L’Assemblée adopte un texte LREM controversé sur les ex-enfants placés
Ils ont été des enfants placés mais peuvent devenir SDF le jour de leurs 18 ans. L'Assemblée nationale a adopté mardi une...

L’Assemblée adopte un texte LREM controversé sur les ex-enfants placés

Ils ont été des enfants placés mais peuvent devenir SDF le jour de leurs 18 ans. L'Assemblée nationale a adopté mardi une...
Public Sénat

Par Ludovic LUPPINO

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Ils ont été des enfants placés mais peuvent devenir SDF le jour de leurs 18 ans. L'Assemblée nationale a adopté mardi une proposition de loi LREM pour renforcer l'accompagnement de ces "jeunes majeurs vulnérables" vers l'autonomie, toutefois très critiquée par les oppositions.

Plus d'un sans-abri sur quatre (26%) nés en France est un ancien enfant passé par les services de l'Aide sociale à l'enfance (ASE), soit plus de 10.000 personnes, selon le dernier rapport annuel de la fondation Abbé Pierre, publié en février.

L'objectif de la majorité est de faire en sorte "que la protection de l'enfance devienne un véritable tremplin vers l'autonomie et non plus ce +sécateur à rêves+ auquel elle s'assimile trop souvent", a affirmé la rapporteure Brigitte Bourguignon, présidente de la commission des Affaires sociales, au démarrage lundi du texte.

Alors qu'il est "urgent d'agir" selon cette ex-socialiste du Pas-de-Calais, figure de l'aile gauche du groupe LREM, il a fallu pourtant patienter près de dix mois, depuis son adoption en commission en juillet dernier, pour que la proposition de loi, paraphée par plus d'une centaine de députés, atterrisse dans l'hémicycle.

Le nouveau secrétaire d’État à la Protection de l'enfance depuis fin janvier, l'ex-député Adrien Taquet, "a voulu la muscler, et non pas la freiner", a assuré à l'AFP son entourage.

Ce "marcheur" de la première heure a présenté le texte comme "une avancée considérable" pour mettre fin à "un gâchis humain, social et économique".

Celui-ci a été approuvé en première lecture par 42 voix contre 6 et 1 abstention mais son dispositif central a particulièrement alimenté les critiques.

Dans sa version initiale, il était question de rendre obligatoire en cas de cumul de difficultés, les "contrats jeunes majeurs" qui permettent une prise en charge par les départements de ces jeunes jusqu'à leur vingt-et-unième anniversaire et ainsi d'éviter des "sorties sèches" à leur majorité.

341.000 mineurs font l'objet d'une mesure de protection de l'enfance en France (fin 2017), dont plus de la moitié sont placés en institution ou dans des familles d'accueil.

Et un tiers seulement des jeunes sortant de l'ASE - environ 20.900 personnes - se voit proposer chaque année un "contrat jeune majeur", selon une estimation du Conseil économique, social et environnemental (CESE) dans un rapport de juin 2018.

Certains conseils départementaux ne le proposent pas alors que d'autres n'offrent un accompagnement que pour six mois ou prolongent au contraire la prise en charge jusqu'à 25 ans.

- "Trous dans la raquette" -

Pour préciser les contours de cette obligation et "mieux s'adapter aux besoins", gouvernement et rapporteure ont fait voter une réécriture de l'article en instaurant des "contrats d'accès à l'autonomie", accessibles à ces jeunes "s'ils en font la demande" et sous condition. Cela ne fait pas disparaître pour autant du champ de la loi les "contrat jeunes majeurs", a précisé Mme Bourguignon.

Mais pour prétendre au "contrat d'accès à l'autonomie", le jeune doit avoir été pris en charge par les services de l'ASE "pendant au moins 18 mois cumulés dans les 24 mois précédant l'atteinte de (sa) majorité", un critère qui a fait bondir les élus de gauche.

"Pourquoi pose-t-on une condition à la générosité?", s'est insurgé l'Insoumis François Ruffin en pointant "le risque d'avoir des trous dans la raquette".

Ce critère exclut notamment des mineurs placés tardivement ou les mineurs non accompagnés étrangers, selon l'ensemble de la gauche.

Comme plusieurs associations, Elsa Faucillon (PCF) a accusé le gouvernement de "vider le texte de sa substance" et dénoncé un amendement gouvernemental "déposé à la dernière minute".

"Quelle plus-value apporte cette réécriture si ce n'est plus de zone d'ombres que de clarifications?", a renchéri Gisèle Biémouret (PS).

A droite, Stéphane Viry (LR) a émis des réserves sur le financement du dispositif. Alors que le gouvernement veut porter de 12 à 60 millions d'euros le budget annuel alloué à l'accompagnement des jeunes majeurs sortant de l'ASE, l'élu des Vosges considère que "le compte n'y est pas".

Partager cet article

Dans la même thématique

Photo Cazeneuve
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015, le récit de Bernard Cazeneuve : « Très vite, on a conscience que nous sommes confrontés à une attaque de grande ampleur »

ENTRETIEN - Dix ans après les attentats de Paris et de Seine-Saint-Denis, qui ont coûté la vie à 130 personnes, l'ancien ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, revient auprès de Public Sénat sur cette nuit de terreur, et la gestion de crise aux côtés du Président de la République et du Premier ministre.

Le

L’Assemblée adopte un texte LREM controversé sur les ex-enfants placés
3min

Politique

« Il n’y a aucune délinquance dans les écoles de musique », affirme le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus

Il est sans conteste le maestro français le plus célèbre de sa génération. A 92 ans, Jean-Claude Casadesus continue de remplir les plus belles salles du monde sans jamais renier son attachement à la région du Nord. Lui qui a créé puis dirigé l’orchestre national de Lille, s’est engagé toute sa vie pour rendre la musique classique accessible à tous. Invitée de Rebecca Fitoussi dans Un monde, Un regard, Il revient sur son immense carrière marquée par la passion et le partage.

Le

Paris: Senate pension debat
6min

Politique

Retraites : la gauche du Sénat désunie sur la suspension de la réforme

A partir du 19 novembre, le Sénat examinera en séance publique le projet de loi de financement de la Sécurité sociale et sa mesure phare : la suspension de la réforme des retraites. Une concession du gouvernement faite au PS qui n’a aucune chance d’être adoptée à la haute assemblée à majorité de droite. Les socialistes ne devraient également ne pas être suivis par les communistes et écologistes sur le vote de cette mesure.

Le

Photo horizontale Hollande
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015 : « Je vois des victimes qui sortent du Bataclan, le regard hagard… », se remémore François Hollande

ENTRETIEN – Dix ans après les attentats du 13 novembre 2015, l'ancien président de la République revient auprès de Public Sénat sur le déroulé des attaques terroristes de Seine-Saint-Denis et de Paris. Il détaille la gestion de la crise et les décisions prises cette nuit-là, mais analyse aussi l'évolution du pays face à cette épreuve.

Le