Invités à débattre du budget 2025 sur Parlement hebdo, le rapporteur LR de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson, et le député PS Arthur Delaporte, s’opposent sur le sujet. « Il faudra bien faire des efforts », défend le sénateur LR, quand le socialiste dénonce « un effort incommensurable ».
Islam de France : « Vivre à la fois sa francité et son islamité »
Par Public Sénat
Publié le
Il y a quelques semaines, Emmanuel Macron a annoncé vouloir repenser l’organisation de l’islam en France. Et si Mohamed Bajrafil, imam, théologien et linguiste, ne fait pas partie des spécialistes que le Président consulte actuellement, l’auteur du livre « Réveillons-nous ! Lettre à un jeune Français musulman » (éditions Plein Jour), a beaucoup à dire.
Sur la remise en cause de la formation actuelle des imams, dont certains auraient une mauvaise influence, Mohamed Bajrafil prévient : « C’est mettre le curseur, là où il ne faut pas » : « Ceux qui ont basculé, parmi les jeunes Français de confession musulmane, (…) dans des mouvements terroristes, la plupart d’entre eux, pour ne pas dire tous, ne fréquentaient pas des mosquées qui ont pignon sur rue (…) Tout discours qui contrevient à la loi, et bien qu’il soit sanctionné. Mais parler des imams comme étant (…) les cerveaux qui seraient derrière, je pense que ce n’est pas faire preuve de responsabilité que de lancer des choses comme ça, de manière péremptoire » assure-t-il.
Concernant les financements des lieux de culte et des salaires des imams, la préconisation d’Emmanuel Macron de réduire l’influence des pays arabes, est une bonne chose pour l’imam d’Ivry-sur-Seine, à condition d’y mettre le prix : « L’islam de France est un islam qui est traversé de part en part par des courants, aux origines et aux idéologies différentes. Donc pointer du doigt la question de l’ingérence étrangère, pour moi c’est quelque chose de louable. Mais encore faut-il se donner les moyens de le faire. C'est-à-dire que si on parle d’un islam de France, il faut veiller à ce qu’il y ait des institutions en France, qui, par exemple, forment des imams, partant de la culture française, partant de la langue française, (…) partant des réalités qui sont celles de ce pays. Alors (…) qu’on est, à l’heure où je vous parle, davantage en relation avec des pays étrangers, dans lesquels (…) on fait former des imams. »
Interrogé sur la pertinence de désigner un « grand imam de France », sur le modèle du grand rabbin de France, Mohamed Bajrafil est plus que sceptique et considère que ça fait partie des « fausses bonnes idées » : « Le propre de l’Islam est d’être une religion sans clergé. Donc personnellement, je suis rétif à toute structure pyramidale (…) La plupart des musulmans français n’ont que faire de ces institutions. C’est se tromper encore une fois de problème, que de chercher à donner vie à une structure dont on sait pertinemment qu’elle ne sera pas opérante demain. »
Au fond, pour lui, la question est plus de savoir si l’interventionnisme de l’exécutif dans l’organisation d’une religion est conforme à la laïcité : « Ne pas oublier que nous sommes dans un pays laïc » rappelle l’imam. « Qu’est-ce que la laïcité ? Qu’est-ce qui est constitutionnellement faisable ? Est-ce que ce n’est pas anticonstitutionnel que de s’immiscer dans les affaires d’une religion pour dire comment les choses doivent être gérer ? »
« C’est dans l’éducation que le combat doit se mener »
Et il ajoute : « Je pense que c’est plutôt dans l’éducation que le combat doit se mener (…) Dépassionner les débats. Que les musulmans comprennent que leurs concitoyens, qui ne sont pas musulmans de confession, puissent s’interroger sur l’islam est quelque chose de normal, étant donner qu’il y a des gens qui tuent au nom de cette religion. Mais de l’autre côté aussi, que les Français de confession autre que musulmane, comprennent que les musulmans en ont marre qu’on cherche à définir un « homo-musulmanus » (…) Il n’y a pas « un » musulman, pas plus qu’il y a « un » juif » ou « un » non-croyant » ou « un » chrétien. Il y a des juifs, des musulmans… qui vivent leur foi en fonction des réalités de chacun. »
Dans son second livre, « Réveillons-nous ! Lettre à un jeune Français musulman », Mohamed Bajrafil s’adresse, cette fois tout particulièrement, aux jeunes musulmans, à qui il propose « une sorte de feuille de route qui permette à la personne de vivre à la fois sa francité et son islamité ». « Les deux n’étant pas incompatibles et antinomiques » rappelle l’imam.
Vous pouvez re(voir) l’entretien de Mohamed Bajrafil, en intégralité :