Loi antiterroriste : « une pilule empoisonnée » pour la République selon le Défenseur des droits

Loi antiterroriste : « une pilule empoisonnée » pour la République selon le Défenseur des droits

Présenté hier en conseil des ministres, le projet de loi antiterroriste s’est fait sérieusement étriller par le Défenseur des droits Jacques Toubon. « Une pilule empoisonnée » qui risque de (…) « dissoudre la cohésion nationale » affirme-t-il,  au Monde.
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« J’estime que le ‘nouveau cours politique’, « après l’élection d’Emmanuel Macron, aurait pu permettre de développer une capacité à résister à l’opinion, à faire œuvre pédagogique, afin de sortir de l’état d’urgence, au lieu de se mettre dans la complète continuité du gouvernement précédent. Je le regrette et je l’ai écrit au président de la République ».Les mots sont lâchés par le Défenseur des droits, Jacques Toubon, interrogé ce matin dans lemonde.fr.

Pourtant, depuis des semaines, l’exécutif s’échine à démontrer que  son projet de loi « renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » ne pérennise pas le régime d’exception de l’état d’urgence, puisqu’il permet un « véritable équilibre » entre sécurité et libertés publiques (voir notre article). « En réalité, ce nouvel ‘état permanent’ du droit n’offre pas plus de garanties mais ne pourra plus être justifié par le caractère exceptionnel et temporaire » réplique sévèrement Jacques Toubon. « La France va se retrouver fragilisée devant la Cour européenne des droits de l’homme et le Conseil constitutionnel » ajoute-il. Pour Jacques Toubon, « la France est en train de sortir des principes stricts du droit pénal et en particulier la légalité, la précision et la prédictibilité des délits et des peines ». Raison pour laquelle, il subodore que 60 députés ou 60 sénateurs pourraient saisir le Conseil constitutionnel au moment de la promulgation de la loi.

À la lecture du nouveau projet de loi, le Défenseur des droits s’étonne également de la création d’une « novlangue » de l’antiterrorisme.

« On ne parle plus d’« assignation à résidence », mais de « mesure individuelle de surveillance », plus de « perquisitions administratives » mais de « visites et saisies ». Comme s’il s’agissait d’un exploit d’huissier ! ».

Au-delà de la menace sur les libertés individuelles que le texte fait courir, Jacques Toubon s’inquiète de ses conséquences antirépublicaines. « Si la mise en œuvre du droit permanent français revient à viser dans 99 % des cas des personnes qui ont toutes la même religion, on instille une sorte de dissolvant de la cohésion nationale, une pilule empoisonnée (…) La question va bien au-delà du respect de l’État de droit (…) »Tout se passe comme s’il existait en France des gens qui ne seraient pas ‘pareils’ et qui présenteraient par essence plus de risques (…)Une partie de la population risque de se sentir menacée. Comment lui dire, après, de se reconnaître dans la République ? ».

Quelle solution alors pour lutter contre le terrorisme ? Le Défenseur des droits préconise de «  lever l’état d’urgence » et de « mettre en œuvre les textes qui existent ». « Au moins sept lois ont tout de même été votées sous le quinquennat de François Hollande. Mais le gouvernement est pris dans un véritable piège, logique, philosophique et juridique » estime-t-il. Car selon lui, les hommes politiques seraient « terrorisés » de « se voir reprocher de ne pas avoir pris une mesure dont l’absence serait considérée comme ayant permis un futur attentat ».
 

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