Macron « cristallise une forme de haine »

Macron « cristallise une forme de haine »

Les invités d’ « On va plus loin » analysent la situation d’un président de la République de plus en plus seul, alors que le mouvement des gilets jaunes ne faiblit pas.
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Le gouvernement tente toujours de calmer la crise des « gilets jaunes ». Edouard Philippe a fait plusieurs annonces dans ce sens mardi, notamment la suspension pour six mois de trois mesures fiscales sur le prix des carburants. Mais cela suffira-t-il alors que la colère semble se cristalliser autour de la personnalité même du président de la République ?

Pour Frédéric Sawicki, professeur de sciences politiques à Paris 1-Panthéon Sorbonne, c’est  le statut du chef de l’État mais surtout la personnalité clivante d’Emmanuel Macron qui ont fait le terreau de cette colère : « Depuis l’adoption du quinquennat, le Président est de plus en plus en première ligne. Et son Premier ministre joue plutôt un rôle de pacificateur. Après [il y a] la personnalité d’Emmanuel Macron, par ses déclarations (...) assez mal perçues (…) Il y a incontestablement un problème lié à son rapport aux Français, à sa manière de s’adresser à eux, qui aujourd’hui finalement explique le surcroît de haine, voire de violence dans certains cas. »

Flore Santisteban, enseignante à Sciences Po, spécialiste des mouvements sociaux, renchérit : « D’une façon générale, c’est vraiment un mode de gouvernance qui est remis en question par ce mouvement. C'est-à-dire une verticalité du pouvoir qui s’oppose à un mouvement qui lui repose vraiment sur l’horizontalité, l’absence de représentation individuelle, d’expression individuelle. Et c’est vrai que ce chef de l’État, qui systématiquement prend les Français de haut - c’est le sentiment qu’il donne - met de l’huile sur le feu. Et donc cristallise (…) une forme de haine (…) Et c’est même plus que de la haine maintenant, c’est de la rage (…) contre lui, contre sa politique, contre le fait de ne pas être entendu, contre le fait de ne pas avoir de réponses à leurs questions. »

Céline Pina, essayiste et cofondatrice du mouvement « Viv(r)e la République » ajoute à propos d’Emmanuel Macron : « Les gens l’ont ressenti comme extrêmement méprisant. Le terme qui revient très souvent c’est (…) « mépris de classe ». Y compris quand vous rencontrez, chez les « gilets jaunes » des gens qui ne sont pas politisés (…) Quand j’ai rencontré  les » gilets jaunes » une phrase que beaucoup m’ont dite c’est « vous savez, il nous a demandé d’aller le chercher. Eh bien, c’est ce qu’on fait, on va à Paris le chercher. » »

Vous pouvez voir et revoir ce débat, en intégralité :

OVPL. Macron : un président de plus en plus seul (débat en intégralité)
25:53

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Quelques minutes plus tard, sur le même plateau, le député Rassemblement national Sébastien Chenu rétorquait, accusant la gauche de « sectarisme ». Mathématiquement, la réforme des retraites, adoptée dans la douleur au mois de mars 2023, trouve tout de même une majorité contre elle à l’Assemblée. Face à ce constat, le nouveau Premier ministre Michel Barnier a donc tenté d’arrondir les angles en annonçant le 6 septembre, sur le plateau de TF1, son souhait d’ « ouvrir le débat sur l’amélioration de cette loi pour les personnes les plus fragiles », sans pour autant « tout remettre en cause ». « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme » Quelles « améliorations » le gouvernement Barnier pourrait-il apporter au texte ? Au sein de la droite et du bloc central, le retour à la retraite à 62 ans semble en tout cas exclu. « Il faut rouvrir les discussions, mais pas pour remettre en cause la réforme. On l’a votée avec beaucoup de difficultés, on garde les acquis », défend un cadre de la majorité sénatoriale. Quelques ajustements du texte ne sont donc pas à exclure, ne serait-ce que pour « répondre », estime-t-il, à l’initiative parlementaire du RN et aux syndicats, qui prévoient une manifestation le 1er octobre. La ligne rouge des 64 ans n’interdit pas, par ailleurs, de rediscuter d’autres points de la réforme. Au Sénat, l’introduction de nouvelles mesures sur l’emploi des seniors semble par exemple faire consensus au sein de la majorité. À l’occasion de l’examen du texte, la chambre haute s’était déjà exprimée en faveur de l’instauration d’un « index seniors », censé pousser les entreprises à davantage de transparence sur l’emploi des salariés en fin de carrière, et sur la création d’un « CDI seniors », nouveau contrat de travail exonéré de certaines cotisations. Les deux amendements avaient finalement été censurés par le Conseil constitutionnel. « Il faut reprendre cet aspect là des choses, pour associer à cette réforme des retraites un véritable changement de politique vis-à-vis de l’emploi des seniors. Il faut sans doute aussi travailler, en lien avec les partenaires sociaux, sur la question de la pénibilité notamment dans les métiers du bâtiment ou de l’aide à la personne », propose la sénatrice centriste Élisabeth Doineau. En revanche, pour la rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale, une remise en cause complète de la réforme serait « suicidaire » : « Il faut être lucide face aux réalités budgétaires du pays, pour ne pas entraîner la France vers de nouvelles dépenses qui seraient un naufrage. » « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans » Les déclarations de Michel Barnier, qui a indiqué que les « améliorations » qu’il entendait proposer respecteraient « le cadre budgétaire », ont donc de quoi rassurer les défenseurs de la réforme. À gauche, l’accueil de l’annonce du nouveau Premier ministre est évidemment beaucoup plus froid. « Je ne vois pas sur quoi le débat peut reprendre si on élude la question des 64 ans, puisque l’essence même de cette réforme c’est le report de l’âge de départ à la retraite », dénonce la sénatrice Monique Lubin, qui défendait déjà en février dernier une proposition d’abrogation de la réforme. 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