Lubrizol : « Une volonté de minimiser l’ampleur de l’évènement » de la part la préfecture
Mardi, la commission d’enquête du Sénat sur l’incendie de l’usine Lubrizol et de Normandie Logistique poursuivait ses travaux par une série d’auditions. Arnaud Brennetot, maître de conférences en géographie politique à l'université de Rouen, a perçu une « volonté de minimiser l’ampleur de l’événement » du côté de la préfecture.

Lubrizol : « Une volonté de minimiser l’ampleur de l’évènement » de la part la préfecture

Mardi, la commission d’enquête du Sénat sur l’incendie de l’usine Lubrizol et de Normandie Logistique poursuivait ses travaux par une série d’auditions. Arnaud Brennetot, maître de conférences en géographie politique à l'université de Rouen, a perçu une « volonté de minimiser l’ampleur de l’événement » du côté de la préfecture.
Public Sénat

Temps de lecture :

6 min

Publié le

Mis à jour le

 

Après avoir auditionné le PDG de Lubrizol et effectué un déplacement à Rouen la semaine dernière, la commission du Sénat a entendu, mardi, Arnaud Brennetot, maître de conférences en géographie politique à l'université de Rouen. À une question de la rapporteure LR de la commission d’enquête, Christine Bonfanti-Dossat, sur « les manques de communication de la préfecture » les heures et les jours suivants l’incendie. « On a vu qu’il y avait un message rassurant. Mais est-ce qu’on ne peut pas dire que c’est de la langue de bois » ?

Arnaud Brennetot a bien relevé « des litotes », « des doubles négations » « qui témoignent d’une volonté de rassurer le public à bon compte. C’est-à-dire sans forcément admettre tout ce qu’on ignore à ce moment-là, et une volonté de minimiser l’ampleur de l’événement de façon à donner le sentiment que la situation est maîtrisée » a-t-il noté.

« Les services de l’État n’ont pas l’habitude d’être en contact avec le grand public »

Une « communication compliquée » qui s’explique, selon lui, par « le fait que les services de l’État n’ont pas l’habitude d’être en contact avec le grand public, les médias, en situation de crise, beaucoup moins en tout cas que les élus locaux ». « Le public, depuis les lois de décentralisation, a été habitué à avoir des justifications de la part de responsables politiques qui sont en fait des élus locaux, qui eux, ont cette aptitude à expliquer, ce qui n’est pas le cas d’un préfet ». Dans ce cas précis, il s’agit du préfet Pierre-André Durand, préfet de Normandie et de Seine-Maritime qui a reconnu devant les caméras d’Envoyé spécial avoir « un regret ». « Parce que ce que j’ai dit était techniquement exact, mais mal compris par nos concitoyens. »

« Les critères qui ont présidé la définition de ce périmètre me semblent obscurs et critiquables »

Lubrizol: Arnaud Brennetot évoque « une imprécision sur les mesures de précaution »
04:55

« J’ai eu l’intuition assez rapidement que la transparence de l’information promise par le Premier ministre n’était pas totale mais plutôt partielle » a-t-il par ailleurs relevé. Arnaud Brennetot évoque même « une imprécision sur les mesures de précaution » notamment sur « l’étendue » de la zone de pollution. « Les critères qui ont présidé la définition de ce périmètre me semblent obscurs et critiquables. Il était prévisible que le nuage allait se répandre au-delà des 12 communes définies (…) On pouvait aisément anticiper que la pluie attendue en milieu de matinée allait coucher les substances véhiculées par le nuage sur l’ensemble de la zone couverte par le panache et non uniquement sur les 12 communes concernées par l’arrêté. Les personnes pratiquant des activités à l’extérieur, jardinage, sport, chantier, cours de récréation… ont pu continuer à les mener sans aucune mise en garde » a-t-il pointé.

Atmo Normandie se défend d’avoir cherché à dissimuler l'indice de qualité de l'air de Rouen

Lubrizol: Atmo Normandie se défend d’avoir cherché à dissimuler l'indice de qualité de l'air de Rouen
05:34

Quelques minutes plus tôt, ce sont Denis Merville et Véronique Delmas, respectivement président et directrice de l’association Atmo Normandie, chargée de la surveillance de la qualité de l’air, qui ont été entendus par les parlementaires. Plus précisément, cette association est chargée de relever « la pollution de fond » mais pas nécessairement qualifiée pour mesurer la pollution relevant d’incidents ponctuels comme Lubrizol.

« Ceci dit vous avez été mis dans la boucle lors de l’incendie de Lubrizol, donc vous êtes impliqués » leur a rappelé, Nicole Bonnefoy, la rapporteure PS de la commission d’enquête.

Ce qui intéresse les sénateurs, c’est la raison pour laquelle Atmo Normandie a suspendu son l'indice de mesure de la qualité de l’air (imposé par arrêté ministériel) le 26 septembre, le jour de l'incendie et le lendemain. « La situation était trop incertaine » a argué Véronique Delmas. L'indice Atmo est calculé à partir de mesures pour quatre polluants, particules fines PM10, Ozone (O3) dioxyde d'azote (NO2) et dioxyde de soufre (SO2). « C’est un indice d’agglomération (…) le fait qu’une partie de l’agglomération soit potentiellement touchée par le panache (…) faisait que l’indice Atmo n’était pas représentatif (…) On ne savait pas exactement comment l’indice allait évoluer, l’indice Atmo étant également un indice de prévision, on n’avait aucune capacité à prévoir ce qui allait se passer » a-t-elle justifié.

