Crimes sexuels sur mineurs : quels sont les apports de la proposition de loi ?
Après avoir été adoptée à l’unanimité par les sénateurs et les députés, la proposition de loi visant à protéger les jeunes mineurs des crimes sexuels fait son retour à la Haute assemblée jeudi pour en examen en seconde lecture. Quels sont les enjeux de ce texte déposé en novembre dernier par la sénatrice centriste, Annick Billon ?

Crimes sexuels sur mineurs : quels sont les apports de la proposition de loi ?

Après avoir été adoptée à l’unanimité par les sénateurs et les députés, la proposition de loi visant à protéger les jeunes mineurs des crimes sexuels fait son retour à la Haute assemblée jeudi pour en examen en seconde lecture. Quels sont les enjeux de ce texte déposé en novembre dernier par la sénatrice centriste, Annick Billon ?
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  • Création d’un seuil de non-consentement

C’est l’apport principal de cette proposition de loi qui crée un crime spécifique dans le Code pénal. A l’origine, il était prévu à l’article 1 que « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis par une personne majeure sur un mineur de treize ans est puni de vingt ans de réclusion criminelle lorsque l’auteur des faits connaissait ou ne pouvait ignorer l’âge de la victime ». Ce seuil au-delà duquel un mineur est dans l’incapacité de consentir à un rapport sexuel avec un adulte a été rehaussé à 15 ans par les députés, sous l’impulsion du gouvernement. Le garde des Sceaux s’y était pourtant opposé en première lecture devant le Sénat pointant un risque « d’inconstitutionnalité ». C’est la raison pour laquelle, les députés ont inséré un amendement dit « Roméo et Juliette. » : un écart d’âge de 5 ans entre le mineur de moins de 15 ans et le majeur, afin de ne pas criminaliser les relations sexuelles consenties entre un adolescent et un jeune adulte.

Les sénateurs et les députés ont ajouté les « actes bucco-génitaux » à la notion de viol.

Ce seuil 15 ans devrait être conservé par les sénateurs.

  • Criminalisation de l’inceste

L’impact du livre de Camille Kouchner et la vague de témoignage #Metooinceste a entraîné cet ajout au texte. Jusqu’à aujourd’hui l’inceste ne constitue qu’une circonstance aggravante d’un délit ou d’un crime. Les députés ont ajouté un seuil de non-consentement fixé à 18 ans pour les relations sexuelles incestueuses entre un majeur et un mineur.

En première lecture, la gauche du Sénat avait demandé la même chose mais s’était heurtée au rejet de l’opposition et du gouvernement. « L’inceste qui n’était pas un sujet (pour le gouvernement) il y a trois mois est devenu un sujet prioritaire. Le garde des Sceaux et le gouvernement ont souhaité aller vite et utiliser ce véhicule législatif pour inscrire un article spécifique sur l’inceste » s’est félicitée la semaine dernière Annick Billon.

La difficulté réside ici dans la définition des auteurs, les députés ont retenu les ascendants ou les personnes disposant d’une autorité de droit ou de fait. Une liste trop restrictive pour certaines associations.

  • Délais de prescription

Si certaines associations demandent l’imprescriptibilité pour les crimes sexuels sur mineurs, au Sénat, c’est un amendement de Laurence Rossignol qui vise à interrompre la prescription (Fixé à 30 ans depuis la loi Schiappa de 2018) lorsque l’auteur d’un crime commis sur un mineur commet le même crime sur un autre mineur, qui a été adopté. Le gouvernement a également fait adopter un amendement instituant un mécanisme de « prescription glissante ». Le délai de prescription serait ainsi prolongé en cas de nouveau viol sur un autre mineur. Ce principe serait aussi appliqué aux délits sexuels sur mineurs.

  • Prostitution, sextorsion

En deuxième lecture, les sénateurs doivent également se pencher sur plusieurs ajouts de l’Assemblée. Les députés ont, notamment, alourdi les peines pour les proxénètes et clients des prostitués mineurs. Une nouvelle infraction spécifique sur la « sextorsion » a également été ajoutée. Le fait pour un majeur d’inciter un mineur à se livrer à des pratiques sexuelles sur internet sera « de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende ».

La proposition de loi est examinée en commission des lois du Sénat le 23 mars avant un examen en deuxième lecture en séance publique le 25.

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