Marine Le Pen compte sur la recomposition politique pour relancer le FN
Marine Le Pen promet un Front national « plus ouvert » à l’avenir, en « capacité de faire des alliances ». Mais sur le fond, elle agite toujours la menace sécuritaire et migratoire. Elle balaie d’un revers de main les différentes révélations parues dans les médias.

Marine Le Pen compte sur la recomposition politique pour relancer le FN

Marine Le Pen promet un Front national « plus ouvert » à l’avenir, en « capacité de faire des alliances ». Mais sur le fond, elle agite toujours la menace sécuritaire et migratoire. Elle balaie d’un revers de main les différentes révélations parues dans les médias.
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Revenir dans le jeu, petit à petit. L’année 2017 a été paradoxale pour Marine Le Pen. Présente au second tour de la présidentielle avec un score historique pour le FN, son parti a néanmoins traversé une crise après la défaite face à Emmanuel Macron.

Pour ses vœux à la presse, au siège du parti à Nanterre, Marine Le Pen a cherché à positiver la situation. Et remercier, pour le coup, l’effet Macron, en tournant à son avantage l’analyse : « Enfin, il se passe quelque chose », « vous n’aurez plus à commenter de fausses alternances ». La présidente du FN voit dans la « recomposition politique » à l’œuvre une chance pour son parti. De quoi « clarifier le débat » entre « nationaux et mondialistes». Pour preuves, elle souligne que les LR se retrouvent « déchirés » par ce « clivage », avec un Laurent Wauquiez qui va s’enfoncer dans les « sables mouvants ». Elle ajoute : « M. Juppé n’a pas encore officiellement quitté le parti. Le jour où ça arrivera, le signal de la migration sera donné et le coup de grâce avec… »

« Marine Le Pen le dit et Alain Juppé le fait »

L’actualité sert pour le coup Marine Le Pen. Quelques minutes après, elle échange avec les journalistes, coupe de champagne à la main. Le porte-parole du FN, Sébastien Chenu, vient alors lui glisser à l’oreille la bonne nouvelle : Alain Juppé ne va pas reprendre sa carte des LR. Sourire de victoire de Marine Le Pen, qui ne pouvait en espérer tant. « Qu’est-ce qu’on dit ? » s’enorgueillit la présidente du FN. Fièrement, elle ajoute : « Marine Le Pen le dit et Alain Juppé le fait. Je vous l’ai annoncé il y a une demi-heure avant qu’il ne le fasse. Alain Juppé, sur le thème de l’Europe, allait quitter les LR pour rejoindre probablement En marche (ce qu’il a exclu, ndlr) car LR est déchiré entre les européistes convaincus et ceux qui sont des eurosceptiques.  M. Wauquiez aura le plus grand mal à rester dans l’ambiguïté sur ce sujet » réagit-elle aussitôt. « Tout ce qui contribue à la clarification du débat est une bonne nouvelle ». Regarder les images de Cécile Sixou :

Quand Marine Le Pen apprend qu’Alain Juppé ne reprend pas sa carte aux LR : « Marine Le Pen le dit et Alain Juppé le fait »
01:54

Champagne alors ? Plusieurs révélations de presse mettent pourtant à mal le Front national. Mediapart affirme que ses candidats ont été fichés. Mediapart toujours, et Buzzfeed, ont aussi obtenu des documents internes qui montrent l’amateurisme de la campagne ainsi que la volonté de recourir aux « fake news » sur le compte offshore d’Emmanuel Macron pendant le débat d’entre deux tours. Ou encore Libération, selon qui le député FN Bruno Bilde est accusé par deux anciens assistants parlementaires, Alexandre et Mickaël, de harcèlement sexuel. Marine Le Pen balaie d’un revers de main toutes les accusations. Elle « conteste formellement cette analyse » de l’amateurisme. « Ça m’intéresse assez peu les fonds de boîtes mails » lâche-t-elle au sujet des documents. Interrogée sur le conseil de Damien Philippot, frère de Florian, d’évoquer le prétendu compte offshore d’Emmanuel Macron, elle ne nie pas les faits mais dénonce la méthode, évoquant « un document qui a été acquis dans des conditions éminemment contestables ». Quant à l’enquête de Libération, elle affirme que le quotidien « sera condamné en diffamation ». Bruno Bilde devrait porter plainte, selon Marine Le Pen.

