Justice : débats tendus au Sénat sur le secret professionnel des avocats
Le Sénat a adopté l’article 3 du projet de loi pour la confiance dans la justice. Au terme de débats animés, l’hémicycle en est finalement resté à la position de la commission des lois sur l’extension du secret professionnel à l’activité de conseil des avocats. Ce dernier ne sera pas opposable en matière de fraude fiscale ou de corruption.
Il a été annoncé comme l’un des points à surveiller lors des débats au Sénat. L’article 3 du projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire a effectivement donné lieu à de longs débats juridiques et passionnés, dans la nuit du 28 au 29 septembre. Et c’est finalement le choix de la commission des lois qui a été retenu. Les rapporteurs Agnès Canayer (LR) et Philippe Bonnecarrère (Union centriste) sont revenus sur la rédaction de l’Assemblée nationale sur l’extension du secret professionnel de l’avocat, en matière pénale, à leur activité de conseil. Ils lui ont apporté une limite : ce secret étendu aux activités de conseil ne sera pas opposable « en matière de fraude fiscale, de corruption et de trafic d’influence, ainsi que de blanchiment de ces délits ».
La position adoptée en commission a fait bondir plusieurs membres de la majorité sénatoriale de droite et du centre, qui se sont fait le relais des inquiétudes vives des avocats. Jean-Baptiste Blanc (LR), soutenu par une vingtaine de ses collègues, s’est insurgé contre un « texte totalement inacceptable » qui mettait à mal « l’indivisibilité » du secret professionnel. « Il y a 70 000 avocats qui sont vent debout ce soir. Il faut entendre cette colère. Nous touchons là au secret professionnel, qui est cœur de ce métier », a-t-il mis en garde. « Je vous propose à travers cet amendement, si on veut rétablir une confiance dans la justice, de la rétablir envers ses avocats. » « Ne prenez pas les avocats pour des complices de la malversation », a ajouté son collègue LR Gérard Longuet. Selon le résultat du scrutin public demandé par le groupe Union centriste, 161 sénateurs ont rejetél’amendement de Jean-Baptiste Blanc, contre 59 qui l’ont soutenu.
Le rapporteur rappelle à ses détracteurs que les débats sont aussi suivis par les magistrats et les ONG
« Le texte issu de la commission des lois n’est pas un texte qui réduit le secret professionnel des avocats, c’est un texte qui l’étend, certes, pas de manière illimitée », a voulu tempérer le rapporteur Philippe Bonnecarrère. Et de mettre en garde : « Si vous donnez une extension illimitée, vous ne permettez pas à notre société de lutter correctement contre la corruption ou la fraude fiscale ». Ce sénateur, lui-même avocat, a rappelé que le sujet n’intéressait pas seulement cette profession. « Dans notre société, il y a des enquêteurs, des juges d’instruction, des associations, qui ont une action contre la pauvreté, dans la lutte contre la corruption. Nos travaux sont aussi regardés de ce côté-là. »
Le président de la commission des lois, François-Noël Buffet, a dû prendre la parole, face à la mise en cause du travail de sa commission. « J’ai lu dans la presse que le président du Conseil national des barreaux pensait que les sénateurs l’avaient poignardé dans le dos. J’aurais préféré qu’il décroche son téléphone et qu’il m’appelle. Il l’a fait, mais après sa déclaration est venue. »
Éric Dupond-Moretti avait, pour sa part, demandé un avis de sagesse sur l’amendement de rétablissement de la version de l’Assemblée nationale. Une position neutre, entre l’avis défavorable et l’avis favorable. Il a surtout formulé le souhait que « dans le cadre de la navette [parlementaire], on puisse trouver le meilleur des compromis ».
Les sénateurs veulent donner plus de temps aux enquêteurs pour « le noyau dur de la délinquance financière »
Plus tôt, les sénateurs ont adopté l’article 2 du projet de loi. Ce dernier limite à deux années (qui peuvent être portées à trois) la durée des enquêtes préliminaires, qui n’en avaient pas jusqu’ici. Dans la même logique que l’article 3, la commission des lois a aligné les affaires de fraude fiscale, corruption et le blanchiment de capitaux sur le même régime que les délits en bande organisée ou le terrorisme : trois ans maximum d’enquête préliminaire, avec la possibilité de prolonger de deux années supplémentaires. Pour le rapporteur Philippe Bonnecarrère, il s’agit du « noyau dur de la délinquance financière ».
Le garde des Sceaux s’est opposé à ces dérogations, sauf pour les cas de corruption internationale. « Si l’on fait une succession d’exceptions, alors la règle est obsolète. Il faut limiter les exceptions », a-t-il appelé. A l’issue du délai prévu pour l’enquête préliminaire, « ça n’est pas l’impunité », a expliqué le ministre. C’est le début d’une phase d’instruction avec l’ouverture d’une information judiciaire.
Philippe Bonnecarrère a opposé que les affaires étaient « complexes ». Impossible de mener les enquêtes en deux ans, sur une matière financière et économique qui nécessite des actes à l’étranger, et des enquêteurs spécialisés dont la France manque. Or, le risque est, selon lui, de se retrouver à la fin avec des classements sans suite, de remettre des dossiers « ni faits, ni à faire » devant l’instruction, déjà débordée.
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