Crimes sexuels sur mineurs : Annick Billon dénonce les « fake news » autour de sa proposition de loi
Brocardée sur Twitter après l’adoption la semaine dernière de sa proposition de loi visant à protéger les jeunes mineurs des crimes sexuels, la sénatrice centriste, Annick Billon veut mettre fin à la polémique en rappelant les enjeux de son texte adopté à l’unanimité du Sénat. Entretien.
Par Propos recueillis par Quentin Calmet & Simon Barbarit
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Comment expliquez-vous cette polémique autour de votre proposition de loi ?
Il y a eu une interview qui a été tronquée (sur BFM-TV ndlr). Mon micro a été coupé. Le message était totalement incompréhensible et ça a entraîné la circulation d’une information tronquée sur certains réseaux sociaux comme ça peut arriver très souvent. Je le regrette parce que c’est un texte majeur qui a été voté à l’unanimité. Ce sont 343 sénateurs qui se sont engagés, tous groupes confondus, pour mieux protéger les enfants et condamner encore plus les agresseurs, les prédateurs sexuels. C’est une avancée sérieuse.
Pour rappel, votre texte instaure dans le Code pénal une nouvelle infraction de « crimes sexuels sur mineur » avec un seuil d’âge de 13 ans en dessous duquel une victime est considérée comme ne pouvant pas être consentante. Cette disposition a été interprétée par certains comme une forme de légalisation des relations sexuelles entre un majeur et un mineur de plus de 13 ans.
C’est une « fake news ». Comment peut-on imaginer que 343 sénateurs de toutes tendances politiques aient pu mettre quelque chose de ce type dans la loi ? Les sénateurs ont renforcé la protection des jeunes mineurs. Ils ont criminalisé les relations sexuelles entre jeunes mineurs et majeurs. C’est une avancée que le gouvernement n’avait pas réussi à faire lors du projet de loi de 2018 (loi Schiappa). Les sénateurs l’ont fait. Et j’engage l’Assemblée nationale à s’en saisir rapidement parce qu’on l’a vu ces dernières semaines, avec le livre de Camille Kouchner, les victimes sont nombreuses et elles attendent de nous qu’on réagisse très vite.
Un seuil d’âge de non-consentement à 13 ans : qu’est-ce que ça change pour les victimes ?
Nous avons posé un interdit clair. Le mineur (de moins de 13 ans ndlr) ne sera jamais interrogé sur son consentement. C’est une avancée considérable pour la protection des jeunes mineurs. Ça n’existe pas aujourd’hui dans le droit. Ça ne veut pas dire que nous n’allons pas protéger tous les autres mineurs. La rapporteure, Marie Mercier a apporté un amendement majeur de protection des mineurs au-delà (de 13 ans). Donc, stop aux fake news, stop à la désinformation, le Sénat a été au rendez-vous pour la protection des jeunes mineurs et ça, c’est ce qu’il faut retenir. Je suis fière d’avoir porté ce texte au Sénat.
On vous reproche de ne pas avoir choisi le seuil d’âge de non-consentement à 15 ans
J’entends les débats qu’il peut y avoir sur le seuil d’âge. Pour ma part, après de nombreux mois de travaux, j’ai été convaincue que cet interdit devait être posé dans la loi à 13 ans. C’est un seuil qui était porté par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. Poser un interdit dans la loi, ce n’est pas moins protéger les enfants qui ont 13 ans et un jour. D’ailleurs le dispositif proposé par Marie Mercier le démontre (il ajoute dans le Code pénal que la contrainte morale ou la surprise, éléments constitutifs du viol, peuvent résulter de ce que la victime mineure était âgée de moins de quinze ans et ne disposait pas de la maturité sexuelle suffisante ndlr). En 2018, le Conseil d’Etat s’était prononcé contre un seuil d’âge à 15 ans. Aujourd’hui, il existe le délit d’atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans. Le Conseil d’Etat invoquait, qu’il y aurait, pour une même infraction, une double qualification. Ce qui est impossible en droit pénal. J’ai donc proposé d’instaurer une nouvelle infraction qui permet de contourner cet obstacle et de poser cet interdit.
C’est ce que vous avez tenté d’expliquer sur BFM-TV ?
Je tentais d’expliquer qu’il pouvait y avoir des relations amoureuses entre adolescents. Il y a eu une incompréhension dans cette interview tronquée et mon micro coupé. Il y a eu de la malhonnêteté de la part de Bruce Toussaint (le journaliste). C’est une faute professionnelle. Après trente interviews sur ce sujet dans différents médias, je dois dire que je n’avais jamais eu le micro coupé de la sorte. Cette séquence a été diffusée en boucle et on voit la puissance négative d‘un réseau social. Toutes ces personnes qui ont tweeté ont défait un travail extrêmement constructif dans la protection des jeunes mineurs. Ce n’est pas avec des tweets qu’on explique une proposition de loi.
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