Delfraissy alertait dès le 30 avril sur le risque d’une «deuxième vague vers septembre/octobre»
Dès avril dernier, devant le Sénat, le président du Conseil scientifique avait mis en garde sur le risque de deuxième vague de Covid-19. Les auditions de la commission d’enquête de la Haute assemblée ont ensuite été autant d’alertes sur la situation et la nécessité de l’anticiper.

Delfraissy alertait dès le 30 avril sur le risque d’une «deuxième vague vers septembre/octobre»

Dès avril dernier, devant le Sénat, le président du Conseil scientifique avait mis en garde sur le risque de deuxième vague de Covid-19. Les auditions de la commission d’enquête de la Haute assemblée ont ensuite été autant d’alertes sur la situation et la nécessité de l’anticiper.
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Les premiers signes d’alertes sont arrivés très tôt, venant des médecins. La deuxième vague d’épidémie de Covid-19, suite en réalité de la première, va pousser probablement Emmanuel Macron à annoncer ce soir un reconfinement. Pourtant, le risque d’un retour des contaminations de masses a clairement été évoqué depuis des mois. Ce qui pose aujourd’hui la question du retard dans les mesures prises par le gouvernement. Trop peu, trop tard, avant de finir par boucler certainement à nouveau le pays et les Français.

« Un second confinement n’est pas à exclure »

Dès le premier confinement, certains anticipaient déjà. « Sans traitement, ni vaccin, ni immunité collective, il y aura forcément une deuxième vague » assure ainsi le 21 avril Bernard Jomier, médecin et sénateur PS de Paris. « L’enjeu sera de tout faire pour que cette deuxième vague ne soit pas aussi forte que la première en ayant recours de façon massive aux masques, aux tests viraux généralisés, aux gestes barrières, et à l’isolement des personnes potentiellement malades ».

Celui qui est aujourd’hui membre de la commission d’enquête du Sénat sur le Covid, ajoute, sous forme de prédiction, qu’un « second confinement n’est pas à exclure », si cette deuxième vague menace de nouveau les hôpitaux de saturation…

« Anticiper et ne pas se retrouver comme on s’est retrouvé fin février/début mars »

Le 30 avril, c’est ensuite Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, qui met en garde, lors d’une audition devant le Sénat. Rétrospectivement, il avait malheureusement raison. « Si on n’arrive pas à avoir ces tests », le déconfinement ne pourra pas bien se passer, souligne-t-il, expliquant que le rebond pourrait arriver après l’été.

« Il y a toute une discussion sur la relation entre virus et climat. La chaleur ambiante », qui peut avoir un effet « sur certains virus ». Si bien qu’« il peut y avoir une amélioration au cours de l’été, et une récidive à la rentrée. Ce qui pose la question d’une éventuelle deuxième vague vers septembre/octobre » affirme au printemps dernier Jean-François Delfraissy. Il appelle alors à « anticiper et ne pas se retrouver comme on s’est retrouvé fin février/début mars, avec quelque chose qui n’avait pas été suffisamment anticipé de nous tous » (voir la première vidéo).

« Plan de prévention à mettre en œuvre dès maintenant »

Dans son avis du 5 juin, le Conseil scientifique élabore quatre scénarios. Le pire, celui d'une « dégradation critique des indicateurs » de suivi, traduisant « une perte du contrôle » de l’épidémie, est la réalité actuelle. Le Conseil en appelait à « un plan de prévention à mettre en œuvre dès maintenant ».

Le 30 juin, le médecin Yvon Le Flohic, qui a poussé avec d’autres de ses confrères pour le port du masque à l’intérieur (lire ici), est clair sur les risques futurs : « La levée du confinement provoque systématiquement un redémarrage de l’épidémie. (…) Ce redémarrage s’effectue chez des personnes bien plus jeunes en moyenne, avec moins de symptômes » dit-il. C’est bien ce qui va se passer bientôt à Marseille, puis dans toute la France.

« Si on ne règle pas la question des tests on reconfinera à nouveau »

« Si on ne règle pas la question des tests en France (…) on reconfinera » pour Philippe Froguel
02:13

La commission d’enquête du Sénat sur la gestion de la crise du Covid-19, dont l’un des objectifs affichés est justement de mieux se préparer en cas de seconde vague, a ensuite été l’occasion de nouvelles alertes. Philippe Froguel, endocrinologue et généticien, le 10 septembre, jour où l’on compte 8.500 nouveaux cas : « Si on ne règle pas la question des tests en France – plus de tests, là où il en faut, plus rapide, mieux fait – (…) on va progressivement remplir nos réas comme à Marseille, et on reconfinera à nouveau » (voir vidéo ci-dessus). On y est.

Le 15 septembre, nouvelle audition de Jean-François Delfraissy, par la commission d’enquête cette fois. Et nouvelle mise en garde, alors qu’il était encore temps :

Il y aurait une grande difficulté, si on avait besoin de revenir à des choses difficiles, à ce que le modèle hospitalier réponde de la même façon. C’est pour ça qu’on dit : prévenons, ne nous retrouvons pas dans le même type de situation.

Le président du Conseil scientifique soutient, au sujet des tests, que « la stratégie peut être très vite dépassée », qualifiant par ailleurs le traçage de « maillon un peu faible ». 

« Le principe de responsabilité doit primer », se défend Olivier Véran

24 septembre (13.000 nouveaux cas), audition du ministre de la Santé, Olivier Véran. L’épisode marseillais, où les élus locaux ont freiné des quatre fers contre les mesures de fermeture des bars, est encore dans les têtes. La mairie de Marseille déplore un « affront » contre des mesures prises « sans concertations » visant un « territoire montré du doigt ». Retrospectivement, leur attitude pose aussi la question de leur part de responsabilité. Justement, « à un moment, le principe de responsabilité doit primer », se défend Olivier Véran devant les sénateurs, justifiant les mesures prises. Dans ce dossier, le ministre avait plaidé très tôt pour des décisions plus dures, pensant à une fermeture des bars dès 17 heures. Mais les critiques des élus locaux, non dénouées d’arrière-pensées politiques, n’ont peut-être pas poussé le pouvoir à prendre des mesures fermes assez tôt.

6 octobre, nouvelle alerte. « Si on se retrouve dans une configuration où tout le pays est touché, je ne sais pas comment on fera » s’alarme devant le Sénat, Jean-François Cibien, président de l'intersyndicale Action praticiens hôpital. « Le manque de moyens humains est énorme » se désole Cyril, aide-soignant aux urgences du Kremlin Bicêtre.

« Les réserves, on ne les a pas ! »

14 octobre. Les chiffres des contaminations montent. 13.000 nouveaux cas (on en comptera 22.000 le lendemain). Patrick Pelloux, le président de l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France, alerte à son tour les sénateurs. « On est arrivé au bout de ce qu’on peut faire », lance-t-il, rappelant que la vague est cette fois-ci nationale, et que les renforts de personnels d’une région à l’autre ne seront pas envisageables. « Les réserves, on ne les a pas ! »

Marc Leone, chef du service d'anesthésie-réanimation à l'hôpital Nord de Marseille, met aussi en garde sur la réanimation : « Si des mesures ne sont pas prises en amont, elle sera comme la ligne Maginot. Elle ne servira à rien ». Les records du nombre de cas ont été battus quatre jours de suite la semaine dernière, avec 52.000 contaminations dimanche.

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