Élus ultramarins à l’Elysée : vers un « renouveau des Outre-mer » ?

Élus ultramarins à l’Elysée : vers un « renouveau des Outre-mer » ?

Le Président de la République a reçu à l’Elysée le 7 septembre plus de cinquante élus ultramarins. Ce dîner était l’occasion d’évoquer, avec eux et quelques membres de l’exécutif dont Elisabeth Borne, certains sujets pressants dans ces territoires. Si les sénateurs des Outre-mer conviés s’y sont rendus, tous les sujets prioritaires n’ont pas été abordés, selon eux.
Public Sénat

Par Lucille Gadler et Mathilde Nutarelli

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Cinquante élus ultramarins (la Réunion, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, Mayotte, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon) ont été reçus le mercredi 7 septembre à L’Elysée par Emmanuel Macron. La réunion comptait également la présence de la Première ministre, Elisabeth Borne, du ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, et du ministre délégué chargé des Outre-mer, Jean-François Carenco.

L’objectif du dîner : exposer la vision du nouveau quinquennat sur l’avenir des Outre-mer et échanger avec les acteurs de terrain pour « trouver les voies d’une action publique efficace face aux problèmes du quotidien » des habitants des Outre-mer, d’après le communiqué de presse de l’Elysée. Cette rencontre fait partie de la « nouvelle méthode » que veut expérimenter le Président dans son second quinquennat.

Une situation préoccupante en Outre-mer

Ce dîner arrive à point nommé, alors que la situation dans les Outre-mer est loin d’être facile. En effet, lors du premier tour de la présidentielle, Marine Le Pen était arrivée largement en tête dans la majorité de ces territoires. Beaucoup d’élus de l’opposition avaient interprété ce résultat comme un vote de sanction à l’égard de la politique gouvernementale dans les Outre-mer. Le sénateur RDPI de Mayotte, Thani Mohamed Soilihi salue une initiative « attendue », « surtout depuis les résultats à la présidentielle et aux législatives », ajoute-t-il.

Les Outre-mer sont depuis plusieurs années le théâtre de mouvements sociaux et contestataires forts. En automne dernier, la crise sanitaire avait servi de détonateur à la profonde crise sociale qui traverse ces territoires depuis plusieurs années.

Plus structurellement, les Outre-mer accusent un taux de pauvreté bien plus intense qu’en France Métropolitaine. Les prix sont en moyenne plus chers qu’en métropole, et les services publics plus dégradés.

Ce dîner présidentiel est une amorce de réponse aux signataires de l’Appel de Fort-de-France. En mai dernier, plusieurs élus locaux de collectivités d’Outre-mer avaient signé cet appel, mené par le président de la collectivité territoriale de Martinique Serge Letchimy, invitant le Président à les rencontrer afin de discuter de la nécessité d’un changement de politique profond concernant le territoire ultramarin.

A l’époque, le rattachement du portefeuille des Outre-mer au ministère de l’Intérieur avait suscité de vives critiques. Victoire Jasmin, sénatrice socialiste de la Guadeloupe, avait déploré l’absence d’un ministère de plein exercice.

Un dîner « utile »

La sénatrice Victoire Jasmin, vice-présidente de la délégation sénatoriale aux Outre-mer, salue un dîner « utile, car c’est toujours bien de se rencontrer pour discuter », « mais je n’ai pas appris grand-chose », nuance-t-elle. Sur la forme, « cela ressemble au grand débat », décrit Thani Mohamed Soilihi. En effet, à l’époque, le Président avait reçu les élus ultramarins dans des conditions similaires, pour évoquer la situation de leurs territoires. « Ne pas y aller aurait été une grave erreur », souligne Victoire Jasmin, car « nos populations sont très insatisfaites de la manière dont les politiques fonctionnent ».

« La population nous méprise »

Sur le fond, les sujets abordés ont concerné la sécurité, l’immigration clandestine et les aspects économiques. Si les thématiques étaient déterminées à l’avance, « chacun pouvait proposer ses sujets », explique le sénateur de Mayotte. Si Thani Mohamed Soilihi se dit « satisfait sur la forme et le fond », il souhaite que soit mis sur la table le sujet de l’exécution du budget. « Depuis des années, le budget des Outre-mer est sous-exécuté et sous-consommé », explique-t-il. « Cela crée de la frustration parmi les administrés, un sentiment d’une parole qui n’a pas été respectée ». Il ajoute qu’il souhaiterait voir appliquer dans ces territoires le Code pénal des mineurs, adopté en 2021, auquel il a « activement participé ».

Victoire Jasmin, quant à elle, déplore « un décalage entre les orientations et les décisions politiques et les préoccupations prioritaires des habitants des Outre-mer ». Ainsi, elle aurait aimé parler davantage des problèmes liés à la fiscalité, aux prix, au chômage et à la pauvreté, « des sujets qui intéressent nos concitoyens », précise-t-elle. Elle ajoute : « la population nous méprise à cause de ce décalage ».

Ce dîner, voulu comme le début d’un « renouveau des Outre-mer » par l’exécutif, n’est que la première entrevue. Il est en effet prévu, à l’issue de cette rencontre, que la Première ministre organise un comité interministériel des Outre-mer d’ici six mois. Peut-être sera-t-il l’occasion d’approfondir les sujets chers aux élus et aux populations ultramarins.

Dans la même thématique

Élus ultramarins à l’Elysée : vers un « renouveau des Outre-mer » ?
6min

Politique

Agences de l’état : Laurent Marcangeli ne veut pas fixer d’objectif chiffré pour éviter la « formation d’anticorps »

Auditionné par la commission d’enquête du Sénat sur les agences de l’Etat, Laurent Marcangeli est revenu sur la méthode du gouvernement pour « simplifier » l’écosystème des agences et opérateurs de l’Etat. Les plans ministériels devraient être finalisés à la mi-juin et ce travail pourrait donner lieu à un projet de loi, voire une proposition de loi, a annoncé le ministre de la Fonction publique.

Le

Élus ultramarins à l’Elysée : vers un « renouveau des Outre-mer » ?
7min

Politique

Présidence des LR : Laurent Wauquiez cible le « en même temps » de Bruno Retailleau

A 10 jours de l’élection du président des Républicains, Laurent Wauquiez laboure les terres de la droite pour aller chercher une victoire face au favori, Bruno Retailleau. Ce mercredi, dans un restaurant du XVe arrondissement de Paris, le chef de file des députés de droite a présenté sa candidature « de rupture » avec le pouvoir en place. Membre du gouvernement, l’élection de Bruno Retailleau à la tête des LR ferait prendre le risque, selon lui, d’une dilution de la droite dans le macronisme.

Le