Entre Macron et les patrons, le désamour guette

Entre Macron et les patrons, le désamour guette

"On lui fait encore confiance mais attention, cela ne va pas durer": 15 mois après avoir été séduits par l'arrivée au pouvoir d...
Public Sénat

Par Loïc VENNIN, Boris CAMBRELENG

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

"On lui fait encore confiance mais attention, cela ne va pas durer": 15 mois après avoir été séduits par l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron, un président jugé pro-"business", les patrons français se mettent aujourd'hui à douter.

"Il faut reconnaître que tout n'a pas été noir. Des réformes qui n'avaient pas été faites en 30 ans ont été effectuées en un an": l'opinion de Jacques Letort, chef d'entreprise dans le bâtiment, est largement partagée à Jouy-en-Josas (banlieue sud-ouest de Paris), qui accueillait mardi et mercredi la 20e université d'été du Medef.

Il y a 15 mois, les chefs d'entreprise avaient applaudi l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron, un ancien banquier d'affaires au profil pro-entreprises qui promettait de "transformer la France" et de ranimer une croissance jusqu'alors atone.

"Les décisions prises vont dans le bon sens: assouplir un peu les règles et défiscaliser les heures supplémentaires", résume Michel Fétiveau, directeur pour la France de la division après-vente de l'équipementier automobile allemand ZF.

Une opinion largement partagée chez les entrepreneurs. Dans un sondage réalisé en juillet par OpinionWay, 65% des dirigeants sondés estiment que le gouvernement a maintenu le rythme des réformes, malgré de multiples contestations.

- garder le cap -

Après avoir applaudi à la "flat tax", qui instaure un prélèvement au taux unique de 30% sur tous les revenus du capital, Eric Pinon, qui préside de l'Association française de gestion financière, attend désormais la loi Pacte sur le financement des entreprises, l'intéressement et la participation des salariés.

Le gouvernement veut "aider le système à être plus attirant pour l'investissement sur le long terme. Oui, ça va dans le bon sens. Est-ce que ça avance assez vite? Non."

Quinze mois après le triomphe d'Emmanuel Macron dans les urnes, les patrons commencent à montrer des signes d'impatience.

Le gouvernement a "redonné confiance aux entrepreneurs", a reconnu mardi le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux, mais "cette confiance retrouvée reste fragile".

"Nous préférons les preuves d'amour aux déclarations d'amour", a souligné le patron des patrons, qui voit dans un report de neuf mois d'une baisse de charges annoncé lundi un "très mauvais signal".

"Ce n'est pas une bonne décision que d'avoir différé ce qui allait permettre de réduire le coût du travail", juge aussi M. Fétiveau, qui comme nombre d'autres dirigeants interrogés, n'a pas pour l'heure "d'inquiétude sur un changement de cap".

- "des actes" -

Face aux chefs d'entreprise, le Premier ministre Edouard Philippe a assuré mardi "mettre en œuvre les choses sérieusement, au regard de la croissance dont nous disposons". Cette dernière s'essouffle en effet, à seulement 1,7% cette année selon l'Insee, au lieu des 2% espérés par le gouvernement.

L'excuse est trop belle, estiment nombre d'entrepreneurs. Philippe Marty, patron d'une entreprise de conseils, juge ainsi que le gouvernement "ne prend pas du tout le chemin" de la réduction de la dépense publique, qui devrait passer par une cure d'amaigrissement de la fonction publique, où il voit encore "trop de gras".

"Macron a dit qu'il voulait délivrer les entreprises. C'est bien mais j'attends des actes. Les chefs d'entreprise lui font encore confiance mais attention, cela ne va pas durer", met en garde M. Marty.

"Si on commence à faire du zigzag, on va mettre tout le monde dans le doute", craint Stéphane Rostaing, président du Medef de l'Ain et patron d'une PME de confection de gants de sécurité.

Philippe Amram, dirigeant d'une entreprise de stratégie, juge que "la tâche sera très difficile. Mais on a envie d'aider Macron. On a envie qu'il réussisse parce que, sinon, c'est quoi le coup d'après?"

Dans la même thématique

SIPA_01112686_000045
4min

Politique

Pourquoi commémore-t-on l’abolition de l’esclavage le 10 mai en Métropole ?

Depuis 2006, le 10 mai est la date de la journée nationale officielle de commémoration des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions. Une cérémonie à laquelle participe le président de la République ou le Premier ministre. Dans les territoires d’Outre-mer, les commémorations ont lieu à d’autres dates. Explications.

Le

Entre Macron et les patrons, le désamour guette
6min

Politique

Agences de l’état : Laurent Marcangeli ne veut pas fixer d’objectif chiffré pour éviter la « formation d’anticorps »

Auditionné par la commission d’enquête du Sénat sur les agences de l’Etat, Laurent Marcangeli est revenu sur la méthode du gouvernement pour « simplifier » l’écosystème des agences et opérateurs de l’Etat. Les plans ministériels devraient être finalisés à la mi-juin et ce travail pourrait donner lieu à un projet de loi, voire une proposition de loi, a annoncé le ministre de la Fonction publique.

Le

Entre Macron et les patrons, le désamour guette
7min

Politique

Présidence des LR : Laurent Wauquiez cible le « en même temps » de Bruno Retailleau

A 10 jours de l’élection du président des Républicains, Laurent Wauquiez laboure les terres de la droite pour aller chercher une victoire face au favori, Bruno Retailleau. Ce mercredi, dans un restaurant du XVe arrondissement de Paris, le chef de file des députés de droite a présenté sa candidature « de rupture » avec le pouvoir en place. Membre du gouvernement, l’élection de Bruno Retailleau à la tête des LR ferait prendre le risque, selon lui, d’une dilution de la droite dans le macronisme.

Le