Logement, école, emploi, sécurité : ce que contient le plan Borloo pour les banlieues

Logement, école, emploi, sécurité : ce que contient le plan Borloo pour les banlieues

Jean-Louis Borloo, chargé par Emmanuel Macron d'une mission sur la politique de la ville, a remis son rapport  à Edouard Philippe ce jeudi à Matignon. Un rapport que Public Sénat s’est procuré.
Public Sénat

Par Yann Quercia

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« Changer la donne » dans les quartiers prioritaires et « relancer la rénovation urbaine »,  telles sont les priorités affichées par Jean-Louis Borloo après la remise de son rapport à Edouard Philippe ce jeudi matin à Matignon. Le rapport conçu par l’ancien ministre est très attendu par les maires,  dépités par les coupes budgétaires. Il prévoit « un ensemble d'événements ou de programmes qui j'espère vont changer la donne », a déclaré l'ancien ministre de la Ville.

Le rapport, que Public Sénat a pu se procurer avant sa publication, prévoit « 19 programmes robustes, structurants, innovants » pour « faire revenir la République » dans les quartiers face au « repli identitaire et communautaire.»

Une fondation pour le logement

Pour l’ancien Ministre, « il faut relancer la rénovation urbaine qui est arrêt depuis 4 ans ». Le rapport chiffre 400 projets parfaitement identifiés  représentant 80.000 destructions ou reconstructions et 300.000 résidentialisations ou réhabilitations. Cette relance créera 40.000 emplois et des recettes pour l’État et les comptes publics.

Le rapport dresse un constat concernant l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine qui « ne fonctionne pas bien, trop bureaucratique». Deux pistes sont proposées. Tout d’abord, la création d’une fondation appartenant à la Nation, regroupant les collectivités territoriales, les financeurs, les partenaires sociaux et les bailleurs. Ensuite modifier complètement la gouvernance de l’ANRU qui doit être pilotée par les financeurs, les agglomérations et les bailleurs concernés

Un « club petit dej » gratuit dans les écoles et collèges des REP et REP+

 «Il faut une cité éducative autour de l’école » selon Jean-Louis Borloo.  Le rapport explique que «la cité éducative, c’est le regroupement à partir du collège et des écoles de tous les lieux et de tous les acteurs prêts à soutenir, ensemble, l’éducation des enfants».

Plusieurs pistes sont lancées : tout établissement scolaire se verra adjoindre un dirigeant en charge de la cité éducative, chaque principal bénéficiera d’une enveloppe directe de 100.000 euros par an pour gérer les urgences sociales, un « club petit dej » gratuit dans les écoles et collèges des REP et REP+ le matin et rendre gratuite la cantine le midi, reconstruire ou rénover les 300 écoles les plus vétustes dans les 5 ans, dans les quartiers sans mixité.

Tout passe par l’entreprise et l’emploi

« Il faut un recrutement massif en alternance avec des obligations légales pour les entreprises. La loi n’est pas respectée actuellement ». Selon le rapport, si les quelques 7.000 entreprises de plus de 250 salariés respectaient les 5% (quota d’alternants que doivent embaucher les entreprises) prévus par la loi, il devrait y avoir 350.000 alternants soit 200.000 de plus.

Le rapport préconise d’associer les agglomérations et les régions à la réussite du plan avec un recrutement du secteur public de 50.000 apprentis en 3 ans dans les Quartiers Politiques de la Ville.

Enfin Jean-Louis Borloo souhaite une mobilisation générale des acteurs de l’emploi : Créer 75.000 services civiques tournés vers l’entreprise et l’emploi et une relance d’un plan de services à la personne pour la formation et l’emploi de 100 000 personnes des QPV.

Des moyens d’agir pour les communes

Pour répondre à la grande inquiétude des élus, Jean-Louis Borloo souhaite une véritable péréquation pour que les communes puissent répondre aux besoins de leur population. Alors que le gouvernement souhaite que les communes réduisent leurs dépenses, le rapport prévoit que les villes classées en rénovation puissent aller jusqu’à 2 % d’augmentation de la dépense par an sans inclure dans l’augmentation, les dépenses liées aux programmes eux-mêmes.

Par ailleurs le rapport prévoit la création d’un fond d’urgence de 500 millions d’euros par an pour l’investissement, une compensation par l’État de l’ensemble de l’abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties et un comité d’actions locales (CAL) pour répondre aux urgences.

Pour progresser vers l’égalité réelle, il sera dorénavant demandé aux responsables une obligation de moyens. Chaque responsable public devra prouver qu’il a mis en œuvre les moyens susceptibles de contribuer à réduire les inégalités d’accès aux services publics. Il est prévu que cette mise en œuvre fasse l’objet d’une évaluation, sur la base d’indicateurs précis et d’une obligation de transparence des administrations.

Enfin, il est proposé de créer dans la Constitution ou dans une loi organique une nouvelle juridiction administrative spécialisée, la Cour d’Équité Territoriale pour s’assurer de l’application concrète de toutes ces propositions.

Campus numériques, mobilité, sécurité, académie des « leaders »

Le rapport, qui préconise la création de 200 campus numériques avec  des cours en libre accès, des formations professionnelles liées au codage ou encore des aides pour passer le permis.

L’ancien ministre des banlieues souhaite un investissement d’un milliard d’euros dans le RER pour améliorer la mobilité et atténuer l’enclavement des habitants des quartiers.

En plus d’un renfort de la police, notamment de proximité, le rapport suggère le déploiement de 500 « correspondants de nuit » supplémentaires sur des postes d’adultes-relais, pour contribuer en lien avec la police municipale à une politique de « tranquillité publique » ou pour venir structurer les initiatives associatives. Ce programme comprend aussi la formation de 200 femmes relais

Le rapport souhaite la création « d’une nouvelle grande école », pour arrêter de passer à côté des « talents de notre jeunesse et notamment des quartiers populaires ». Accessible sur concours, elle permettra à des étudiants, s’ils réussissent les épreuves de « bénéficier du statut de fonctionnaire stagiaire de l’ENA avec une rémunération équivalente (de l’ordre de 1 700 euros bruts) pendant la durée de la scolarité ». À l’issue de la scolarité, ils auront l’obligation de servir dans une des trois fonctions publiques pour une période minimale de 10 ans.

 

Après lecture et analyse, le chef de l’État dévoilera fin mai son plan de mobilisation, en fonction du rapport mais également des propositions issues des dix groupes de travail nationaux et les concertations organisées par les préfets avec les acteurs de terrain.

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