Les représentants d’Atmo Normandie, chargée de la surveillance de la qualité de l'air, se sont défendus d'avoir cherché à dissimuler l'indice de qualité de l'air de Rouen pendant l'incendie de l'usine Lubrizol. « Pourquoi cet indice ne prendrait pas en compte les éléments présents dans ces fumées ? Ce choix n'a pas été toujours bien compris par la population, on vous a accusé de dissimulation », s'est interrogée Christine Bonfanti-Dossat.

Denis Merville a rappelé que l'indice est déterminé par les pouvoirs publics et « doit mesurer ces quatre polluants ». « Pour mesurer d'autres polluants, il faudrait que la réglementation change, il faudrait connaître la nature des produits qui brûlaient », a-t-il indiqué, rappelant aussi que les odeurs « n’entrent pas dans l'indice ».

« On avait mis une fenêtre pop-up qui s’affichait sur notre site internet dans laquelle on expliquait pour l’indice n’était pas diffusé (…) On a expliqué dans cette fenêtre pop-up qu’on rajoutait des éléments de surveillance renforcée qui arriveraient après coup, après des analyses en laboratoire (…) J’ai eu l’impression, pour l’avoir expliqué à la presse, que le choix était totalement compréhensible pour le public de ne pas diffuser une information qui laisserait penser qu’il n’y avait pas de problèmes sanitaires » a complété Véronique Delmas.

Partager cet article

Dans la même thématique

Lubrizol : « Une volonté de minimiser l’ampleur de l’évènement » de la part la préfecture
3min

Politique

« L’humour est de gauche » selon l’humoriste belge Alex Vizorek

C’est l'un des Belges les plus connus de la scène humoristique francophone. Passé par France Inter, il officie désormais à RTL. Comment un humoriste est-il passé d’un public à l’autre ? Comment faire indifféremment rire un public de droite et de gauche ? Cette semaine, Alex Vizorek est l’invité de Rebecca Fitoussi dans l’émission Un monde, un regard.

Le

Lubrizol : « Une volonté de minimiser l’ampleur de l’évènement » de la part la préfecture
3min

Politique

Parlement européen : « la droite traditionnelle pro-européenne joue avec l’extrême droite » pour Javier Moreno Sanchez   

« Un discours ferme et rassembleur ». Pour la députée centriste du groupe Renew, Fabienne Keller, les propos tenus par Ursula von der Leyen sont « absolument essentiels en ce moment historique où nous sommes en tension maximum avec Vladimir Poutine ». La présidente de l’exécutif européen a en effet annoncé une esquisse de nouvelles sanctions contre la Russie. Dans ce contexte, l’eurodéputée française estime que « la défense que l’on n’a pas voulue dans les années 50, s’impose à nous » désormais.   « C’est un peu tard mais elle commence à réagir »   Concernant le conflit israélo-palestinien, l’eurodéputé espagnol Javier Moreno Sanchez espère que qu’Ursula von der Leyen ira plus loin dans la condamnation des actes commis par l’Etat hébreu. « Ce que nous lui demandons, c’est qu’elle agisse avec la même fermeté dans les deux guerres qu’on a à nos portes ». A la surprise générale, la présidente de la Commission a annoncé vouloir suspendre une partie de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël, mais pour le social-démocrate, c’est l’ensemble de ce texte qui doit remis en cause.     Mais pour l’eurodéputé espagnol, l’urgence est de ne pas revenir sur les grands textes des précédentes mandatures de la Commission. Qu’il s’agisse du pacte migratoire ou des mesures écologiques, « il ne faut pas qu’Ursula von der Leyen démonte les propositions qu’elle a faites (…) on ne savait pas que la droite traditionnelle pro-européenne allait jouer avec l’extrême droite ».  « Ce n’est pas une Europe sociale, mais une Europe militariste »   Le groupe des Conservateurs et réformistes est nettement plus critique vis-à-vis du grand oral de la présidente de la commission. L’élu roumain Gheorghe Piperea souhaite la démission de la commissaire allemande. En juillet, il faisait déjà partie de ceux qui avait voté une motion de censure à l’encontre de cette dernière. Pour cet eurodéputé conservateur l’Union européenne nourrirait le conflit ukrainien en multipliant ses aides, notamment militaires. Ce député a par ailleurs dénoncé l’accord commercial conclu « sur un terrain de golf en Ecosse » entre Ursula von der Leyen et Donald Trump, le qualifiant « d’échec ».    Retrouver l’intégralité de l’émission en intégralité ici  

Le

Avis d’arret de travail Illustration
9min

Politique

Report de congés pour cause d’arrêt maladie : la délégation aux entreprises du Sénat saisit Sébastien Lecornu face à une décision « terrible » pour les PME

« Je saisis par courrier le premier ministre pour qu’une action au sommet de l’Etat soit engagée dans les plus brefs délais auprès des instances européennes », annonce à publicsenat.fr le président de la délégation aux entreprises du Sénat, le sénateur LR Olivier Rietmann, alors qu’un salarié malade pendant ses vacances pourra reporter ses congés, selon une décision de la Cour de cassation.

Le