Incertitudes sur les Européennes : « Jusqu’au bout, tout peut changer »

Incertitudes sur les Européennes : « Jusqu’au bout, tout peut changer »

A quatre jours des élections européennes, l’indécision est de mise. Selon les sondages, seul un peu plus du tiers des électeurs d’EELV et plus de la moitié de ceux de LFI et de LR sont sûrs de leur choix pour le scrutin. Du côté de LREM et du RN, trois électeurs sur quatre sont en revanche certains du bulletin qu’ils glisseront dans l’urne.
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C’est toujours dans la dernière ligne droite d’une élection que les intentions de vote se cristallisent. Mais pour le scrutin européen de ce dimanche, ceux qui hésitent semblent plus nombreux qu’habituellement. Chaque élection connaît sa part d’électeurs incertains, mais avec des européennes qui suscitent peu d’intérêt, l’indécis à la cote !

« Dans la politique récente, ce flou assez inédit, même s’il rappelle quand même la présidentielle de 2017, où il y avait une incertitude jusqu’au bout sur les deux premiers et sur la place de troisième. Donc c’est aussi dans la lignée de 2017 » selon Jean-Philippe Dubrelle, directeur adjoint des études politiques de l’institut de sondage Ifop (voir aussi le sujet vidéo d'Alizé Boissin).

« Le jeu reste ouvert notamment pour l’électorat écologiste »

Cette incertitude « est plus vraie pour les listes de gauche, surtout la liste PS-Place publique, et celle d’EELV. A droite, on la trouve avec la liste LR de François-Xavier Bellamy. C’est moins fort pour l’électorat RN et LREM, dont l’électorat est plutôt solide » précise Jean-Daniel Levy, directeur du département politique & opinion d'Harris Interactive.

« Les électeurs du RN ont toujours été très certains de leur choix et ça ne se dément pas. Ceux de LREM, un peu derrière, sont aussi très sûrs » confirme Jean-Philippe Dubrelle, « mais à part eux, le jeu reste ouvert et notamment pour l’électorat écologiste. EELV, qui fait souvent de très bons scores aux européennes, souffre aussi par son caractère attrape-tout, du fait que son électorat est très volatil. Environ un électeur sur deux qui dit aller voter EELV, n’est pas sûr de son choix et peut aller voter LREM ou à gauche ».

Incertitude constatée par exemple dans ce sondage Ipsos du 5 mai dernier pour France Télévisions et Radio France, où 55% des sondés disaient être sûrs de leur choix, dont seulement 26% pour les électeurs EELV, contre 75% pour ceux du RN.

Constat similaire dans ce sondage Kantar One point pour La Croix, du 14 mai dernier : 36% des électeurs d’EELV se disaient certains de leur vote, 55% pour La France insoumise, 55% pour LR, 72% pour LREM et 76% pour le RN.

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Comment expliquer cette situation ? L’absence « de personnalités très fortes qui arrivent à polariser l’attention » selon Jean-Daniel Levy. Jean-Philippe Dubrelle y ajoute « l’éclatement de la gauche » et « une dispersion de l’offre électorale assez inédite, avec 34 listes en course. Et le débat sur des propositions européennes n’a pas vraiment eu lieu ». « Il n’y a pas de thème central de campagne, pas d’affrontement véritable » confirme Jean-Daniel Levy.

« C’est à gauche qu’il peut se passer le plus de choses »

Ces électeurs indécis font en partie, avec la mobilisation des abstentionnites, l’élection. De quoi éclairer la stratégie électorale des partis. Ces dernières semaines, LREM et plus précisément Emmanuel Macron a remis une dose d’écologie dans ses déclarations. Ce n’est certainement pas un hasard si le Conseil de défense écologique, annoncé par le Président fin avril, se réunit pour la première fois autour du chef de l’Etat ce jeudi, soit trois jours avant le scrutin…

Quant au flou à gauche, il est aussi la conséquence de sa division. « Les listes écologistes sont nombreuses. Et l’hésitation est plus grande, comme à gauche. C’est là qu’il peut se passer le plus de choses. Il peut y avoir une petite logique de vote utile pour ceux qui peuvent passer la barre des 5% » note Emmanuel Rivière, directeur général de la division public de Kantar. D’où l’argument développé ces derniers jours par la tête de liste PCF, Ian Brossat, qui rappelle qu’atteindre les 5% leur donnerait 4 députés européens, gonflant ainsi le total de députés de gauche en raison du mode de scrutin proportionnel (lire notre article sur le sujet).

Comme l’explique Jean-Daniel Levy (Harris Interactive), les choses peuvent logiquement se jouer dans la dernière ligne droite : « Chez EELV, souvent, l’électorat se décide à la toute dernière minute. Et il y a une marche pour le climat vendredi… » Ce que confirme Jean-Philippe Dubrelle de l’Ifop :

« 20% des gens qui se rendent aux urnes disent qu’ils se sont décidés au cours du week-end, c’est-à-dire entre le samedi et dans l’isoloir, au moment de rentrer le bulletin dans l’enveloppe. Donc jusqu’au bout, tout peut changer. Ici, la volatilité est très élevée ».

« La première incertitude au final, c’est la décision d’aller ou pas »

Mais Emmanuel Rivière (Kantar) tempère le constat d’une forte incertitude, fait par ses confrères. « Elle est un peu plus élevée que pour d’autres élections mais cela n’a rien d’inhabituel. La première incertitude au final, c’est la décision d’aller ou de ne pas aller voter. C’est sur quoi beaucoup de partis ont misé pour leur campagne : il faut d’abord mobiliser son camp » souligne Emmanuel Rivière, alors que l’abstention est estimée à près de 60%. De ce point de vue, il semble que ce soient LREM et le RN qui aient fait la meilleure campagne. Confirmation – ou pas – dimanche soir.

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