Emmanuel Macron : « Retirer massivement les hommes » au Sahel, « serait une erreur »

Emmanuel Macron : « Retirer massivement les hommes » au Sahel, « serait une erreur »

A l’issue du sommet du G5 Sahel de N’Djamena, Emmanuel Macron a temporisé l’ajustement du dispositif de la force Barkhane. Il a promis « une action renforcée » pour « décapiter » les organisations terroristes de la région, et insiste sur la nécessité du retour de l’Etat dans les territoires délaissés de la région.
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Par Public Sénat avec l'AFP

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Devant le Sénat, la semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian promettait un sommet de N’Djamena comme celui du « sursaut diplomatique, du sursaut politique et du sursaut du développement afin de consolider les résultats des derniers mois ».

Ce mardi, après deux jours de concertation avec les pays du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), Emmanuel Macron s’est félicité de l’obtention « de véritables résultats dans la zone des trois frontières », entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Région où l’organisation Etat islamique au grand Sahara (EIGS), « a perdu son emprise et subit de nombreuses pertes », a salué le Président français lors d’une intervention en visioconférence depuis Paris.

Toutefois le chef de l’Etat a souligné que les organisations affiliées à Al-Qaida, le GSIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans) et la katiba Macina, « dont la plus haute hiérarchie continue à nourrir un agenda jihadiste », constituent toujours une menace au Sahel. Emmanuel Macron a promis « une action renforcée » pour « essayer d’aller décapiter ces organisations ».

Pour mémoire, En début d’année, cinq soldats français avaient perdu la vie en une semaine lors de missions de reconnaissance au Mali. 55 soldats sont morts depuis 2013, année de l’opération Serval lancée en soutien aux autorités maliennes contre des groupes terroristes, remplacée depuis, par la force Barkhane.

Le 19 janvier dernier, lors de ses vœux devant les forces armées, le chef de l’Etat avait confirmé « l’ajustement » des troupes françaises au Sahel rappelant que les renforts de 600 hommes décidés l’an dernier au sommet de Pau étaient « temporaires ». L’entrée en œuvre la force « Takuba » qui réunit plusieurs pays européens devait conduire à l’allègement du nombre de soldats engagés, actuellement autour de 5.100.

« Je souhaite qu’on travaille avec nos partenaires pour une évolution de notre présence »

Cet « ajustement » des troupes a été temporisé ce mardi par le président de la République. « Des évolutions sans doute significatives seront apportées à notre dispositif militaire au Sahel en temps voulu mais elles n’interviendront pas dans l’immédiat […] Il serait paradoxal d’affaiblir notre dispositif au moment où nous disposons d’un alignement politique et militaire favorable à la réalisation de nos objectifs » a-t-il fait valoir.

La semaine dernière au Sénat, lors d’un débat sur le bilan de la présence Française au Sahel, le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau avait martelé que « ni le retrait, ni le statu quo », n’était des solutions et des stratégies. « Cela nous mènerait à l’embourbement »

Emmanuel Macron a également salué la décision du président tchadien Idriss Déby Itno d’envoyer 1.200 soldats dans cette zone des « trois frontières ». C’est « une décision forte et courageuse qui viendra conforter la force du G5 Sahel », a-t-il commenté.

L’allégement des troupes françaises sera conditionné à la mise en œuvre opérationnelle de la force « Takuba » qui réunit plusieurs pays européens. « La mobilisation internationale en faveur du Sahel n’a au fond, jamais été aussi puissante », a fait valoir le chef de l’Etat en remerciant les pays européens « qui acceptent ainsi de mutualiser le risque du sacrifice ultime que prennent nos soldats ».

« Retirer massivement les hommes, qui est un schéma que j’ai étudié, serait une erreur » […] « dans la durée et au-delà de l’été, je souhaite qu’on travaille avec nos partenaires pour une évolution de notre présence » a-t-il ajouté.

Réinvestir les territoires délaissés de la région

Au-delà du volet militaire, le président français a insisté sur la nécessité de « donner une perspective aux populations du Sahel », en appelant à un « deuxième sursaut : celui du retour de la sécurité et des services aux populations » et en réclamant « une impulsion au plus niveau de l’Etat » pour réinvestir les territoires délaissés de la région.

Un point sur lequel avait insisté Jean-Yves Le Drian devant la Haute assemblée citant deux piliers prioritaires pour sortir victorieux de cette crise : « la reconquête par les Etats de leur propre territoire et le développement ».

Une réponse au président LR de la commission de la Défense et des forces armées du Sénat, Christian Cambon pour qui « le dénouement de cette crise ne sera certainement pas militaire ». « La solution ne peut être que politique et ne pourra être que du ressort des Maliens eux-mêmes », avait-il rappelé en évoquant la nécessité de « la réconciliation nationale » des forces maliennes et le « caractère crucial du développement économique ».

 

« On ne lâchera pas sur l’aide au développement » indique Christian Cambon

Contacté par publicsenat.fr, Christian Cambon confirme. « On ne lâchera pas sur l’aide au développement. Si nous n’aidons pas la population à se nourrir, à s’éduquer, ce sera le tonneau des Danaïdes. On pourra toujours renforcer la présence militaire avec des milliers d’hommes supplémentaires, ça ne changera rien. Le travail extraordinaire de nos militaires doit trouver son pendant dans l’amélioration des conditions de vie de la population. A ce moment-là, la France ne sera plus considérée comme une armée d’occupation » appuie le sénateur. Christian Cambon attend l’examen prochainement au Sénat de la loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales pour « aider le Mali à développer ses actions ».

En effet, en dépit des succès tactiques revendiqués, le tableau demeure très sombre au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Plus de huit ans après le début de la crise, quasiment pas un jour ne passe sans une attaque armée, l’explosion d’une mine artisanale ou des exactions contre les civils. La barre des deux millions de déplacés a été franchie en janvier.

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