D’En Marche à l’Élysée, la présidentialisation d’Emmanuel Macron
7 mai, au soir de sa victoire, Emmanuel Macron surprend avec deux discours graves et une marche solitaire jusqu’à la pyramide du Louvre. Une prise de distance qui rompt avec la communion et le partage qui avait fait le succès de sa campagne. Pourquoi ? Nos experts se sont posés la question. 

D’En Marche à l’Élysée, la présidentialisation d’Emmanuel Macron

7 mai, au soir de sa victoire, Emmanuel Macron surprend avec deux discours graves et une marche solitaire jusqu’à la pyramide du Louvre. Une prise de distance qui rompt avec la communion et le partage qui avait fait le succès de sa campagne. Pourquoi ? Nos experts se sont posés la question. 
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Depuis son élection, même s’il n’accorde pas d’interview, Emmanuel Macron est omniprésent dans les médias. En effet, moins d’une semaine après son élection, deux documentaires consacrés à sa campagne ont été diffusés. L’occasion de découvrir les coulisses de son accession au pouvoir. Des coulisses qui nous dévoilent un candidat détendu, qui, lorsqu’il reçoit un œuf en pleine tête au Salon de l’agriculture, préfère, par exemple, en rire et esquisser une blague. « Ce n’est rien, juste un petit shampoing aux œufs ».

Alors réelle décontraction ou coup de com’ pour les caméras ? La psychanalyste Sophie Cadalen n’est pas dupe : « c’est quelqu’un à la repartie très acérée, ce n’est pas si cool que ça. Il y a, dans sa décontraction, quelque chose d’offensif et défensif ». Il y aurait, toujours selon elle, « un détournement de l’agression » pour en faire quelque chose de positif. La psychanalyste souligne d’ailleurs que le premier réflexe du candidat est de demander si sa décontraction est visible sur la vidéo de l’incident disponible sur Internet.

Selon Sophie Cadalen, cette posture « cool » correspondait au temps de la campagne, lorsque son message était  « aimez-moi, adhérez à mon programme ». Mais désormais, si Emmanuel Macron apparaît plus grave, comme lors de son allocution au Louvre au soir de sa victoire, c’est qu’il occupe une nouvelle place, « celle de président. Il ne va plus séduire, ce sont les autres qui vont le suivre ».

L’historien Christian Delporte partage cette analyse. Au soir du 2nd tour, « lorsqu’il arrive seul, qu’il parle seul sur scène, il crée une distance avec le peuple français. Cette solitude symbolique sert à se présidentialiser ». Bertrand Delais, auteur d’un documentaire sur la campagne victorieuse du candidat d’En Marche, voit quant à lui un symbole monarchique derrière le choix du Louvre. «À l’international, il y a un souci d’offrir cette France universelle par son rayonnement culturel, mais il y a aussi une volonté de s’enraciner dans l’histoire. Ce choix fait donc directement référence à la monarchie ».

La revanche « du petit Picard à Paris »

« Je n’ai pas de leçon à recevoir du petit milieu parisien ». Lorsqu’il est critiqué, Emmanuel Macron n’hésite pas à répliquer en faisant référence à ses origines et en avançant sa singularité. Une position surprenante pour un ancien énarque, passé par Sciences Po. « Je pense qu’il se vit toujours comme un provincial qui a réussi à Paris. Il a une blessure narcissique : l’échec à Normale Sup et le lycée Henri IV où il a vécu une sorte racisme social de la part de la bourgeoisie germanopratine », analyse Bertrand Delais.

Pour Sophie Cadalen, lorsqu’Emmanuel Macron joue de ses origines provinciales, c’est pour mieux marquer sa différence, « cette position, c’est une position supérieure : Je ne suis pas comme vous, je ne viens pas du même endroit, mais je suis là, au-dessus de vous ».  La psychanalyste décèle même une pointe d’arrogance. « Chez lui, il y a quelque chose du désir, c’est quelqu’un de très désireux, qui est arrogant. Et une des façons de porter et de valoriser cette arrogance, c’est de dire : Je ne suis pas comme vous ».

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