Google : le géant mis à l’amende par la Commission européenne

Google : le géant mis à l’amende par la Commission européenne

La Commission européenne vient d’infliger une amende record de 2,42 milliards d’euros au géant d’Internet Google pour abus de position dominante. Il y a deux ans, plusieurs sénateurs avaient, en vain, déposé un amendement au projet de loi Macron, visant à empêcher ces pratiques anticoncurrentielles.
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2,42 milliards d’euros, c’est  l’amende la plus importante jamais prononcée par la Commission européenne. C’est aussi l’aboutissement d’une enquête de 7 ans. En 2010, le service du géant américain ne s’appelle pas encore Google Shopping mais « Froogle » et commence à inquiéter ses concurrents, comme l’américain Tripadvisor ou les comparateurs de prix Français Twenga et Kelkoo qui déposent plainte à Bruxelles. « Google a simplement mis en avant son propre comparateur de prix, qui n’était a priori pas soumis à son algorithme général comme les autres sites. Ils ont alors proposé aux sites marchands de s’y inscrire rapidement…avant de le faire payer deux ans plus tard, face à son succès » rapporte à Challenges Nicolas Jornet, le directeur général de Kelkoo France. Résultat des comptes, les comparateurs de prix concurrents n’apparaissent plus sur Google qu’à la troisième ou quatrième page de recherche.

Google « a empêché les autres sociétés de livrer concurrence sur la base de leurs mérites »

« Ce que Google a fait est illégal au regard des règles de concurrence de l'UE. Elle a empêché les autres sociétés de livrer concurrence sur la base de leurs mérites, et d'innover » a estimé, ce mardi, la commissaire européenne à la Concurrence Margrethe Vestager. Elle précise également que « l'amende a été calculée sur la base de la valeur des recettes que Google réalise grâce à son service de comparaison de prix dans 13 pays européens où Google Shopping  est déployé ».

Aux reproches de la Commission européenne, Google s’est régulièrement défendu en affirmant que « Google shopping » était surtout un service d’annonces publicitaires. Les consommateurs, quand ils voulaient faire des achats, selon lui, passaient principalement par le service de vente en ligne de l'américain Amazon, qui représente, toujours selon Google, la moitié des recherches d'achat sur le marché européen.

Mais Bruxelles ne s’arrête pas à cette amende et somme l’entreprise américaine de mettre fin à ces pratiques jugées anticoncurrentielles dans les 90 jours, « sans quoi elle sera soumise à des astreintes pouvant atteindre 5% du chiffre d'affaires moyen réalisé quotidiennement au niveau mondial par Alphabet, la société mère de Google ». En 2016, Google a réalisé 80,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires et 17,8 milliards d’euros de profits.

« Emmanuel Macron considérait que ce problème devait se régler au niveau européen »

En France, le sujet de l’encadrement des moteurs de recherche, intéresse particulièrement des sénateurs en premiers rangs desquelles Catherine Morin-Desailly. En 2015, lors de l’examen de la loi Macron au Sénat, la présidente UDI de la commission de la culture du Sénat avait déposé un amendement visant à empêcher les pratiques « anticoncurrentielles » de Google. (voir notre article) Cet amendement a été supprimé par les députés sur recommandation du ministre de l’Économie de l’époque, Emmanuel Macron, qui « craignait  une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre ». « Emmanuel Macron considérait que ce problème devait se régler au niveau européen. Je ne lui donnais pas tort sur le fond mais je souhaitais qu’on prenne au plus vite des mesures conservatoires afin de protéger les acteurs du numérique français et européens » se souvient la sénatrice. Pour Catherine Morin-Desailly la sanction infligée à Google « est un avertissement puissant  mais ne règle pas le problème de manière structurelle ». « Pendant longtemps, nous n’avons pas vu qu’il s’agissait d’un enjeu politique et de souveraineté » insiste la sénatrice qui milite pour la création d’un commissaire du numérique auprès du Premier ministre. « J’ai même demandé à l’ancien secrétaire d’État en charge de la réforme de l’État et de la simplification, Jean-Vincent Placé, à ce qu’on utilise le moteur de recherche français « Qwant » dans les administrations » ajoute-elle.

« Une prise de conscience » de la Commission selon Jean-Claude Lenoir

Le président LR de la commission  des affaires économiques du Sénat, Jean-Claude Lenoir, qui avait cosigné en 2015 l’amendement de  Catherine Morin-Desailly a également réagi : « Cette décision démontre que les potentialités du droit de la concurrence pour réguler les géants de l’Internet doivent être mobilisées, et que la Commission européenne en a pris conscience ». Jean-Claude Lenoir tient également à rappeler que « le Parlement a voté un article de la loi pour une République numérique visant à imposer aux plateformes de délivrer aux consommateurs une information loyale, claire et transparente, notamment sur les modalités de référencement et de classement des contenus ». Le décret d’application sera publié incessamment. 

Suite à l’annonce  de la sanction, Google a immédiatement fait part «  de son désaccord » et envisage de faire appel de cette décision.

 

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