Nouvelle hausse des atteintes à la laïcité : Alexis Corbière met en garde sur les écueils d’une « police du vêtement »

Nouvelle hausse des atteintes à la laïcité : Alexis Corbière met en garde sur les écueils d’une « police du vêtement »

Face à la nouvelle hausse enregistrée par les services du ministère sur les atteintes à la laïcité en milieu scolaire au cours du mois d’octobre, le député LFI Alexis Corbière considère que ces chiffres doivent être manipulés avec prudence. Au micro de Public Sénat, il alerte notamment sur un risque de confusion, selon lui, entre « signe religieux » et « tenue culturelle ».
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Désormais publiés chaque mois, selon un engagement du ministre de l’Education nationale, Pap Ndiaye, les chiffres des atteintes à la laïcité en milieu scolaire accusent une nouvelle hausse pour le mois d’octobre, avec 720 signalements, contre 313 en septembre. Selon les données du ministère diffusées mercredi 9 novembre, 52 % des faits se sont produits au collège, contre seulement 36 % en septembre, alors que dans les lycées, les signalements accusent une nette baisse : 37 % en octobre contre 51 % le mois précédent. « J’ai demandé au ministre des précisions pour savoir si ces chiffres étaient le fait d’une augmentation ou d’une demande de plus en plus importante de la part du rectorat vis-à-vis des chefs d’établissement de faire remonter tout ce qui se passe. Je demande qu’il n’y ait pas de sensationnalisme autour de ces chiffres », a commenté le député Alexis Corbière ce jeudi, au micro de la matinale de Public Sénat.

« L' abaya n’est pas un signe religieux »

Ces derniers mois, le port des abayas et des qamis, sortes de chasubles à manches longues qui s’enfilent par-dessus les vêtements du quotidien, a été pointé du doigt par différents responsables politiques, y compris Pap Ndiaye. Une circulaire ministérielle pratique a été publiée mercredi pour guider les chefs d’établissement, sans pour autant apporter de précisions sur le type de tenues dont le port peut être constitutif d’une atteinte au principe de laïcité. « Un signe religieux, je sais ce que c’est, mais un vêtement culturel, est-ce un signe religieux ? Il y a une discussion qui n’est pas simple », observe Alexis Corbière, qui veut redire son attachement à la loi de 2004 contre le port de signes religieux à l’école, ayant lui-même été professeur d’histoire en lycée professionnel.

« L’abaya n’est pas un signe religieux », estime toutefois cet insoumis. « Il s’agit indiscutablement d’un vêtement qui appartient à la sphère culturelle du Maghreb et des pays musulmans, mais ça n’est pas, à ma connaissance, une tenue religieuse ».

« Faire la police du vêtement n’est pas de l’ordre de la laïcité »

Alexis Corbière alerte ainsi sur les écueils d’un éventuel durcissement de la législation en vigueur. « Comment légiférer sur une tenue ? Je ne parle pas des signes religieux. Je sais ce qu’est une kippa, une croix, un foulard… Mais une tenue ? Vous rentrez là dans la police du vêtement, et ça n’est pas de l’ordre de la laïcité », estime notre invité. Il tient notamment à rappeler que, lors des débats de 1905, au moment de la séparation de l’Eglise et de l’Etat, les anticléricaux souhaitaient également interdire le port de la soutane dans l’espace public. Une mesure finalement laissée de côté car « l’habileté des couturiers sera toujours à même d’exprimer une proximité confessionnelle », observe notre invité. « On est dans le flou. Si une religion décrète un jour qu’il faut porter uniquement du blanc, va-t-on interdire une couleur ? Où s’arrêtera-t-on ? »

 

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