Après un discours particulièrement scruté à la Sorbonne, Emmanuel Macron a répété sa volonté « d’ouvrir le débat » sur la mutualisation des armes nucléaires françaises avec les autres Etats de l’Union européenne. Si le président de la République est resté flou sur ses propositions, ces déclarations ont suscité un rejet quasi unanime au sein de la classe politique française.
Le secret qu’entretenait Mitterrand n’était autre que « la condition de sa liberté, individuelle ou politique »
Par Hugo Ruaud
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Il y a tout juste 40 ans, en mai 1981, François Mitterrand était élu président de la République. Ministre sous la IVe République, candidat malheureux en 1965 et 1974, le natif de Jarnac est depuis longtemps un homme politique connu des Français lorsqu’il s’installe à l’Élysée. Pourtant, malgré sa notoriété en tant qu’homme public, une part de mystère a toujours entouré sa personnalité. Pour le journaliste Pierre Favier, qui l'a suivi pendant près de trente ans : « François Mitterrand était un homme très secret, qui ne se confiait que très peu, jusqu’à ses amis les plus proches. Il a côtoyé André Rousselet, l’ancien préfet, pendant 40 ans, et lorsqu’on l’a interrogé à la fin de sa vie en lui demandant quelle part il connaissait de François Mitterrand, il confiait l’avoir fréquenté, vu tous les jours pendant une trentaine d’années, mais ne connaître que dix pourcents de la personnalité de l’ancien Président ». Mais comment un homme si longtemps au centre de l’attention a-t-il pu à ce point rester inconnu de ceux qui l’ont côtoyé ?
Le secret, « condition de sa liberté »
Pour Michèle Cotta, la réponse à cette question réside dans la volonté même de l’ancien Président qui cultivait volontairement cette part de flou : « Mitterrand a toujours voulu brouiller les pistes sur lui-même. Ses amis ne se connaissaient pas, et lorsqu’ils se sont rencontrés en 1981, ils étaient tous très étonnés de se retrouver » témoigne la journaliste. Une distance bien entretenue, grâce à l’absence de toute forme de familiarité avec ses interlocuteurs, comme en témoigne Pierre Favier : « J’ai vu très peu de gens qui le fréquentaient, même des plus proches, le tutoyer, tous les autres le vouvoyaient et lui parlaient avec une certaine distance et un certain respect. Il n’avait jamais de relation familière ». Pour Dominique Bertinotti, ancienne archiviste de François Mitterrand, ce côté énigmatique, ambigu et mystérieux n’était autre que « la condition de sa liberté, individuelle ou politique. C’était inconcevable pour lui que tout le monde sache tout, immédiatement ». L’exercice du pouvoir tel qu’il le concevait nécessitait donc une forme de secret, afin que personne ne puisse l’influencer dans ses prises de décision.
Ils lui parlaient avec une certaine distance et un certain respect
Un secret parmi tous les autres est mieux connu aujourd’hui : son cancer. Là aussi, François Mitterrand a tout fait pour que son état de santé ne s'ébruite pas. Pendant 14 ans, la France a eu à la tête de son État un Président gravement malade. Mais « Il faut se remettre dans le contexte de la bataille frontale entre la gauche et la droite à l’époque » selon Pierre Favier. « On ne peut pas imaginer Mitterrand rendant publique sa maladie à l’automne 1981. Il était impossible politiquement d’annoncer sa maladie sans être contraint de partir ». Alors le mystère n’est-il pas, finalement, intrinsèquement lié au rôle de Président sous la Ve République ?
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