Changement de nom

Ces révélations portent pour l’essentiel sur la campagne présidentielle que Marine Le Pen aimerait ne plus évoquer. Elle préfère se tourner vers le congrès du FN du mois de mars qui doit mener à « la grande refondation » du parti, qu’elle imagine « plus ouvert et plus participatif ». Elle promet pour l’occasion un changement de nom pour le parti – idée dans les tuyaux depuis un moment – sans en dire plus. Une « grande refondation » qu’elle affirme « avoir déjà entamée en 2011 » en prenant la tête du FN. Autrement dit, autant continuer avec elle. « L’évolution du FN doit se poursuivre pour en faire un parti de gouvernement » dit la députée du Pas-de-Calais.

Sur le renouveau du FN, Marine Le Pen semble mettre une bonne dose de méthode Coué dans sa formule. « Il y a une manière de voir en effet le verre à moitié vide ou le verre à moitié plein. Mais Marine Le Pen est arrivée au second tour et a accueilli 11 millions de suffrages. Ce n’est pas de la méthode Coué, c’est un véritable résultat historique pour notre mouvement » rétorque Jean-Lin Lacapelle, secrétaire national du parti. « Mais il y a une déception, c’est de ne pas avoir gagné. Il faut élargir ce socle pour atteindre les 50% nécessaires ».

Pour Jean-Lin Lacapelle, il n’y a « pas de méthode Coué » au FN
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« Le harcèlement de rue, fait de ressortissants de l’immigration »

Si l’ambiance est au renouveau, la présidente du parti d’extrême droite n’oublie pas les fondamentaux du FN. Elle mise sur « l’insécurité au pluriel » : celle sur les personnes, l’insécurité professionnelle « avec la loi travail » ou encore sanitaire.

La loi Collomb sur l’immigration, critiquée au sein de la majorité, ne fera « qu’entériner la submersion migratoire » pour Marine Le Pen. Elle souligne que « personne ne parle du harcèlement de rue, fait de ressortissants de l’immigration (…) qui  apportent une culture de non-respect des femmes et de soumission des femmes »…

Elle dénonce aussi le projet d’Emmanuel Macron de légiférer contre les fake news, au point d’affirmer que « ce sont dans les dictatures que la liberté d’expression n’est autorisée que pour diffuser les vérités officielles ».

« Il faut être capable de se remettre en cause » et être « en capacité de faire des alliances »

Marine Le Pen reconnaît quand même qu’« il faut être capable de se remettre en cause ». Mais ses autocritiques portent sur l’Europe. Le FN doit être sur l’Europe « plus précis », « dire quelles institutions nous conserverons ». Une manière, en creux, de mettre une pierre dans le jardin de Florian Philippot, son ancien bras droit, parti du FN pour fonder les Patriotes et avec qui elle s’est fâchée.

Autre changement : pour le prochain rendez-vous électoral des européennes, en 2019, le FN doit être « en capacité de faire des alliances ». Pas avec Laurent Wauquiez, qui a rejeté la main tendue, mais avec les déçus des LR. Elle mise sur l’explosion du parti où « un certain nombre de personnes vont se retrouver de plus en plus mal à l’aise ».

« Florian Philippot ne représente personne »

Autre cible : rassembler « les nationaux ». Pour ça, il faudrait peut-être commencer par se réconcilier avec Florian Philippot. Mais lorsqu’on l’interroge sur l’ancien numéro 2 du parti, sa réponse est cinglante : « Florian Philippot ne représente personne ». Les Patriotes ? « Il n’y a rien, c’est une coquille vide ». Elle ajoute : « Après la manière dont il s’est comporté, humainement, il ne me manque pas ». La séparation est consommée. Selon Marine Le Pen, « il ne supportait pas d’être mis en échec lors du congrès. Il a refusé le combat. C’est le cheval qui a refusé l’obstacle ! »

Mais chez les « nationaux », la stratégie suivie par Marine Le Pen ne fait pas l’unanimité. Un ancien haut responsable de la campagne, qui a pris du champ, est peu tendre avec elle. « Marine Le Pen prend une voie sans issue » affirme cet ex-frontiste à publicsenat.fr, « cette union des droites, ça n’a pas de sens. On va vers un FN qui sera supplétif de la droite ».

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