LBD : les sénateurs PCF veulent interdire «une arme dangereuse» qui «remet en cause le droit de manifester»
Alors que l’utilisation des lanceurs de balles de défense ne cesse de faire polémique depuis le début du mouvement des gilets jaunes, le groupe communiste du Sénat va défendre une proposition de loi pour interdire l’usage de ces armes dans le maintien de l’ordre.

LBD : les sénateurs PCF veulent interdire «une arme dangereuse» qui «remet en cause le droit de manifester»

Alors que l’utilisation des lanceurs de balles de défense ne cesse de faire polémique depuis le début du mouvement des gilets jaunes, le groupe communiste du Sénat va défendre une proposition de loi pour interdire l’usage de ces armes dans le maintien de l’ordre.
Public Sénat

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Sujet de polémiques depuis le début du mouvement des gilets jaunes, l’utilisation des lanceurs de balles de défenses (LBD) est à nouveau mise en cause après la blessure à l’œil samedi 26 janvier de l’une des figures du mouvement, Jérôme Rodrigues. Il affirme avoir été victime d’un tir de LBD 40, qui ont remplacé les célèbres Flashballs dans l’arsenal policier. Le ministère de l’Intérieur, qui a saisi l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), dément le recours à cette arme et parle plutôt de l'utilisation d'une grenade de désencerclement.

Cet événement intervient au moment où le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a décidé d'équiper pour la première fois de caméras-piétons les policiers équipés de LBD.

Toujours samedi, en marge d’un rassemblement de gilets jaunes, c’est un adolescent de 15 ans qui aurait été blessé au visage par un tir de LBD. Selon une source proche des secours, citée par l’AFP, « la blessure serait due à un tir de (LBD). C'est assez grave, c'est toute la mâchoire qui est atteinte ». « C'était un passant et pas un manifestant » précise la même source.

« Le gouvernement est très mal à l’aise sur ce qui s’est passé avec Jérôme Rodrigues »

Face à ces atteintes physiques répétées, les sénateurs du groupe CRCE (à majorité communiste) ont déposé la semaine dernière une proposition de loi (PPL) afin d’interdire l’usage des lanceurs de balles de défenses dans le cadre du maintien de l’ordre. Ou plutôt redéposé. Ils l’avaient déjà fait en 2015. « Joues déchiquetées, yeux tuméfiés, crevés, chairs lacérées... » Dès les premiers mots de l’exposé des motifs, la PPL donne le ton.

« Depuis le début de la mobilisation des gilets jaunes, une dénombre une centaine de blessés graves, parmi lesquels 71 liés à des tirs de lanceurs de balles de défense (LBD) » souligne à publicsenat.fr Eliane Assassi, présidente du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste. « C’est une arme dangereuse qui peut provoquer des dégâts physiques souvent irréversibles, notamment à l’œil » ajoute la sénatrice de Seine-Saint-Denis, qui pense que « le gouvernement est très mal à l’aise sur ce qui s’est passé avec Jérôme Rodrigues ».

Pour une « plus grande transparence », la PPL veut également rendre « le fichier de traitement relatif au suivi de l’usage des armes (TSUA), créé en 2012, accessible au public ». Le texte propose enfin au gouvernement de remettre au Parlement un rapport « sur les avantages et les inconvénients de chaque type de doctrine au niveau européen et sur les alternatives à mettre en œuvre ».

« Le Défenseur des droits avait recommandé d’interdire l’usage des LBD »

Dans sa dénonciation des LBD, la sénatrice PCF trouve l’appui bienvenu du Défenseur des droits, Jacques Toubon. « Il s’est prononcé en janvier 2018 sur la dangerosité de ces armes et avait recommandé d’interdire leur usage » rappelle Eliane Assassi. Jacques Toubon a réitéré sa demande il y a quelques jours, en demandant la suspension des LBD. La PPL souligne que « le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, avait lui-même, l'année dernière, à la suite du rapport du Défenseur des droits, recommandé l'abandon des LBD. Avant de revenir en arrière face au mouvement des gilets jaunes ».

Christophe Castaner entend pour sa part laisser ces armes dans les mains des forces de l’ordre. Mais en geste d’ouverture, il a présenté la semaine dernière l’arrivée de caméras-piétons comme « une demande qui répond à la double exigence de transparence et d'exemplarité que nous devons aux Français ».

