Cannabis thérapeutique: l’Assemblée s’apprête à autoriser une expérimentation
L'Assemblée nationale s'apprête à autoriser une expérimentation du cannabis thérapeutique, pour laquelle l'agence du médicament ...

Cannabis thérapeutique: l’Assemblée s’apprête à autoriser une expérimentation

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Par Pierre ROCHICCIOLI

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L'Assemblée nationale s'apprête à autoriser une expérimentation du cannabis thérapeutique, pour laquelle l'agence du médicament (ANSM) avait déjà donné son feu vert. Voici les principaux enjeux d'une réforme déjà appliquée dans de nombreux pays.

- Pour quels malades

Cette expérimentation concernera des personnes souffrant de maladies graves - certaines formes d'épilepsies, de douleurs neuropathiques, d'effets secondaires de chimiothérapie, de soins palliatifs ou contractions musculaires incontrôlées de scléroses en plaques - pour lesquelles les dérivés du cannabis peuvent constituer un apport thérapeutique supplémentaire.

L'expérimentation se déroulera dès "début 2020" et "sur deux ans", "avec des médecins formés à la prescription" et "un vrai suivi scientifique", prévoit le rapporteur du budget de la Sécu, Olivier Véran (LREM), à l'initiative de l'amendement d'autorisation devant être adopté jeudi soir ou vendredi. "Environ 3.000 malades" devraient être concernés, selon le député de l'Isère, neurologue de profession.

- Quel cadre

Cette expérimentation serait menée dans plusieurs centres hospitaliers, en particulier des centres de référence pour les pathologies concernées. Une prescription initiale hospitalière sera effectuée par un médecin spécialiste, neurologue ou médecin de la douleur notamment, et ces professionnels suivront ainsi l'effet positif et les éventuels effets indésirables de ces traitements. Les patients pourront se fournir en pharmacie hospitalière puis en pharmacie de ville, selon M. Véran.

L'agence du médicament s'est prononcée en faveur de modalités d'administration assez larges: le traitement pourra ainsi prendre la forme de fleurs séchées, d'huiles et éventuellement de tisanes.

Les différentes posologies pourront intégrer des rapports très variables entre les deux principes actifs: le tetrahydrocannabinol (THC) aux effets psychoactifs, et le cannabidiol (CBD) qui entraîne plutôt une relaxation musculaire.

- Déjà sur les rails

L'agence du médicament avait déjà donné son feu vert en juillet à cette expérimentation, selon un cadre proposé par un groupe d'experts. Une autorisation législative reste nécessaire.

Un comité scientifique a été créé mi-octobre pour mettre en oeuvre cette expérimentation. Il sera notamment chargé de rendre des avis sur le cahier des charges pour "les médicaments utilisés durant l'expérimentation", "la formation des professionnels de santé et les conditions du registre de suivi des patients".

- Que dit la loi

Le principe général de la loi sur les stupéfiants est l'interdiction de leur usage: "L'usage illicite de l'une des substances ou plantes classées comme stupéfiants est puni d'un an d'emprisonnement et de 3.750 euros d'amende", précise le Code de la santé publique.

La loi permet cependant aux procureurs de la République de ne pas "poursuivre" l'usager et de choisir de mettre en œuvre des "mesures alternatives aux poursuites" comme des rappels à la loi. Les contrevenants s'exposeront prochainement à une amende forfaitaire de 200 euros pour usage de stupéfiants.

Concernant un usage médical, depuis un décret de 2013 certains médicaments à base de cannabis et dérivés peuvent faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché (AMM).

Deux médicaments ont obtenu une AMM. L'un, pour la sclérose en plaques, n'a jamais été commercialisé, faute d'accord sur le prix. L'autre, indiqué dans des épilepsies et disponible en autorisation temporaire depuis décembre 2018, doit encore obtenir l'avis d'instances compétentes.

A l'issue de l'expérimentation devant être inscrite dans la loi, il reviendra au gouvernement de décider d'une éventuelle généralisation du cannabis thérapeutique. Pas besoin de nouvelle loi pour cela, mais d'une simple modification règlementaire, selon Olivier Véran.

- Les exemples étrangers

Le cannabis à usage médical est déjà autorisé dans une trentaine de pays. Les précurseurs ont été le Canada, les Pays-Bas et Israël.

Depuis 2001, les Canadiens atteints de certaines maladies lourdes ou incurables, comme le sida et le cancer, peuvent recevoir des permis pour fumer de la marijuana. Au Pays-Bas, les personnes atteintes de maladies graves sont autorisées à acheter du cannabis dans les pharmacies sur présentation d'une ordonnance médicale. En Israël, depuis 2006, le cannabis thérapeutique peut être prescrit pour des doses contrôlées aux patients atteints de cancer, d'épilepsie, de stress post-traumatique ou de maladies dégénératives.

Aux Etats-Unis, 33 Etats ont recours au cannabis médical. Il est également légalisé dans six pays d'Amérique latine et 21 des 28 pays de l'Union européenne l'autorisent à différents niveaux.

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