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Justice: un parlementaire peut bien être poursuivi pour détournements de fonds publics
Par Public Sénat
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La cour d'appel de Paris a jugé lundi qu'un parlementaire pouvait bien être poursuivi pour détournements de fonds publics, rejetant ainsi les arguments de cinq sénateurs de l'ex-UMP, qui veulent poursuivre le débat devant la Cour de cassation, a-t-on appris mardi de source proche du dossier.
La chambre de l'instruction était saisie d'une question cruciale pour d'autres dossiers, dont l'affaire Fillon. Les parlementaires sont-ils des personnes "dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public", seules susceptibles d'être poursuivies pour ce grave délit, passible de 10 ans de prison et un million d'euros d'amende?
Les magistrats ont répondu par l'affirmative lundi, première étape d'un débat qui devrait se poursuivre jusque devant la Cour de cassation. Dans son arrêt, la cour d'appel reconnaît aux parlementaires la qualité de personnes chargées d'une mission de service public dans la mesure où ils exercent "par essence une mission d'intérêt général", selon la source proche du dossier.
"Il s'agit d'une décision plus politique que juridique dans laquelle la chambre de l'instruction a mis de côté de grands principes comme l'application stricte de la loi pénale pour incriminer des personnes qui ne sont pas concernées par un texte", ont réagi Antoine Beauquier et Loïc Epaillard, avocats des sénateurs.
Le débat s'est invité dans l'enquête menée depuis 2012 sur des compléments de revenus versés à des sénateurs de l'UMP (devenue LR) grâce à un système présumé de détournements des enveloppes d'assistants parlementaires.
Cinq sénateurs avaient demandé l'annulation de leur mise en examen pour détournements de fonds publics et/ou recel de délit. Parmi eux, Jean-Claude Carle (LR), ancien trésorier du groupe UMP et l'ancien élu Henri de Raincourt, qui l'avait présidé.
Dans leurs arguments, les avocats des sénateurs excluaient les parlementaires de la liste des personnes visées par ce délit, comme l'avait fait avant eux la défense de François Fillon au début de l'affaire sur les emplois de sa femme à l'Assemblée qui lui vaut d'être poursuivi pour cette infraction.
La loi doit "s'appliquer au plus grand nombre", souligne la cour d'appel. "Il ne résulte pas de la lettre de la loi que le législateur ait entendu dispenser les parlementaires (...) du devoir de probité", écrivent les magistrats.
La cour d'appel s'appuie sur les travaux parlementaires ayant abouti au nouveau code pénal de 1992 et montrant "la volonté de retenir une conception large des personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public".
Elle juge aussi que l'autonomie parlementaire mise en avant par les avocats "ne constitue pas un principe d'impunité".
Sur le fond, l'enquête porte sur l'utilisation de l'enveloppe mensuelle de 7.600 euros dévolue à l'embauche d'assistants. Les enquêteurs s'interrogent sur la pratique qui jusqu'en 2014 consistait pour les sénateurs à récupérer pour leur compte une partie des crédits non utilisés qu'ils avaient cédés au groupe UMP.
Les sénateurs soutenaient que le groupe, depuis 1989, avait le libre usage de ces crédits transférés. Pour la cour d'appel, ils devaient au contraire "faire l'objet d'un usage déterminé".
Théoriquement, l'enquête, à l'arrêt depuis le 14 juin en raison de ces recours, devrait pouvoir reprendre mais cette hypothèse risque d'être compromise avec le pourvoi en cassation des sénateurs.