Cyberattaques russes contre Macron ? «Le Kremlin a d’autres chats à fouetter» répond Vladimir Fedorovski

Cyberattaques russes contre Macron ? «Le Kremlin a d’autres chats à fouetter» répond Vladimir Fedorovski

Depuis quelques jours, les membres de l’équipe d’Emmanuel Macron dénoncent des tentatives de déstabilisation de la part de la Russie. Pour l’ancien diplomate russe, Vladimir Fedorovski, le président d’En Marche devrait apporter des preuves.
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Après Hillary Clinton, le Kremlin aurait donc décidé de s’attaquer à Emmanuel Macron dont les positions en matière de politique internationale seraient peu susceptibles de s’accorder avec celles de Vladimir Poutine. Cette thèse est développée par l’équipe du candidat à la présidentielle depuis plusieurs jours. La première salve est donnée par Richard Ferrand, député PS secrétaire général du mouvement « En Marche ! »dans une tribune publiée par le journal le Monde. Il  y accuse Russia Today et SputnikNews, deux médias financés par le Kremlin, de « s’acharner à répandre sur Emmanuel Macron les rumeurs les plus diffamatoires ». Voilà pour la face émergée de l’iceberg. Mais les équipes du candidat à la présidentielle dévoilent également que « le site internet du mouvement (…) et ses infrastructures font l’objet de plusieurs milliers d’attaques mensuelles sous diverses formes ». « Depuis trente jours, nous avons subi quatre mille attaques » précise sur le site du journal Le Monde, Mounir Mahjoubi, responsable numérique de la campagne d’Emmanuel Macron. Selon cet ancien président du Conseil National du numérique, « la moitié des quatre mille attaques provient d’Ukraine ». « On a un doute sur l’origine des cyberattaques, mais nous n’avons aucun doute que la Russie est très active, sur les fake news et sur les réseaux sociaux » ajoute-il.

Des accusations jugées « absurdes » par le Kremlin

Les Français ont en effet pu apprendre « les rumeurs » sur la vie privée d’Emmanuel Macron. Dans une interview donnée à l’agence russe Sputnic, le député LR français Nicolas Dhuicq l’accuse carrément d’être soutenu par un « lobby gay ». Toutefois, les milliers de cyberattaques visant le site Internet d’En Marche étaient jusqu’ici inconnues. De là, est-il crédible d’y voir une tentative de déstabilisation à peine couverte de la part du Kremlin à l’encontre d’un des favoris de la présidentielle a priori pas vraiment russo-compatible ? Des accusations d'ingérence jugées « absurdes » par la présidence russe. « Nous n'avons pas et nous n'avons jamais eu l'intention de gêner les affaires intérieures d'un pays, encore moins son processus électoral », a assuré le Kremlin ce mercredi.

« Tous les candidats de toutes les élections du monde sont susceptibles d’être visés »

Pour Daniel Martin, ancien responsable du département système d’information de la DST, « ce genre d’attaques font désormais partie du jeu ». « Toutes les nations possèdent des cyber-bataillons qui pratiquent ce genre de choses. Le principe est que le lien hiérarchique entre ces groupements de hackers et les Etats Nations est impossible à déterminer.  Si vraiment Emmanuel Macron est attaqué par la Russie, vous pouvez être sûr qu’ils ne laisseront pas de traces derrière eux ».

 François-Bernard Huyghe, chercheur à l’IRIS  et spécialiste de la stratégie de l’information abonde dans ce sens. « Des cyberattaques  qui proviennent de l’intérieur des frontières russes ne prouvent pas qu’elles soient commanditées par l’Etat. De la même manière, les attaques de hackers français ne se font pas forcement sur ordre de François Hollande.  Tous les candidats de toutes les élections du monde sont susceptibles d’être visés. On parle de plusieurs choses. D’abord le sabotage, je ne pense pas qu’un virus particulièrement vicieux ou sophistiqué puissent faire perdre une élection. Ensuite, il y a l’espionnage, ce qui est arrivé à Hilary Clinton avec ses emails (piratés par des hackers basés en Russie et diffusée sur Wikileaks ndlr). Il faut ici se poser la question : qu’est ce qui est le plus ravageur pour le candidat, le fait d’avoir été espionné ou le contenu des informations dévoilées ?

« Macron est en train de faire une mise en scène destinée à faire oublier qu’il n’a pas de programme précis »

Autre question essentielle à 60 jours de l’élection présidentielle : la Russie cache-t-elle sa volonté d’ingérence dans le scrutin ? A en croire l’ancien diplomate russe et écrivain, Vladimir Fedorovski, le Kremlin a d’autres chats à fouetter ». « La Russie se désintéresse de l’Europe et de la France en particulier depuis l’affaire des Mistrals (dont la vente a été annulée en 2015 par la France en réponse à l’annexion russe de l’Ukraine ndlr) assure l’auteur de « Poutine de A à Z » (ed. Stock). « Emmanuel Macron devrait apporter des preuves car historiquement, l’espionnage concerne la Russie comme le monde occidental. J’ai travaillé avec Mikhaïl Gorbatchev et je peux vous dire que son téléphone a été écouté jusqu’au bout par la CIA. Emmanuel Macron est en train de faire une mise en scène destinée à faire oublier qu’il n’a pas de programme précis. Le niveau du débat politique est assez bas. Je n’ai jamais vu ça, c’est une honte » se désole-t-il.

 Des propos qui tranchent avec une tribune publiée dans le Huffington Post, ce mercredi, cosignée notamment par le directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique, Bruno Tertrais. « Ne nous y trompons pas, les objectifs de Moscou vont au-delà de l'élection de candidats favorables. La Russie cherche à affaiblir l'Occident de l'intérieur en érodant nos institutions, en créant un climat de doute, de mensonge, en insinuant que nos dirigeants ne valent pas mieux que les kleptocrates qui gouvernent le Kremlin et en propageant un système de valeurs antinomiques de nos principes fondamentaux » s’alarment les auteurs.

Alors que de nouvelles révélations sur des contacts répétés entre des proches de Donald Trump et le renseignement russe l'an dernier éclaboussent la Maison Blanche, François Hollande réclame, aujourd’hui, un rapport circonstancié sur les menaces de cyberattaques pesant sur la présidentielle. Sans citer la Russie, l’Elysée souhaite que les partis politiques engagés dans la campagne de la présidentielle mettent en place des « mesures spécifiques de protection et de vigilance ». Le Front national, selon Stéphane le Foll, porte parole du gouvernement, « n'a pas souhaité avoir ce type d'informations ».

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