L’ouverture de l’assurance chômage aux démissionnaires sera très encadrée
Dans Le Parisien, la ministre du Travail a présenté ce vendredi les mesures retenues dans la réforme de l’assurance chômage, après six semaines de négociations entre les partenaires sociaux. Le droit aux allocations-chômage sera étendu aux démissionnaires, mais sous des conditions restrictives : seulement 30.000 personnes pourraient en bénéficier.

L’ouverture de l’assurance chômage aux démissionnaires sera très encadrée

Dans Le Parisien, la ministre du Travail a présenté ce vendredi les mesures retenues dans la réforme de l’assurance chômage, après six semaines de négociations entre les partenaires sociaux. Le droit aux allocations-chômage sera étendu aux démissionnaires, mais sous des conditions restrictives : seulement 30.000 personnes pourraient en bénéficier.
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On en sait un peu plus sur la réforme de l’assurance chômage, l’un des trois volets qui composeront le projet de loi présenté en Conseil des ministres à la mi-avril, avec celui de l’apprentissage (relire notre article) et celui de la formation professionnelle (dévoilé lundi). Le texte pourrait être baptisé « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ».

En ajoutant à ces trois chantiers les ordonnances « réformant le dialogue social », adoptées à l’été 2017, la ministre du Travail évoque dans le Parisien ce vendredi les « quatre piliers de la flexisécurité française » (une notion qui combine flexibilité du marché du travail et sécurité des actifs).

Muriel Pénicaud, qui annonce que le texte ne fera pas, cette fois, l’objet d’ordonnances, affirme que le gouvernement est « en phase avec le texte de l’accord », conclu le 22 février entre syndicats et patronat, après six semaines de discussions. Plusieurs syndicats conditionnent néanmoins leur signature aux arbitrages du gouvernement. La CFDT attend notamment de l’exécutif qu’il respecte « l’équilibre du texte ».

Les démissionnaires couverts par l’assurance chômage (sous conditions)

Parmi la création de « nouveaux droits» : l’extension aux démissionnaires des allocations-chômage. Ce droit existe déjà dans une quinzaine de situations précises : c’est notamment le cas des salariés qui quittent leur entreprise, pour suivre leur conjoint(e) qui a été muté(e).

L’élargissement de ce droit à tous les salariés était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, accueillie avec de sérieuses réserves de la part des partenaires sociaux, qui craignaient une dégradation des comptes de l’Unedic, l’organisme qui gère l’assurance chômage. Les syndicats ont obtenu gain de cause : ces démissionnaires auront la même durée d’indemnisation que les autres, à savoir deux ans (trois dans le cas des séniors). La ministre n’a cependant rien indiqué sur le montant de celle-ci.

Les conditions d’éligibilité seront strictes. Le gouvernement veut limiter la possibilité d’user ce droit une fois tous les cinq ans. Et le salarié devra présenter obligatoirement un projet professionnel qui devra être « vérifié » au préalable par une instance. Libération ajoute que le projet du salarié devra même répondre « aux besoins du marché ».

Selon la ministre, qui insiste sur la nécessité de « bien informer » les salariés en amont, entre 20.000 et 30.000 personnes pourraient être concernées chaque année.

De leur côté, les partenaires sociaux ont proposé de conditionner le droit à une ancienneté dans l’emploi de sept années.

Ce point majeur de la réforme, selon le calcul des syndicats, impliquerait un surcoût de 180 millions d’euros pour l’Unedic. Avec l’abaissement à 5 ans du gouvernement, « quelques dizaines de millions d’euros supplémentaires » s’ajouteraient, estime Muriel Pénicaud. « Sur un budget global de 33 milliards d’euros, ça ne change pas la dimension du sujet. »

Les indépendants indemnisés sous un régime différent

Autre promesse présidentielle à traduire dans la réforme : l’indemnisation chômage des indépendants qui cesseraient leur activité. Le projet du gouvernement prévoit le versement de 800 euros, pendant six mois, pour les indépendants en liquidation judiciaire et qui avaient un bénéfice annuel « autour de 10.000 euros ». « C’est un signal fort que nous envoyons à tous ceux qui ont le courage et l’envie de se lancer », selon la ministre citée par Le Parisien. Notons qu’en 2016, le montant de l’allocation-chômage moyenne atteignait 1.010 euros nets.

En revanche, l’Unedic, dont les comptes devraient retrouver l’équilibre l’an prochain, ne devrait pas intervenir dans le financement de la mesure. Selon la ministre, le nouveau droit sera financé par les recettes de la CSG.

Limiter le recours aux contrats courts

La lutte contre les contrats courts (CDD, intérim), qui représentent 90% des recrutements selon les chiffres du gouvernement, est renvoyée aux branches professionnelles, qui négocieront chacune jusqu’en décembre pour se fixer des « objectifs quantitatifs et qualificatifs ». En cas de résultats non satisfaisants, le gouvernement menace à nouveau de dégainer son système de bonus-malus, qui n’a pas du tout les faveurs du patronat. Les modalités n’en sont pas précisées mais Muriel Pénicaud a prévenu que cette possibilité serait inscrite dans le projet de loi.

Sanctions et gouvernance : des questions reportées

Signe que ces deux sujets sont sensibles, la question du mécanisme des sanctions des chômeurs – alors que le gouvernement veut intensifier les contrôles – et de la gouvernance du système de l’assurance chômage seront abordées lors d’une discussion ultérieure en mars entre le gouvernement et les partenaires sociaux. Ces réunions devront notamment définir ce qu’est une « offre raisonnable d’emploi ».

Les réflexions autour de la gestion du système de l’assurance chômage ne s’annoncent pas moins explosives : l’exécutif entend faire intervenir l’État dans le giron de l’Unedic, qui est jusqu’à présent géré de manière paritaire par les syndicats et le patronat.

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