Netflix, Amazon et Disney dénoncent un cadre réglementaire français trop « strict »

Netflix, Amazon et Disney dénoncent un cadre réglementaire français trop « strict »

Les sénateurs de la commission d’enquête sur la concentration des médias ont réuni ce vendredi 11 février les représentants d’Amazon, de Disney et de Netflix au cours d’une audition commune. Les services de vidéo à la demande ont fait part de leurs critiques quant au cadre réglementaire français jugé « strict » et ont rappelé leur soutien à la création française.
Public Sénat

Par Louis Dubar

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Interrogé par les sénateurs de la commission d’enquête le 19 janvier sur son empire médiatique, Vincent Bolloré avait cherché à relativiser la taille de son groupe Vivendi. Pour l’industriel, son groupe n’est qu’un « petit nain » médiatique face aux géants étrangers de vidéo à la demande. Le président d’Altice, Patrick Drahi, également auditionné par la chambre Haute quelques semaines plus tard avait jugé la fusion des groupes TF1-M6 comme « un bon rapprochement » pour contrer ces nouveaux concurrents. Des nouveaux venus qui font figure d’épouvantails pour les patrons français. Dans son propos introductif, le président de la commission, le sénateur Laurent Lafon, rappelait la part de plus en plus importante prise par ces groupes étrangers « dans la production audiovisuelle, ce qui fait courir un risque d’uniformisation des œuvres. » Cette audition a permis de lever le voile sur les mutations et les dynamiques qui s’opèrent entre médias traditionnels et plateformes numériques.

Nouveaux-venus

Netflix, Amazon et Disney se défendent de toute hégémonie sur le secteur audiovisuel français. « On vient en complémentarité à ce qui existe déjà », explique Marie-Laure Daridan, directrice des relations institutionnelles de Netflix France. Même son de cloche du côté d’Amazon, les plateformes ne présentent pas de risque pour les acteurs traditionnels. Les audiences de la télévision sont « stables depuis dix ans », pour Yohann Bénard directeur des affaires publiques d’Amazon France. L’arrivée des plates-formes numériques dans le système audiovisuel est comparable à l’apparition du petit écran comme média de masse dans les foyers français à partir des années 70. A l’époque, « la télévision s’est ajoutée au cinéma sans s’y substituer ». L’arrivée de ces plateformes numériques est source « d’émulation et pousse les acteurs traditionnels à innover toujours au bénéfice du consommateur. »

Créations originales et rôle de soutien à l’exception culturelle

Les plates-formes numériques bouleversent également le monde de la production audiovisuelle. Netflix et consorts ont désormais depuis quelques mois une obligation d’investir dans l’exception culturelle. Le décret dit Smad (services de médias audiovisuels à la demande) demande aux groupes étrangers d’investir au moins 20 % du chiffre d’affaires qu’ils réalisent en France. « Nous allons lancer 25 projets originaux tous produits avec des sociétés françaises […], au total, c’est 200 millions d’euros dans la production audiovisuelle et cinématographique en 2022 », pour Netflix. Les deux tiers des fonds investis par l’entreprise iront à des productions indépendantes. A l’instar de Netflix, Disney investit dans la production. « Nous sommes très fiers de travailler avec des auteurs et des talents français [..] nous contribuons à produire des séries authentiques pour la plateforme Disney + », explique Thomas Spiller, vice-président chargé des affaires gouvernementales de The Walt Disney Company. En 2022, la société américaine lancera six nouvelles séries françaises dont l’une retrace l’affaire Malik Oussekine.

Un cadre réglementaire contraignant

Les plateformes se sont montrées extrêmement critiques quant au cadre réglementaire et au délai de diffusion des films après leur sortie. Le nouvel accord sur la chronologie des médias signé fin janvier avec le ministère prévoit un délai de diffusion de 15 mois pour Netflix, 17 pour Disney + et Amazon Prime. « Notre position est simple, c’est un cadre strict qui va au détriment des habitudes du consommateur qui veut tout, tout de suite », explique le représentant de Disney, Thomas Spiller. Canal +, grand gagnant de l’accord, a l’autorisation de diffuser des films sur ses chaînes six mois après leur sortie en salle. « Un film sort en streaming, 30 à 40 jours après sa sortie en salle dans les pays limitrophes […] Nous devons essayer de faire ce que le consommateur souhaite », selon le dirigeant de la filiale française de Disney. « Nous sommes venus en connaissance de cause […] mais il est important que l’exception culturelle soit flexible ».

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