« Pas de majorité qualifiée pour la réautorisation du glyphosate dans un vote aujourd'hui (jeudi) », a indiqué la ministre luxembourgeoise Carole Dieschbourg sur Twitter, un résultat dont s'est aussi fait écho le ministre belge de l'Agriculture Denis Ducarme.
Comme le 25 octobre dernier, la majorité qualifiée n’a pas été atteinte, (6 États sur 28, représentant 65 % de la population de l’UE). Et même si la Commission européenne a revu sa copie en proposant un renouvellement de l'autorisation de la substance pour cinq ans au lieu de dix ans, toujours pas de consensus en vue. Une majorité de pays (14) se sont prononcés en faveur de la proposition, mais cela ne permet pas d'atteindre la pondération démographique (65% de la population). La Belgique a maintenu sa position et demande l’élimination progressive du glyphosate et l’aide de l'Union Européenne au développement d'alternatives pour l'agriculture. La France avait annoncé sa volonté de voter contre. « On a franchi une étape, on était parti pour réautoriser dix ans, la France tient bon sur trois ans » s’est félicité, le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot. « En réalité, maintenant, chacun a intégré qu’il va falloir qu’on commence très sérieusement à programmer la sortie de la plupart des pesticides » a-t-il déclaré peu avant les questions d'actualité, au Sénat.
Glyphosate : Hulot souhaite maintenant « programmer la sortie de la plupart des pesticides »
Plus que quelques semaines avant l’expiration de la licence actuelle du glyphosate fixé au 15 décembre et l’exécutif européen est toujours au point mort. Un comité d'appel va être organisé dans les prochains jours. En cas de nouveau blocage, la décision devrait revenir alors à la Commission. Mais le commissaire à la Santé Vytenis Andriukaitis a rejeté à plusieurs reprises l'idée d'assumer seul la responsabilité d'une telle décision, assurant qu'elle devait être « partagée » avec les États membres.
« On arrive à 15 ans. Ça n’a pas de sens »
Pour l’ancienne ministre de l’Environnement de Jacques Chirac, Corinne Lepage, interrogée par publicsenat.fr, « la Commission ne peut pas prendre de décision sans les États membres ». « Ce que peut faire la Commission, c’est prendre un règlement d’exécution pour prolonger le dossier d’instruction » explique l’avocate. En effet, Corinne Lepage rappelle que la première autorisation formelle au niveau européen du glyphosate date de 2002 et n’était valable pour une durée de 10 ans. Depuis la date butoir a été prolongée à plusieurs reprises, pour arriver à la fin de cette année. « On arrive à 15 ans. Ça n’a pas de sens » conteste-elle.
Pour José Bové « Ça veut dire que la France n’est pas isolée sur ce dossier »
Interrogé par publicsenat.fr, le député européen Vert, José Bové voit dans cette absence d’accord entre États membres « une bonne nouvelle ». « Ça veut dire que la France n’est pas isolée sur ce dossier. La question de fond qu’il faut se poser c’est : est-ce qu’on parle d’un renouvellement avec, à terme, la fin du glyphosate ? Ou un renouvellement qui pourrait en amener d’autres ?
Pour mémoire, le 24 octobre dernier, le Parlement européen avait adopté une résolution (non contraignante) en faveur d'une élimination progressive du glyphosate dans l'UE d'ici la fin 2022.
Le débat scientifique est vif autour de la dangerosité du glyphosate. Classifié en 2015 comme « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer, un organe de l'OMS, deux autres études, réalisées par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques, sont arrivées à la conclusion inverse.