Financement du RSA : Dominique Bussereau n’exclut pas « une rupture des relations » entre l’État et les départements

Financement du RSA : Dominique Bussereau n’exclut pas « une rupture des relations » entre l’État et les départements

Ce jeudi, à l’occasion d’une table ronde organisée au Sénat, les représentants des collectivités territoriales ont exprimé de sévères critiques sur le plan de relance, notamment en ce qui concerne la baisse des impôts de production et le financement du RSA. Renaud Muselier a lui dénoncé « un confinement autoritaire et généralisé ».
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Placer les collectivités au cœur du plan de relance. C’est le souhait de François Baroin (président de l’Association des maires de France), Dominique Bussereau (président des Départements de France) et Renaud Muselier (président de Régions de France) et Sébastien Martin, président de l’ADCF (association des communautés de France). Les trois premiers forment « Territoires Unis », une entité qui rassemble depuis 2 ans les différents échelons territoriaux.

Pour les différents orateurs, la crise sanitaire a mis en évidence, une fois de plus, la nécessité d’une nouvelle gouvernance territoriale marquée par plus de déconcentration et de décentralisation. Dans cette optique, la future loi « 3D » (décentralisation, différenciation et déconcentration) annoncée pour le début d’année 2021 suscite de nombreuses attentes. « À cette loi 3D ou 4D (comme dévolution du pouvoir réglementaire), il manque un C. Si on veut que ça marche, il faut le C de la confiance » a prévenu Sébastien Martin qui prône « une vraie instance de dialogue entre l’État et les collectivités territoriales ».

D’autant que Dominique Bussereau l’a bien relevé, pendant 3 mois (du premier confinement), on s’est aperçu que sans les collectivités, l’organisation de l’État au niveau territorial « n’était pas capable de régler tous les aspects d’une crise de cette nature ».

« Un confinement autoritaire et généralisé »

Le président des Régions de France a eu des mots très durs sur la gestion de la crise par l’État. « J’ai une vision très désagréable de la gestion de cette crise par le ministère de la Santé. Ce sont eux qui ont organisé les pénuries, les manques […] On ne peut jamais organiser une crise quand on a organisé une pénurie. On ment. On triche. On raconte des salades ». Renaud Muselier n’a pas épargné non plus le conseil scientifique « qui s’exprime à tort et à travers […] pour expliquer qu’on va mourir demain […] Vous n’avez jamais de message d’espoir ou de perspective ». De même, le président de la région Sud dénonce « un confinement autoritaire et généralisé ». « Il faut organiser des démarches avec les territoires de façon claire, transparente et précise. Je ferai des propositions en tant que président des régions de France la semaine prochaine » a-t-il annoncé.

« De notre point de vue, toutes les leçons du premier confinement n’ont pas été tirées » […] « On a un problème de définition de la concertation (au sujet du confinement et du couvre-feu). « Une concertation ça ne peut pas être un coup de fil une heure avant une décision prise par l’État sans mesurer l’impact local que ça peut avoir » a confirmé François Baroin.

« Une grave crise des relations entre les départements et l’État »

Et alors que le quatrième projet de loi de finances rectificative vient d’être voté au Sénat, les rapports sont loin d’être apaisés entre l’État et les collectivités. Elles concernent l’engagement de l’État de porter de 115 à 200 millions d’euros sa contribution au fonds de stabilisation des départements qui font face à une augmentation des dépenses en période de crise notamment pour le RSA. « Nous avons une inquiétude très grande qui pourrait entraîner une rupture de nos relations avec l’État […] Bercy par une manœuvre invraisemblable a enlevé ces 115 millions […] Jacqueline Gourault (ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales) partage nos inquiétudes. Si l’arbitrage du Premier ministre est positif, l’incident sera clos. Si l’arbitrage du Premier ministre n’est pas positif, nous entrerons dans une grave crise des relations entre les départements et l’État. Puisque celui-ci aura manqué à sa parole » a prévenu le président de l’ADF.

La baisse des impôts de production « fait fondre comme beurre au soleil » l’autofinancement des communes

Du côté de l’AMF, on s’inquiète également de voir les communes passer à côté de la relance. À l’instar de la Commission européenne qui a épinglé, mercredi, l’impact des mesures de relance sur les finances publiques en France, visant notamment la baisse des impôts de production des entreprises, François Baroin a dénoncé une « faute politique et économique ». Ajoutée à la suppression de la taxe d’habitation, la baisse des impôts de production compensée par des dotations de l’État « fait fondre comme beurre au soleil » l’autofinancement des communes, selon lui. « C’est une renationalisation à l’opposé du projet loi 3D » a-t-il déploré. Selon les chiffres de l’AMF, la baisse des impôts de production entraînera une perte de 3,3 milliards d’euros pour les communes, soit 1,75 sur la taxe foncière sur les propriétés bâties et 1,54 milliard sur la cotisation foncière des entreprises (CFE), mais le gouvernement assure qu’elle sera compensée pour les communes et les intercommunalités.

« Il y a beaucoup de structures, notamment inter-communales qui ne pourront pas être, dès l’année prochaine […] au rendez-vous de la relance avec des investissements publics » a mis en garde François Baroin. Le rapporteur général du budget au Sénat, Jean-François Husson est sur la même ligne et a indiqué que le Sénat demandera à l’État par voie d’amendements, de « garantir de la manière la plus solide les compensations au bénéfice des collectivités ».

 

 

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