Le secret des affaires pour la première fois invoqué pour le Levothyrox
C’est une première, le secret des affaires a été invoqué pour ne pas transmettre à un avocat toutes les informations sur l’autorisation de mise sur le marché du Levothyrox. « Appliquer le secret des affaires aux médicaments, c’est un scandale supplémentaire » réagit la sénatrice PCF, Laurence Cohen.

Le secret des affaires pour la première fois invoqué pour le Levothyrox

C’est une première, le secret des affaires a été invoqué pour ne pas transmettre à un avocat toutes les informations sur l’autorisation de mise sur le marché du Levothyrox. « Appliquer le secret des affaires aux médicaments, c’est un scandale supplémentaire » réagit la sénatrice PCF, Laurence Cohen.
Public Sénat

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

La loi sur le secret des affaires montre ses premiers effets. Adoptée au cœur de l’été par le Parlement, elle a été largement dénoncée pour les risques qu’elle induit pour la liberté d’informer. Le site Les Jours nous apprend que le secret des affaires a été pour la première fois opposé, non pas à un journaliste, mais à un avocat. Et non pas par une entreprise, mais par un établissement public.

Dans le cadre de l’affaire du Levothyrox, ce médicament pour la thyroïde dont la nouvelle formule est au cœur d’une polémique, l’avocat d’une plaignante a demandé à l’Agence du médicament (ANSM) une copie de l’autorisation de mise sur le marché du Levothyrox. L’ANSM lui a transmis les documents, mais après avoir effacé des informations importantes, au nom du secret des affaires. Il manque notamment le lieu de production et le nom de l’entreprise qui fabrique le principe actif de la nouvelle formule. Pas idéal pour établir une réelle traçabilité du médicament incriminé… Détail important : la demande, formulée en avril dernier, n’a été exaucée que le 4 septembre, soit après le vote définitif de la loi et sa validation par le Conseil constitutionnel.

« La transparence et la démocratie sont quelque part remises en jeu »

Cette première fait évidemment réagir les opposants. « Au nom du secret des affaires, on tombe dans des dangers extrêmement graves. Finalement, c’est toute la transparence et la démocratie qui, quelque part, sont remises en jeu » s’indigne la sénatrice communiste Laurence Cohen, sensible à cette question à plus d’un titre : la sénatrice du Val-de-Marne avait voté contre la proposition de loi et a demandé la création d’une commission d’enquête sénatoriale sur le Levothyrox.

« Le médicament n’est pas une production industrielle comme une autre. Or on a vraiment tendance à le mettre sur le même plan qu’une pièce de voiture ou d’électroménager. Pour moi, appliquer le secret des affaires aux médicaments, c’est un scandale supplémentaire » soutient Laurence Cohen. Elle ajoute : « les responsables vont pouvoir se draper derrière le secret des affaires pour être protégés. C’est gravissime ».

« Sur la sécurité sanitaire, ce type de secret doit être levé »

L’ancien rapporteur du texte au Sénat, Christophe-André Frassa, sénateur LR représentant les Français établis hors de France, ne souhaite pas réagir sur ce cas précis. Il se borne à dire que « le secret des affaires a été mis en place pour donner une arme de plus aux entreprises dans la guerre économique qui se répand sur la planète ».

En revanche, un autre défenseur de la mesure, Jean-Marc Gabouty, sénateur Radical (groupe RDSE) de la Haute-Vienne, tique en apprenant la nouvelle. « Je suis favorable au secret des affaires lorsqu’il s’agit d’accords commerciaux, industriels, ou sur le plan technologique, afin de préserver les acquis, les avancées des entreprises françaises » commence le sénateur centriste, avant d’ajouter :

« Mais lorsqu’on est sur un sujet de sécurité ou de santé publique, il n’y a pas lieu qu’il y ait un secret des affaires, surtout lorsqu’on est dans une phase à caractère contentieux. Dans un cas comme celui-là, je ne pense pas que ce soit une bonne application, intelligente et différentiée, du secret des affaires. Sur la sécurité sanitaire, ce type de secret doit être levé ».

Le collectif « Informer n’est pas un délit », qui rassemble des journalistes opposés au secret des affaires, s’étonne surtout pour sa part que « cette atteinte au droit d’être informé ne vienne pas d’un groupe privé. Elle est le fait d’une agence publique. C’est inacceptable ! ». « Nous ne pouvons tolérer que la défense des intérêts d’une entreprise privée passe avant l’intérêt général, en l’espèce, la santé des citoyens » continue le collectif dans un communiqué. Il « exige » que de l’Agence nationale de sécurité du médicament « s’explique publiquement » et demande au gouvernement « de rendre publique l’intégralité des informations concernant le Levothyrox ».

Partager cet article

Dans la même thématique

Le secret des affaires pour la première fois invoqué pour le Levothyrox
2min

Politique

« On impose des rythmes de cadres à des enfants », constate Sylvain Chemin, membre de la Convention citoyenne sur les temps de l’enfant

Depuis septembre, près de 140 citoyens tirés au sort se réunissent plusieurs fois par mois au Conseil économique et social pour débattre des temps de l’enfant. Sylvain Chemin, responsable immobilier à Cherbourg-en-Cotentin et père d’une collégienne en classe de 6ème, a pris part aux travaux de cette nouvelle Convention. Son constat est clair et limpide, la réalité des collégiens et des lycéens est à rebours des mesures préconisées. Il témoigne au micro de Quentin Calmet dans l’émission Dialogue Citoyen.

Le

World News – October 14, 2025
10min

Politique

Suspension de la réforme des retraites : vers « un vote contre » des députés Renaissance, mais un soutien des sénateurs macronistes

La suspension de la réforme des retraites divise au sein de Renaissance. « Il y a deux écoles », entre ceux, plutôt issus de l’aile gauche, prêts à soutenir « le deal » entre Sébastien Lecornu et le PS, et les autres, notamment de l’aile droite, qui ne veulent pas se « dédire » et pour qui cette « concession énorme » reste au travers de la gorge…

Le

« Gérard Larcher n’était pas content » : crispation au Sénat sur le calendrier budgétaire proposé par le gouvernement
5min

Politique

« Gérard Larcher n’était pas content » : crispation au Sénat sur le calendrier budgétaire proposé par le gouvernement

La définition des séances de travail sur le budget 2026 a froissé le président du Sénat, mardi, lors d’une réunion avec les présidents de commission et le gouvernement. Il estime que le Sénat ne peut pas prendre le relais des textes budgétaires dans de bonnes conditions. Une nouvelle conférence des présidents doit revenir sur la question la semaine prochaine.

Le

General policy speech by Prime Minister at Senate
5min

Politique

Lutte contre le communautarisme : la droite du Sénat propose encore une fois de réviser la Constitution

Lundi, le Sénat examinera une proposition de loi de la droite et du centre visant à inscrire dans la Constitution que « nul individu ou nul groupe ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s’exonérer du respect des règles applicables ». Un principe que la majorité sénatoriale remet à l’ordre du jour régulièrement ces dernières années par le dépôt de différents textes. On retrouve aussi la même idée dans un texte de Marine Le Pen.

Le