Observatoire de la fraude fiscale : « On sera au cœur de la machine », explique Éric Bocquet

Observatoire de la fraude fiscale : « On sera au cœur de la machine », explique Éric Bocquet

Le sénateur communiste, seul candidat déclaré pour prendre la tête de cette mission, a été reçu par Gérard Darmanin. La décision sera prise dans quelques jours, mais l’élu du Nord est rassuré sur la forme que prendra de cette future instance, qui disposera des données de Bercy.
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Le sénateur communiste du Nord était reçu jeudi après-midi par le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin. Le 4 mars, Éric Bocquet avait proposé sa candidature, à titre bénévole, pour présider l’Observatoire de la fraude fiscale, dont l’installation n’a toujours pas vu le jour, six mois après l’annonce de sa création. Le parlementaire, très investi sur ces questions, nous en dit un peu plus sur les contours de cet organe de contrôle et d’évaluation. Il se montre globalement satisfait de cette rencontre. Entretien.

Y-a-t-il d’autres candidats intéressés pour prendre la tête de cet organisme ?
Cela fait partie des questions que j’ai posées. J’ai dit que j’étais très étonné et que j’avais du mal à comprendre, du mal à croire, qu’aucun candidat ne se soit manifesté. Le ministre m’a confirmé que c’était le cas et qu’il avait proposé à des responsables syndicats et d’ONG de s’occuper de cette affaire. Tous ont décliné la proposition. Il est étonnant que l’on butte sur cette question.

L’idée avait été lancée en septembre par le ministre. Nous avons eu l’occasion de l’auditionner le 21 février en commission des Finances au Sénat. À la fin de la réunion, la question a été évoquée. Il a expliqué qu’il n’avait toujours pas trouvé de président. Je me suis donc proposé, à l’époque c’était une boutade. Et puis il y a eu cet article dans Les Échos le 4 mars, c’était en première page. Là j’ai formalisé officiellement ma candidature. Ce n’était pas un coup.

En quoi consistera cet observatoire ?
Il aura une fonction d’évaluation bien sûr. Il aura pour mission de formuler des propositions aussi. Il existe déjà des choses dans tout l’arsenal actuel, autant dans les services de Bercy, comme Tracfin par exemple, que dans toutes les directions qui s’occupent du contrôle.

Gérard Darmanin a précisé le périmètre. Il s’agirait moins d’une instance pérenne mais davantage d’une mission temporaire, pour procéder à l’analyse de la situation sur l’année 2019. Ce serait une instance légère, souple, flexible, d’une durée de vie limitée à six mois.

Partagez-vous la même approche sur la question ?
Oui et non. Je pensais que ça allait être quelque chose de plus durable. Mais il se pose peut-être un problème juridique avec mon mandat de sénateur. Je vais vérifier cela avec les services du Sénat. Au-delà de six mois, mon mandat de sénateur tomberait. Des vérifications sont en cours. On peut confier une mission temporaire à un sénateur, mais présider un organisme pérenne pourrait poser un problème de compatibilité.

Je sais que c’est un peu dans l’air du temps. Le président du Sénat rappelle à l’ordre sur les groupes extraparlementaires qui se mettent en place. Ils doivent être gérés de façon rationnelle.

Si la durée n’excède pas une durée de six mois, et vu l’incertitude sur l’incompatibilité, pourquoi ne pas envisager d’aborder le sujet à travers une commission d’enquête parlementaire ? Celle-ci offrirait en plus certains pouvoirs.

Il y a déjà eu deux commissions d’enquête en 2012 et 2013. L’idée d’un observatoire et d’outils d’évaluation figurait déjà dans les propositions. On sentait bien la nécessité de créer un outil statistique propre à cette affaire. C’est dans la continuité stricte de ces commissions et de ce que les apports, adoptés à l’unanimité, proposaient.

Sous quelle forme fonctionnera cet observatoire ?
J’ai eu avec Gérald Darmanin un échange sur la composition éventuelle de cet observatoire. J’ai proposé qu’on l’élargisse et qu’il soit en prise directe avec la société civile, des ONG, des syndicats, des lanceurs d’alerte, des économistes de diverses sensibilités. Bref, mettre en synergie des compétences, y compris quand elles sont engagées. Là-dessus, il n’y a pas eu de réticence du ministre, il a accepté l’idée. Il ne faut pas non plus créer une armée mexicaine, mais on a besoin d’un collectif.

Vous n’êtes donc pas déçu du cahier des charges ?
Je vois cela comme une étape de plus dans ce travail d’investigation. Cela ne sera pas l’alpha et l’oméga, ce sera un outil supplémentaire, avec la mise en commun des moyens de la société civile et de Bercy. Ce sera inédit.

Cela vaut le coup de mener cette expérience, en croisant les synergies, avec ces limites. Il faut le faire de manière très offensive. On sera au cœur de la machine. Je ne suis pas du tout hostile à tenter l’expérience, sans illusion majeure.

Quelle est la suite prévue après cet entretien ?
Nous nous reverrons dans un délai de 10-15 jours. Et la décision devrait être arrêtée dans trois semaines.

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