-maître à la Cour des comptes, "il est très difficile d'en faire l'addition", car ces fonds recouvrent des réalités "très différentes".

Mais "on est sur des très grosses masses" financières, insiste la magistrate, qui souligne que la Cour appelle de ses vœux une "remise en ordre" des fonds existants.

Pour ce faire, elle recommande aussi la suppression de structures "qui n'ont plus de raison d'être" ou le transfert de certaines missions à des opérateurs existants.

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