États-Unis : « La main-d’œuvre composée par les personnes en situation irrégulière est indispensable au pays »
Le nouveau président des États-Unis l’affirme : l’immigration est une force pour son pays. Alors que Donald Trump n’a cessé de tenir un discours des plus durs contre les clandestins, Joe Biden promet de faciliter la naturalisation de millions de personnes déjà installées aux États-Unis. La politique migratoire américaine est-elle réellement différente selon que le pays est gouverné par les Républicains ou par les Démocrates ? Quelle est la réalité derrière le discours électoral ? Les États-Unis sont-ils encore une terre d’immigration ? Jérôme Chapuis et ses invités ouvrent le débat, pour Un Monde en Docs, sur Public Sénat.

États-Unis : « La main-d’œuvre composée par les personnes en situation irrégulière est indispensable au pays »

Le nouveau président des États-Unis l’affirme : l’immigration est une force pour son pays. Alors que Donald Trump n’a cessé de tenir un discours des plus durs contre les clandestins, Joe Biden promet de faciliter la naturalisation de millions de personnes déjà installées aux États-Unis. La politique migratoire américaine est-elle réellement différente selon que le pays est gouverné par les Républicains ou par les Démocrates ? Quelle est la réalité derrière le discours électoral ? Les États-Unis sont-ils encore une terre d’immigration ? Jérôme Chapuis et ses invités ouvrent le débat, pour Un Monde en Docs, sur Public Sénat.
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Par Flora Mansiet

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Un système « qui accueille les immigrants et garde les familles unies » c’est ce que promet Joe Biden en matière de politique migratoire. À peine élu, le nouveau président des États-Unis prend le contrepied de son prédécesseur qui faisait des migrants les responsables de tous les maux du pays. Deux discours qui cachent une réalité bien plus complexe.

Les Etats-Unis, terre d’immigration

« Les cas d’immigrés expulsés vers un pays où ils n’ont aucune attache sont très fréquents et ne datent pas du mandat de Donald Trump, explique Paul Schor, historien et maître de conférences à l’université de Paris. On estime que 10 à 15 % des 328 millions d’Américains sont nés à l’étranger. Il s’agit à peu près de la même proportion qu’en 1900 au moment de la révolution industrielle ».

On pense que 20 % de la population mexicaine vit de façon plus ou moins permanente aux États-Unis

Parmi eux, ceux que l’on a appelés les « dreamers ». Ces jeunes adultes arrivés aux États-Unis alors qu’ils étaient enfants. « On a vu un certain nombre de cas de personnes qui découvrent même qu’elles n’ont pas la nationalité américaine une fois qu’elles cherchent à s’inscrire à l’université » insiste Paul Schor.

Particulièrement visée par les attaques du président Donald Trump, l’immigration mexicaine représente une part très importante de l’immigration du pays : « on pense que 20 % de la population mexicaine vit de façon plus ou moins permanente aux Etats-Unis », indique l’historien.

Une main-d’œuvre indispensable à l’économie américaine

La complexité de la question migratoire aux États-Unis repose, selon Matthieu Mabin, journaliste et correspondant dans le pays pour France 24, sur un paradoxe : « la main-d’œuvre que représentent les millions de personnes en situation irrégulière est en réalité absolument indispensable à l’économie des États-Unis. En Californie et en Floride, de très nombreuses agglomérations sont majoritairement composées d’immigrés illégaux ». Plus de 10 millions de personnes seraient sans-papiers sur tout le territoire américain et, selon Paul Schor, des secteurs entiers de l’économie, comme celui de l’agriculture, dépendent entièrement du travail à bas coûts de cette main-d’œuvre irrégulière.

Indispensable à l’économie du pays, l’immigration irrégulière, et principalement mexicaine, l’est aussi à l’armée américaine : « Des milliers de Mexicains ont été appelés par les recruteurs américains et ont servi au cours des guerres du Vietnam puis, plus récemment, en Irak et au Moyen Orient. Et ce dans l’espoir d’une régularisation » commente le journaliste. « Et si dans les années 1960 les soldats étaient récompensés par l’obtention de la nationalité américaine, ce n’est plus cas aujourd’hui » renchérit Paul Schor.

L’hypocrisie du débat migratoire

Une réalité qui semble donc bien éloignée des discours officiels : « Les différents positionnements sur les questions d’immigration, c’est le jeu normal de la bataille électorale, explique Matthieu Mabin. En réalité par exemple, Barack Obama fait partie des présidents qui ont le plus expulsé. Et les discours anti-immigration de Donald Trump ? Il n’échappe à aucun président que la main-d’œuvre composée par les personnes en situation irrégulière est indispensable au pays ».

Barack Obama fait partie des présidents qui ont le plus expulsé

Pour les deux spécialistes, il est donc essentiel de comprendre le fossé qui existe entre le discours et la réalité de la politique migratoire aux États-Unis. Le mur de Trump pour en finir avec l’immigration ? Un vaste jeu de rôle répond le journaliste : « La grande majorité des immigrés en situation irrégulière aux États-Unis est une immigration voulue. Il s’agit avant tout de Mexicains dont les visas sont arrivés à expiration ». Une immigration choisie, à des fins économiques, et non un flux de migrants non contrôlé à la frontière.

Et l’arrivée de Biden ? « Ce qui va changer avec l’arrivée des Démocrates au pouvoir c’est l’aspect humain et humanitaire », explique Paul Schor. Comme Barack Obama, le nouveau président démocrate devrait lui aussi avoir recours à un certain nombre d’expulsions mais on ne devrait pas assister au déchirement des familles. De plus, le seuil du nombre de demandeurs d’asile devrait être relevé.

 

Retrouvez en replay le documentaire On the line. Les expulsés de l’Amérique ainsi que le débat avec nos invités

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