La polémique sur les super bassines et la gestion de l’eau pose, en filigrane, la question d’un modèle agricole de décroissance avec une gestion millimétrée des ressources. Invité ce vendredi de « Bonjour chez vous », la matinale de Public Sénat, l’Académicien Erik Orsenna, qui a beaucoup travaillé sur la question de l’eau et préside notamment l’association Initiatives pour l’avenir des grands fleuves, a tenu à alerter sur les excès d’une vision décliniste. « Comment peut-on dire que l’on va produire moins alors qu’il y a quasiment 1 milliard de personnes qui ne mangent pas à leur faim ? Ça n’est pas possible. Comment peut-on dire que l’on va produire moins, alors que nous devons récupérer une sorte de souveraineté alimentaire ? », s’est agacé l’écrivain, auteur notamment de L’avenir de l’eau (Prix Joseph Kessel en 2009) et de La Terre à soif (2022)
« Est-ce que c’est avec la décroissance que l’on va trouver de nouveaux médicaments ? De nouvelles façons de produire de l’énergie ? », interroge encore celui qui occupe à l’Académie française le fauteuil de Louis Pasteur. « Supprimer l’eau à l’agriculture c’est supprimer la vie », rappelle Erik Orsenna, qui reconnaît qu’il n’est pas non plus question « de continuer l’agriculture comme avant », ni de « prélever de l’eau comme avant ».
« Quelle autre activité humaine et française s’est autant réformée que l’agriculture ? »
« Notre balance commerciale est complètement effondrée. Nos exportations agricoles nous rapportent plus que les airbus ! Il ne faut pas se foutre du monde », s’agace notre invité, qui dénonce les critiques récurrentes subies par les agriculteurs. « Quand on attaque les agriculteurs alors que le budget des ménages réservé à la consommation est passé de 30 à 10 %, quel mépris ! »
« Évidemment, on doit aider les agriculteurs à accélérer la transition, mais quelle autre activité humaine et française s’est autant réformée que l’agriculture ? On leur a dit : Produisez ! Produisez ! Produisez ! Et maintenant on leur dit : Respectez ! Respectez ! Respectez ! », poursuit Erik Orsenna. « On donne des leçons aux agriculteurs, mais qui sont les plus pauvres parmi les Français ? Les agriculteurs. Ou trouve-t-on le plus de menaces, d’inquiétudes, de suicides ? Chez les agriculteurs », relève encore l’écrivain.