Le Sénat rejette la proposition de loi PS pour le droit à mourir dans la dignité
Les sénateurs ont voté, ce mardi, la suppression de l’article 1 d’un texte visant à légaliser l’euthanasie, conduisant ainsi la sénatrice PS, Marie-Pierre de La Gontrie, à retirer sa proposition de loi. Le ministre de la Santé a annoncé, au cours de ces débats, un nouveau plan national de développement des soins palliatifs. 

Le Sénat rejette la proposition de loi PS pour le droit à mourir dans la dignité

Les sénateurs ont voté, ce mardi, la suppression de l’article 1 d’un texte visant à légaliser l’euthanasie, conduisant ainsi la sénatrice PS, Marie-Pierre de La Gontrie, à retirer sa proposition de loi. Le ministre de la Santé a annoncé, au cours de ces débats, un nouveau plan national de développement des soins palliatifs. 
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Par Héléna Berkaoui

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La sénatrice socialiste, Marie-Pierre de La Gontrie, a défendu, ce mardi, sa proposition de loi pour le droit à mourir dans la dignité. Une initiative parlementaire qui a donné lieu à un débat dense, parfois sensible, dans l’hémicycle ce matin. Les Républicains ont cependant déposé une demande de scrutin public sur un amendement visant à supprimer l’article 1 de la proposition de loi.

Voté par 161 voix contre 142, cet amendement a conduit la sénatrice socialiste à retirer sa proposition de loi de l’ordre du jour de l’Assemblée. « Cet article est au cœur de cette proposition de loi et donc, à regret, ayant noté la qualité des débats et les résultats, je retire la proposition de loi », a expliqué la sénatrice de Paris.

Ce vote serré témoigne, en effet, des divergences d’opinion dans chacun des groupes politiques, y compris au sein du groupe socialiste. Le sénateur, Bernard Jomier (PS), s’est notamment dit défavorable au second volet de l’article 1 qui ouvre la voie à la légalisation de l’euthanasie. Au sein du groupe centriste, les positions ont varié en fonction des sénateurs. Les centristes, Élisabeth Doineau et Olivier Cadic, ont tous deux témoigné d’expérience de proches contraints de se rendre à l’étranger pour mourir dans des conditions dignes.

« Devoir quitter son pays pour mourir est une violence supplémentaire »

L’actualité a également rattrapé ces débats. Sept jours plus tôt, l’ex-secrétaire d’Etat socialiste aux personnes âgées, Paulette Guinchard-Kunstler, choisissait le suicide assisté en Suisse pour finir ses jours. « Elle n’était pas favorable à cette évolution et puis la maladie l’a rattrapée et elle a évolué. Cela nous montre cette obligation de s’expatrier. Devoir quitter son pays pour mourir est une violence supplémentaire », a appuyé Marie-Pierre de La Gontrie à la tribune du Sénat.

Sa proposition de loi entendait ainsi répondre aux insuffisances de la loi Clayes-Leonetti. Cette loi promulguée en février 2016 vise à permettre une fin de vie digne et apaisée notamment avec le développement des soins palliatifs. Reste qu’à ce jour, « 26 départements n’ont aucune unité de soins palliatifs ». La loi de 2016 ouvre aussi la possibilité d’une sédation profonde pour certains cas mais pas le suicide assisté comme c’est le cas dans d’autres pays européens.

Le ministre de la Santé annonce un plan national de développement des soins palliatifs

A la tribune, Olivier Véran a annoncé un 5e plan national de développement des soins palliatifs et d’accompagnement de la fin de vie dès avril (lire ici). Comme la droite sénatoriale, le ministre de la Santé estime qu’il est trop tôt et que nous ne disposons pas assez de recul sur la loi Claeys-Leonetti pour légiférer de nouveau : « Le principal enjeu n’est pas tant de faire évoluer (la loi Clayes-Leonetti) que de la faire connaître ». Le Premier ministre a, par ailleurs, ordonné une évaluation de la loi Claeys-Leonetti de 2016.

Le sénateur LR, Jean-François Rapin a aussi fait valoir que la légalisation de l’euthanasie conduirait à des difficultés pour établir la réelle volonté du patient. « Comment s’assurer que ce souhait constitue une volonté définitive ? Toute erreur de jugement de la part d’un patient souhaitant une aide active à mourir serait irréversible », s’est-il inquiété.

« La loi actuelle pose en droit un cadre qui permet de résoudre l’immense majorité des situations difficiles que peuvent vivre les patients, leur famille et parfois les communautés soignantes », a aussi affirmé Olivier Véran (voir la vidéo ci-dessus). Un argument réfuté par le sénateur socialiste, Bernard Jomier : « Il faut regarder les choses en face, il y a un certain nombre de personnes pour lesquelles la législation actuelle n’est pas adaptée. Elles ne sont peut-être pas très nombreuses mais elles sont assez nombreuses pour que le législateur remette le sujet à l’ordre du jour et fasse évoluer la loi ».

Le sénateur socialiste appelle également le gouvernement à inscrire réellement ce sujet à l’ordre du jour du Parlement « car nous savons tous que nous ne sommes pas en capacité d’adopter une législation sur un tel sujet dans le cadre d’une PPL ».

A l’Assemblée nationale, d’autres groupes politiques, y compris ceux de la majorité présidentielle, ont également déposé des textes pour le droit à mourir dans la dignité et alors même que le gouvernement s’y est déclaré défavorable. Olivier Véran argue que la légalisation de l’euthanasie ne faisait pas partie des promesses de campagne d’Emmanuel Macron.

Le ministre de la Santé a aussi invoqué le « contexte épidémique » et la « sensibilité particulière de la population à l’égard des personnes âgées notamment dans les Ehpad » pour en conclure que « le moment n’est pas venu » de légiférer sur la fin de vie. Les députés auront à débattre du droit à mourir dans la dignité le 8 avril prochain.

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