Moralisation : le Sénat se mobilise pour ses collaborateurs parlementaires

Moralisation : le Sénat se mobilise pour ses collaborateurs parlementaires

La commission des lois du Sénat a inscrit dans la loi de moralisation des changements très attendus par ces hommes et femmes de l’ombre.
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Les préjugés ont la vie dure, surtout lorsqu’ils visent une profession mal connue. « J’ai encore droit aux blagues sur les salaires des collaborateurs parlementaires… » soupire Olivier Décard, président de l’Association des collaborateurs de sénateurs, liée à la droite et au centre. Après des mois de scandales, de l’affaire Penelope à celle du MoDem en passant par la mise en examen de Marine Le Pen pour l’emploi supposé fictif d’assistants parlementaires au Front national, la vie de ces hommes et femmes de l’ombre n’a pas vraiment changé. Leur statut reste précaire et mal défini, malgré la mobilisation des syndicats et associations de collaborateurs tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. En mars 2015, le petit millier qui travaille au Palais du Luxembourg, a finalement obtenu de voir leur existence reconnue dans le règlement intérieur du Sénat. Une mesure symbolique qui peine à être complétée par un véritable statut.  « On peut mettre tout et n’importe quoi pour définir la profession » souligne Olivier Décard. « Dans les faits, c’est toujours quelque chose d’assez opaque. »

Ce mardi, le Sénat entame l’examen du projet de loi visant à « rétablir la confiance dans l’action publique » avec, justement, une série d’amendements présentée par la commission des lois pour clarifier les statuts. « Les députés et les sénateurs peuvent employer sous contrat de droit privé des collaborateurs qui les assistent dans l'exercice de leurs fonctions et dont ils sont les employeurs directs » stipule désormais le projet de loi.

« C’est une avancée. Ca peut être encore clarifié mais ça va dans le bon sens » reconnait Frédéric Faravel de la CGT. Ce statut devrait permettre de nouvelles avancées comme le paiement des heures supplémentaires. Surtout que la réduction d’un tiers des élus, prévue par Emmanuel Macron, risque de faire exploser le nombre de collaborateurs. « Le sénateur ne pourra pas continuer à avoir le même cabinet, il aura beaucoup plus de travail » souligne Olivier Décard. Une bonne raison de clarifier leur statut.

Reste la question épineuse du motif de licenciement qui est au cœur des revendications des associations proches de la gauche. L’article 6 du projet de loi encadre, en effet, la rupture de contrat. Jusqu’à maintenant, les collaborateurs sont licenciés, à la fin du mandat de l’élu, pour « motif personnel », même s’ils sont en CDI. Une situation moins avantageuse que le « motif économique », réclamé par les associations. La commission des lois a ainsi adopté un amendement proposant un « dispositif d’accompagnement » pour les collaborateurs qui « font l’objet d’une procédure de licenciement pour un motif autre que personnel ». Façon de reconnaitre pleinement le licenciement pour motif économique. D’autant plus que les élections sénatoriales approchent à grand pas, ce qui devrait entrainer le licenciement de 250 à 300 personnes.

De quoi satisfaire les associations. Mais lundi après-midi, grosse surprise : le gouvernement dépose un amendement de suppression contre celui de la commission. « Nous étions en rendez-vous au ministère de la justice et, en plein milieu de la discussion, est tombée l’information qu’un amendement du gouvernement proposait de supprimer cette partie du texte » raconte Frédéric Faravel. En l’occurrence, l’objet de cette suppression assurait qu’une dérogation pour les collaborateurs « pourrait être mal interprétée et ouvrirait nécessairement la porte  à de nouvelles demandes de dérogation. »

Moralisation : Les collaborateurs parlementaires espèrent un nouveau statut
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L’annonce passe mal. « On était en colère » poursuit. « Surtout que le ministère de la Justice découvrait cet amendement du gouvernement en même temps que nous.» L’amendement de suppression va finalement disparaitre, sous la recommandation du cabinet de la ministre de la Justice Nicole Belloubet. Son origine se trouverait rue de Grenelle, au ministère du Travail, à l’affût de toutes les dépenses supplémentaires que peuvent entrainer les mesures du projet de loi. Cette fois, la Justice a gardé la main.

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