Présidée par la sénatrice RDSE, Nathalie Delattre et conduite par la rapporteure LR, Jacqueline Eustache-Brinio, la commission d’enquête fait un constat. « Une minorité de la population française de confession musulmane tend à adopter un comportement dont l’intransigeance prend prétexte de la religion » (…) Cela relèverait d’une dérive sectaire si le repli sur soi et le sentiment d’élection n’étaient liés à un projet de transformation de la société et à une action militante de terrain » (…) la France se trouve prise dans un mouvement mondial auquel elle est d’autant plus exposée en raison de son passé colonial dans des pays à majorité musulmane » notent les auteurs.
« Il était nécessaire de ne plus être dans le déni »
« Il était nécessaire de ne plus être dans le déni (…) Un petit groupe d’individus a pour projet d’imposer une norme religieuse au-dessus des lois de la République » relève Nathalie Delattre qui affirme avoir lors de cette commission d’enquête « acquis la conviction que cette problématique existait et qu’il fallait y répondre rapidement et fortement ».
Radicalisation islamiste: "il était nécessaire de ne plus être dans le déni" estime Nathalie Delattre
La commission d’enquête estime que la réponse à l’islam radical « ne saurait se limiter à des mesures de police » mais « être politique et non partisane ». Durant leurs travaux, les sénateurs de la commission d’enquête ont acté un désaccord avec « le chef de l’État et le Gouvernement » qui « continuent à considérer qu’il leur appartient d’œuvrer pour la structuration de la religion musulmane en France, en dernier lieu en utilisant le levier du financement ». Une référence à l'Association musulmane pour un islam de France (AMIF) dont l’un de ses membres, Hakim El Karoui a été auditionné par la commission. « L’ambition de l’AMIF, c’est d’être un régulateur, collecter des fonds, les réinvestir non pas en privatisant les bénéfices mais en les socialisant pour travailler à la formation des imams et lutter contre toutes les formes de haine » avait -il expliqué devant la commission d’enquête.
« Infiltration »
La rapporteure, Jacqueline Eustache-Brinio ne cache pas soin amitié avec la journaliste Zineb El Rhazoui. « Je ne crains pas de le dire : les Frères musulmans sont aux portes du pouvoir » avait-elle affirmé devant la commission d’enquête évoquant une stratégie d’infiltration au sein des institutions pour placer « l’idéologie de l’islamisme au-dessus des valeurs républicaines ».
« On a un projet qui s’installe. On nous l’a dit. Un responsable d’écoles privées musulmanes nous a dit : on s’est battu longtemps pour avoir des mosquées. Maintenant, on se bat pour avoir des écoles. Et je lui ai dit que la prochaine fois ce serait des mairies. Donc dire, qu’il n’y a pas un projet politique derrière. C’est faux. Ça existe » rapporte la sénatrice du Val d’Oise.
Islam radical: "Dire, qu’il n’y a pas un projet politique derrière. C’est faux. Ça existe " estime Jacqueline Eustache-Brinio
Mercredi, lors des questions d’actualité, Jacqueline Eustache-Brinio a d’ailleurs interpellé le nouveau ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin sur ce qu’elle nomme l'entrisme communautariste » lors des élections municipales.
Parmi les 44 propositions de la commission d’enquête, une bonne partie est destinée « à connaître, suivre et empêcher l’action de l’islam radicale ». « Le rétablissement de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) », le renforcement de « l’infraction d’atteinte à la liberté de conscience, en prévoyant des circonstances aggravantes lorsqu’elle est commise à l’encontre du conjoint ou d’une personne mineure », « le renforcement des moyens humains affectés au renseignement territorial ». Mais aussi « une meilleure formation des élus locaux sur la laïcité, l’islam radical, la gestion du fait religieux et l’appréhension des pratiques communautaire ». « Les élus n’ont pas été accompagnés dans la réponse qu’ils devaient apporter. La notion de la laïcité est une notion qui peut paraître imprécise pour certains (…) Des élus se sont débrouillés comme ils pouvaient, pensant trouver le bon compromis, en laissant une salle municipale pour l’exercice d’un culte alors que ce n’est pas autorisé » explique Nathalie Delattre.
Lors de son audition devant la commission d’enquête, Jean-Michel Blanquer le ministre de l’Éducation nationale avait souligné les « angles morts des « écoles privées hors contrat et l’instruction à domicile ». Dans leurs préconisations, les sénateurs souhaitent étendre « le champ des enquêtes administratives aux décisions de recrutement et d’affectation concernant des emplois sensibles aux secteurs ayant un lien direct et régulier avec des mineurs (enseignants, animateurs, éducateurs) », la mise en place de contrôle interservices (éducation nationale, URSSAF, services vétérinaires, services financiers et fiscaux) établissements d’enseignement hors contrat, mais aussi autoriser le contrôle de l’identité de toutes les personnes qui travaillent dans ces établissements.
Devant les sénateurs, la ministre des Sports avait annoncé qu’un plan national de prévention des violences dans le sport « sera déployé » en septembre de cette année. Ce plan englobera « toutes les formes de déviances » dont les discriminations, violences et risques de radicalisation. Roxana Maracineanu avait heurté plusieurs membres de la commission d’enquête en expliquant que « l’idée n’était pas de définir la laïcité » par l’interdiction de « tous signes religieux dans la pratique sportive. « Aujourd’hui, inclure cette neutralité dans le monde du sport irait plutôt dans un sens d’exclusion des individus, de notre société (…) Le sport que je défends est un sport inclusif où tout le monde arrive comme il est » avait-elle mis en avant.
Dans leur proposition les sénateurs veulent aller plus loin par l’interdiction « dans les statuts de chaque fédération » « de toute démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale, telle que prévue par l’article 50 de la charte olympique ».