Congrès des départements : Edouard Philippe tente de déminer… sans succès
Le premier ministre Edouard Philippe a assuré devant l’ADF que l’Etat prendrait en charge l’hébergement d’urgence des mineurs isolés. Sur le financement du RSA, il promet un fonds d’urgence. Trop flou et insuffisant, selon les départements.

Congrès des départements : Edouard Philippe tente de déminer… sans succès

Le premier ministre Edouard Philippe a assuré devant l’ADF que l’Etat prendrait en charge l’hébergement d’urgence des mineurs isolés. Sur le financement du RSA, il promet un fonds d’urgence. Trop flou et insuffisant, selon les départements.
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Tentative de déminage. Edouard Philippe a cherché à envoyer des signaux positifs aux départements, rassemblés à Marseille, ce vendredi, pour la clôture du 87e congrès l’Association des départements de France. Depuis la rentrée, les relations entre collectivités et gouvernement sont très difficiles. Après la grogne des élus locaux cet été puis le clash avec les Régions de France, l’exécutif ne pouvait se permettre un nouveau front avec les départements.

Edouard Philippe était notamment attendu sur deux sujets brûlants pour eux : la hausse du nombre de mineurs étrangers isolés, une charge d’un milliard d’euros pour les 25.000 jeunes concernés, et le financement du RSA. Il a cherché à répondre à leurs doléances, sans totalement y parvenir.

« L’Etat assumera l’évaluation et l’hébergement d’urgence des mineurs (isolés) rentrant jusqu’à ce que leur majorité soit confirmée. Cet accueil d’urgence et la capacité à dire si oui ou non, nous sommes face à un mineur ou un majeur, doit relever de la responsabilité de l’Etat. C’est un engagement du Président et je le confirme » a affirmé Edouard Philippe.

Le budget 2018 prévoit « au total 132 millions d’euros » de crédits supplémentaires « pour accompagner la hausse du nombre de mineurs et prendre de façon exceptionnelle le surcoût de l’aide sociale à l’enfance » a ajouté le premier ministre.

« Pas d’invitation à une recentralisation du RSA »

Sur le RSA, qui fait partie des allocations individuelles de solidarité, Edouard Philippe a voulu montrer qu’il avait là aussi entendu le message : « Il n’y a pas d’invitation à une recentralisation, il y a une volonté de pilotage décentralisé », conformément à la position qui se dégage au sein de l’ADF. Mais rien de précis sur les questions financières en revanche. Il a quand même promis « un mécanisme de fonds d’urgence », voté avant la fin de l’année en loi de finances rectificative, « pour les départements confronté à une impasse de financement ». Un tel mécanisme d’urgence, à hauteur de 200 millions d’euros, existait déjà mais il n’avait pas été reconduit jusqu’à présent.

RSA : Edouard Philippe annonce la création d’un « fonds d’urgence »
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Au-delà de l’urgence, Edouard Philippe souhaite « revisiter » à moyen terme le « système de pilotage de nos allocations individuelles de solidarité ». Une « mission » est confiée notamment à Alain Lambert, ancien ministre du Budget, ex-sénateur et ancien président de département. Il devra réfléchir à la fiscalité locale.

« Expérimentation » et « sur mesure »

Pour continuer son opération séduction, il a rappelé que l’exécutif ne comptait pas « rouvrir le chantier de la loi NOTRe », la réforme territoriale de François Hollande qui a abouti à la fusion des régions et une nouvelle répartition des compétences. Une « stabilité » intentionnelle que demandent les collectivités.

Le premier ministre parle néanmoins d’une « nouvelle étape de la décentralisation » qui passera plutôt par « l’expérimentation et la différentiation ». « Il faudra faire du sur-mesure » en permettant et en accompagnant les fusions de départements ou de communes qui le souhaitent. Une demande des intéressés.

« Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup. Et là, il y a un très gros loup »

Opération réussie ? Pas tout à fait. Après le discours du premier ministre, les chefs des exécutifs départementaux restaient pour le moins sur leur faim. « Il nous a donné des pistes mais il ne nous a pas apporté de solutions » a réagi au micro de Public Sénat Dominique Bussereau, président de l’ADF. S’il exprime « un satisfecit sur la décentralisation », « sur le reste, on ne sait pas comment on va financer les mineurs non accompagnés », même s’il reconnaît que la décision est « bonne ». « On sait qu’il y a un fonds d’urgence pour les allocations individuelles de solidarité, mais on ne sait pas de quel montant » pointe encore le président de la Charente-Maritime.

Pour Nicolas Perruchot, président LR du département du Loir-et-Cher, « la coupe est plus qu’à moitié vide ». « Peut mieux faire » juge Olivier Richefou, président UDI de la Mayenne. André Viola, président PS de l’Aude, est le plus circonspect : « Le premier ministre était attendu comme le loup blanc. Mais quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup. Et là, il y a un très gros loup » :

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