Louis Aliot débouté sur les musées : les sénateurs saluent la décision de justice, mais pressent Roselyne Bachelot de « sauver la culture »
Alors que le tribunal administratif de Montpellier vient d’invalider les arrêtés pris par Louis Aliot pour ouvrir coûte que coûte les musées dans sa ville de Perpignan, les sénateurs saluent la décision de justice mais continuent surtout de presser le gouvernement pour que la culture reprenne enfin ses droits.

Louis Aliot débouté sur les musées : les sénateurs saluent la décision de justice, mais pressent Roselyne Bachelot de « sauver la culture »

Alors que le tribunal administratif de Montpellier vient d’invalider les arrêtés pris par Louis Aliot pour ouvrir coûte que coûte les musées dans sa ville de Perpignan, les sénateurs saluent la décision de justice mais continuent surtout de presser le gouvernement pour que la culture reprenne enfin ses droits.
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Par Antoine Comte

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« Communication populiste », « décision irresponsable », « coup de pub »… Les sénateurs membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication n’y vont pas de main morte pour qualifier l’initiative prise par Louis Aliot la semaine dernière.

Tous applaudissent donc aujourd’hui la décision du tribunal administratif de Montpellier de retoquer les arrêtés municipaux pris par le maire RN de Perpignan pour rouvrir quatre musées dans sa ville contre l’avis du gouvernement. Même si Louis Aliot a d’ores et déjà annoncé qu’il ferait appel de cette décision, les quatre musées devront donc fermer leurs portes jusqu’à la prochaine audience.

« Nous sommes contre la désobéissance civile »

« Nous aussi, nous sommes tous au taquet et en faveur d’une réouverture des musées, mais nous ne sommes pas pour la désobéissance civile pour autant. Louis Aliot joue une communication un peu poujadiste et populiste. Il n’est pas possible d’être maire et ne pas respecter la loi », lance la sénatrice LR Laure Darcos.

Même son de cloche du côté de son collègue Pierre Ouzoulias, membre lui aussi de commission de la culture. « Louis Aliot appartient à une famille politique qui aime bien les lois qui restreignent les libertés et aujourd’hui, et en se comportant comme cela, il est en fait la première victime de ce qu’il pourrait très bien défendre si son parti était aux commandes du pays », tacle le sénateur communiste des Hauts-de-Seine, qui considère que « la France n’a plus de fonctionnement démocratique depuis un an avec des secteurs totalement sacrifiés comme la culture ».

Pour Bernard Fialaire, sénateur RDSE du Rhône, cette décision de justice est également une très bonne chose. « Il ne faut pas non plus être dupe. Si Louis Aliot a fait cela, c’est parce que c’est électoraliste. Le RN a quand même beaucoup à se faire pardonner du monde de la culture ».

« Ouvrir le débat »

Mais si tous saluent donc cette décision de justice qui donne gain de cause à la préfecture des Pyrénées Orientales, certains élus du Palais du Luxembourg ne condamnent pas complètement l’initiative de l’ancien époux de Marine Le Pen. Pour le sénateur LR de l’Isère Michel Savin, « la loi c’est la loi, et il faut la respecter », mais la sortie de Louis Aliot « aura au moins eu l’effet positif de mettre enfin le débat de la culture sur la table ».

Un sentiment que partage aussi Monique de Marco. « Je condamne le fait que ces élus ne respectent pas la loi en faisant ça, mais si Louis Aliot et André Laignel (maire PS d’Issoudun, qui a lui aussi décidé de rouvrir le musée de sa ville, ndlr) peuvent par leurs initiatives pousser la ministre de la Culture à réagir enfin, c’est tant mieux », espère la sénatrice écologiste de Gironde.

Il faut dire que les sénateurs sont toujours autant remontés contre la stratégie gouvernementale vis-à-vis du covid-19, avec un monde culturel toujours qu'il est "urgent de sauver" selon eux.

Le triste record des 100 jours sans lieux culturels en France (hormis les galeries d’art) a été atteint la semaine dernière, et les sénateurs pressent chaque jour un peu plus la ministre de la Culture Roselyne Bachelot, pour que cette dernière -qui n’exclut plus une réouverture prochaine des musées et des monuments- relance enfin le monde culturel en France.

La méthode du cas par cas

« Il faut concevoir sans plus attendre des protocoles pour chaque organisme culturel car d’un musée à l’autre, ils n’ont pas du tout les mêmes caractéristiques. On a vu que c’était largement faisable pour les musées comme en Italie ou en Espagne, ça doit aussi l’être en France, même pour les cinémas », explique Laurent Lafon, le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

La méthode du cas par cas, les sénateurs LR Michel Savin et Laure Darcos y sont également favorables.

« Je n’appelle pas à la désobéissance civile, moi j’appelle le gouvernement à rouvrir au plus vite le débat, en étudiant au cas par cas chaque lieu culturel. Puisque nous allons devoir vivre avec le virus, il faut y aller maintenant, on ne peut plus attendre sans rien faire ! », lance le sénateur isérois.

Rouvrir l’ensemble des lieux culturels en même temps et le faire même si le virus est toujours là, Laure Darcos y croit dur comme fer. « On est un pays trop manichéen. Soit tout est blanc, soit tout est noir. Il faut arrêter d’infantiliser les gens, mais il faut au contraire les responsabiliser. Surtout dans le domaine culturel, où il faut être subtil et prendre en considération les spécificités de chacun ».

Pour Pierre Ouzoulias, laisser les musées fermés aujourd’hui est « arbitraire ». « Dans l’hémicycle du Sénat qui est un lieu clos, on poursuit nos débats avec le masque en condamnant un siège sur deux, pourquoi nous ne pouvons pas le faire dans les cinémas ou les théâtres ? », se questionne-t-il en reconnaissant tout même à Roselyne Bachelot sa « volonté de faire bouger les choses », bien que politiquement « le gouvernement ne la suive pas », estime-t-il.

Les réunions de la semaine dernière rue de Valois entre la ministre de la Culture, le ministre de la Santé Olivier Véran et des responsables de musées, mais aussi de festivals, devraient forcément conduire le gouvernement à communiquer très prochainement en fonction de l’évolution de l’épidémie. Reste à savoir quand précisément, et sur quels lieux culturels en particulier…

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