L’intolérance a très nettement reculé en France en 2016

L’intolérance a très nettement reculé en France en 2016

Christine Lazerges, présidente de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), a présenté, ce jeudi, son rapport annuel. Il met en lumière une baisse significative du nombre d’actes racistes, antisémites et xénophobes en France, au cours de l’année 2016.
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Par Pierre de Boissieu

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Le rapport sur la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie, présenté mercredi 29 mars au Premier ministre, Bernard Cazeneuve, et ce jeudi à la presse, montre que l’indice longitudinal de tolérance (1) a marqué une progression importante : + 10 points depuis 2013 (2).

Le rapport s’étonne d’un « constat pour le moins étonnant », soulignant un « contexte d’apparence peu propice à l’acceptation de l’autre », avec le terrorisme, la crise migratoire, le chômage et le poids des thèmes sécuritaires dans les médias.

Beaucoup moins d’actes antisémites mais des préjugés encore tenaces

Par rapport à l’année 2015, les actes antisémites ont reculé de 58,5 %, un total de 335 actes antisémites ayant été enregistré en 2016, contre 808 en 2015. Le rapport explique que « les juifs sont, depuis le début des années 2000, l’une des minorités les mieux considérées en France. »

Il montre cependant la persistance de vieux préjugés antisémites, liant les juifs à l’argent, au pouvoir, leur reprochant un communautarisme et un attachement à Israël.

Une baisse de 57,7 % des actes antimusulmans

Les actes antimusulmans ont enregistré, quant à eux, une baisse de 57,6 % en 2016, par rapport à 2015 : 182 actes, contre 429 actes. Selon le rapport, l’année 2016 aurait vu une normalisation, avec un retour au niveau d’avant la vague d’attentats de 2015, à l’exception du mois de juillet 2016, du fait des attentats de Nice et de Saint-Etienne du Rouvray.

Ces résultats doivent cependant être pondérés, le rapport faisant état d’un sentiment de censure sociale plus marqué qu’auparavant. « L’islam est un sujet éminemment clivant et perçu comme un tabou » avance-t-il. Le rapport évoque un écart significatif entre les sondages en face à face et en ligne.

Les Roms mieux considérés

La tolérance à l’égard des Roms a progressé à un rythme plus élevé que les autres minorités, même s’ils sont confrontés au plus grand rejet de la part du reste de la population.

Le racisme anti-Roms est cependant de loin le plus violent. Il comporte quelques fois des références au racisme biologique, avec une assimilation des populations roms à un groupe inférieur, allant parfois jusqu’au « déni de leur humanité ».

Le discours des élites, principale cause de l’intolérance

La première cause d’intolérance serait, selon le rapport présenté par Christine Lazerges, « la manière dont les élites politiques, médiatiques et sociales parlent de l’immigration et de la diversité » : les événements compteraient donc moins, en définitive, que leur traitement par les « élites ».

En outre, « les attaques terroristes ne produisent pas automatiquement une aggravation du rejet de l’autre ». « Il y a même eu une hausse de la tolérance après 2001 » avance le rapport. En revanche, on constate une hausse importante de actes racistes, antisémites et xénophobes entre 2004 et 2005, en lien notamment avec les émeutes en banlieue.

Les autres raisons d’actes racistes sont le niveau d’ethnocentrisme, c’est-à-dire une vision autoritaire et hiérarchique de la société, une sensibilité politique déclarée, la façon dont est vécue la crise économique ou encore les « expériences de socialisation liées à des pratiques transnationales », telles que des périodes d’études et de travail à l’étranger.




(1) L’indice longitudinal de tolérance a été créé en 2008 par Vincent Tiberj, professeur des universités associé au Centre Emile Durkheim de Sciences Po Bordeaux. L’enquête 2016 a été menée en janvier et l’enquête 2016 en octobre.


(2) L’enquête sur l’état de l’opinion commandée par la CNCDH depuis 1990 a été réalisée cette année du 17 au 24 octobre 2016 par l’institut de sondage IPSOS.

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