« Vous pouvez essayer d’arrêter le messager mais vous n’arrêterez pas le message. » Par ces mots, Laurent Richard met en garde ceux dont le dessein est de porter atteinte la liberté de la presse en s’attaquant aux journalistes.
L’histoire de Forbidden Stories a commencé à l’université du Michigan, « qui propose aux journalistes de venir développer une idée ». Laurent Richard a cherché « comment contrer la censure grâce au journalisme collaboratif ». De là est née une plateforme qui permet un « travail collaboratif entre confrères » afin de « continuer le travail des journalistes qui ont été emprisonnés ou assassinés » pour avoir tenté d’informer. « En Inde, des journalistes ont été brûlés vifs parce qu’ils enquêtaient sur l’extraction minière », s’indigne-t-il.
« Offrir une réponse globale à des problèmes globaux »
Au-delà de « rendre hommage aux journalistes » qui ont payé de leur personne pour avoir exercé leur métier, il s’agit « d’offrir une réponse globale à des problèmes globaux » : « Il n’y a plus d’histoire locale : l’histoire du journaliste au Mexique qui enquête sur un cartel de drogue nous concerne car ce cartel vend de la cocaïne dans 56 pays dans le monde, dont la France et les États-Unis ».
Laurent Richard confie avoir lui aussi subi des pressions mais prévient que « ça ne fait plus aucun sens avec Forbidden Stories car l’information est décentralisée et stockée un peu partout » grâce à des « moyens sécurisés et chiffrés, des technologies open source, gratuites, qui permettent de ne pas se voir traqué par des services de surveillance ».
« En France, on ne peut pas censurer la presse »
Le journaliste a fait de la défense de la liberté de la presse son cheval de bataille. D’autant qu’une plainte avait été déposée contre lui et Élise Lucet pour avoir qualifié l’Azerbaïdjan de « dictature ». Une plainte finalement jugée irrecevable. Le rédacteur en chef de Premières lignes, qui produit notamment Cash Investigation, se dit « rassuré » par cette décision, qu’il estime être « extrêmement juste » : « Ce procès a été l’occasion d’expliquer qu’en France on ne peut pas censurer la presse. »
La polémique autour de la Une de Charlie Hebdo sur Edwy Plenel, qui oppose Mediapart au journal satirique, a également heurté le fondateur de Forbidden Stories, qui fut l’un des premiers sur place après le massacre du 7 janvier 2015. « Je suis triste que deux médias aussi beaux et indépendants se déchirent publiquement sur ce sujet », confie Laurent Richard. Il dit « avoir du mal à comprendre » cette Une, ce qui ne l’empêche pas d’ « être extrêmement Charlie ». Et de conclure : « Une seule chose compte par-dessus tout, c’est la sécurité de Charlie Hebdo. »