La BAC pointée du doigt

Dans l’usage fait des LBD, Eliane Assassi pointe en particulier le rôle de la BAC, la brigade anticriminalité :

« J’ai rencontré des policiers, dont des CRS, qui sont là pour le maintien de l’ordre et sont formés pour. Mais ils regrettent que le LBD soit utilisé par d’autres forces de police, comme la BAC. Ils ne sont pas là pour maintenir l’ordre, mais pour appréhender ceux qui ont commis des actes délictueux ».

Autrement dit, ils ne seraient pas suffisamment formés pour recourir au LBD.

« Je ne suis pas anti-policiers. C’est bien qu’il y ait des unités chargées du maintien de l’ordre dans le pays » tient à souligner Eliane Assasi, « mais il y a une vraie question de société qui se pose sur la façon dont les policiers ont les moyens de maintenir l’ordre. Là, on est face à des armes dangereuses, comme le sont aussi les grenades de désencerclement ».

Pour la présidente de groupe, le recours à ces armes met in fine à mal le droit garanti par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « Il y a des milliers de gens qui soutiennent les gilets jaunes mais qui maintenant ont peur d’aller manifester, car ils ont peur de se prendre une balle de LBD. Donc ça remet en cause le droit de manifester ». La proposition de loi sera examinée le 7 mars prochain, dans le cadre de la « niche parlementaire » du groupe CRCE. Le débat ne sera certainement pas clos d’ici là.

Partager cet article

Dans la même thématique

PARIS , LES CANDIDATS REMI FERAUD ET EMMANUEL GREGOIRE
8min

Politique

« Force du dégagisme », « fin de cycle » et « bataille de chiens » à venir : les socialistes font le bilan, après la victoire d’Emmanuel Grégoire face à Rémi Féraud

La victoire d’Emmanuel Grégoire, dès le premier tour, lors de la primaire PS qui l’opposait au sénateur Rémi Féraud s’explique notamment par « la volonté de tourner la page Hidalgo » chez les militants, mais aussi le poids des rapports de force issus du congrès PS ou la « dérive clanique » autour de la maire sortante.

Le

SIPA_01206229_000010
6min

Politique

Programmation de l’énergie : en commission, les sénateurs ne reprennent pas le moratoire sur l’éolien et le photovoltaïque

En commission des affaires économiques, les sénateurs ont adopté la proposition de loi sénatoriale, dite Gremillet, qui avait été passablement dénaturée par des amendements des députés LR et RN, puis finalement rejetée par l’Assemblée nationale. Le moratoire sur l’éolien et le photovoltaïque ou encore la réouverture de la centrale nucléaire de Fessenheim ne figurent plus dans le texte adopté en commission pour une deuxième lecture prévue la semaine prochaine.

Le

LBD : les sénateurs PCF veulent interdire «une arme dangereuse» qui «remet en cause le droit de manifester»
3min

Politique

Loi Duplomb : un texte qui permet « de mettre les agriculteurs français au même niveau que les agriculteurs européens », assure son auteur

Ce mardi, Laurent Duplomb, sénateur LR de Haute-Loire, auteur du texte « visant à lever les contraintes sur le métier d’agriculteur », était invité sur la matinale de Public Sénat. Il a évoqué l’accord trouvé en commission mixte paritaire sur sa proposition de loi, ainsi que les critiques qu’elle suscite, notamment en ce qui concerne la réintroduction de l’acétamipride, un pesticide interdit en France depuis 2018.

Le

LBD : les sénateurs PCF veulent interdire «une arme dangereuse» qui «remet en cause le droit de manifester»
2min

Politique

Canicule : « La vigilance rouge ne concerne pas que les publics les plus fragiles, elle concerne tout le monde », déclare François Bayrou

Alors que la France fait face à un épisode caniculaire, François Bayrou, accompagné de Catherine Vautrin, Agnès Pannier-Runacher et Bruno Retailleau s’est rendu ce mardi au centre opérationnel de gestion des crises du ministère de l’Intérieur. L’objectif était de faire état de l’ensemble des mesures prises pour faire face à cette vague de chaleur.

Le