Le contrôle fiscal de Bercy sur McKinsey a-t-il été déclenché suite à la commission d’enquête sur les cabinets de conseil ?

Le contrôle fiscal de Bercy sur McKinsey a-t-il été déclenché suite à la commission d’enquête sur les cabinets de conseil ?

Le ministre de l’Economie fait comprendre que Bercy n’avait pas attendu le Sénat pour se pencher sur McKinsey, accusé de ne pas avoir payé d’impôts sur les sociétés depuis 10 ans. Or « le contrôle fiscal débute au mois de décembre », avait révélé la communiste Eliane Assassi, soit après le lancement de la commission d’enquête du Sénat.
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Les révélations de la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des cabinets de conseil privés n’en finissent plus de laisser des traces. Comme une bombe à fragmentation dans la campagne d’Emmanuel Macron, un boulet qu’il traîne et le freine. Il a fallu attendre quelques jours pour que l’effet s’en fasse réellement sentir sur la campagne. C’est surtout la révélation sur McKinsey, qui n’a pas payé d’impôts sur les sociétés depuis 10 ans, qui passe mal, alors que les ministères ont largement eu recours à ce cabinet de conseil privé américain.

Ce matin, sur Europe 1, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, s’est indigné pour expliquer que Bercy n’avait pas attendu le Sénat pour se pencher sur le cas McKinsey. « Nous avons engagé une vérification fiscale sur McKinsey avant le rapport du Sénat », soutient le ministre de l’Economie, « pas après, avant le rapport. Remettons un peu de clarté et de raison dans ce dossier ». Bruno Le Maire ajoute : « McKinsey paiera tous les impôts qu’il doit à la France, rubis sur l’ongle ».

« Des rapprochements de dates troublants »

Les propos du ministre étonnent Arnaud Bazin, sénateur LR du Val d’Oise et président de la commission d’enquête du Sénat. « Il faut surtout que le ministre produise le document daté par lequel l’administration fiscale a signifié une procédure à cette entreprise. Ce qu’il s’est bien gardé de faire », constate Arnaud Bazin auprès de publicsenat.fr. Il rappelle que « le rapport du Sénat était présenté le 17 mars et que notre commission d’enquête est en place depuis le 18 novembre ». Le sénateur ajoute : « Je relève que Bruno Le Maire n’a pas dit que cette vérification fiscale avait été mise en place avant l’installation de la commission d’enquête, mais avant le rendu du rapport, ce qui laisse beaucoup de place. Si on compte, c’est pratiquement quatre mois ».

D’après la Lettre A, la Direction générale des finances publiques (DGFIP) a démarré ce contrôle seulement « en décembre 2021 ». Ce qu’avait déjà révélé, en réalité, la rapporteure communiste de la commission d’enquête, Elianne Assassi, lors de la conférence de presse le 17 mars. Elle s’interrogeait sur le calendrier. « Notre commission d’enquête démarre au mois de novembre et le contrôle fiscal débute au mois de décembre », avait remarqué la sénatrice PCF de Seine-Saint-Denis. Autrement dit, on peut formuler l’hypothèse que rien n’aurait été fait depuis 10 ans et que c’est l’annonce de la commission d’enquête du Sénat qui aurait déclenché le contrôle de Bercy. Ce timing « est quand même étonnant », remarque un sénateur. « Notre travail est un travail factuel, je ne fais pas d’hypothèse, mais il y a des rapprochements de dates troublants en tout cas », affirme de son côté Arnaud Bazin.

« Je crois que tout l’appareil d’Etat est mobilisé autour de ce sujet-là, manifestement »

Face à ce sujet brûlant, le gouvernement tente d’éteindre l’incendie. Deux ministres sont envoyés au front. Celui du Budget, Olivier Dussopt, et celle de la Fonction publique, Amélie de Montchalin. Une conférence de presse est organisée ce mercredi soir, à 19 heures, à Bercy. « On va apprendre à beaucoup de gens à lire le rapport du Sénat », dit l’entourage de la ministre au Hufffington Post.

« Je vais m’attacher à savoir si cette relecture du rapport est fidèle ou pas. Je m’attends à ce qu’elle ne soit pas fidèle », réagit Arnaud Bazin. « Je crois que tout l’appareil d’Etat est mobilisé autour de ce sujet-là, manifestement. On évoque des dépenses de certaines collectivités territoriales pour faire un peu diversion. On a dû certainement mobiliser des fonctionnaires pour avoir ces renseignements-là rapidement… » s’étonne le président de la commission d’enquête, qui ajoute :

C’est une défense assez maladroite de rideau de fumée, mais elle est assez transparente pour tout dire.

Comme Arnaud Bazin l’a déjà affirmé, « tout ça traduit une grande fébrilité ». « La fébrilité est celle de l’opposition », rétorque Bruno Le Maire, qui veut y avoir une façon de « déstabiliser Emmanuel Macron ».

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