Ouragan Irma : « L’une des plus grandes catastrophes de ces 40 dernières années »

Ouragan Irma : « L’une des plus grandes catastrophes de ces 40 dernières années »

En termes de dommages matériels, l’ouragan Irma qui a touché deux îles françaises mercredi matin est l’une des plus importantes qu’ait connue la France. Alors que de nombreux ménages ne disposent pas d’assurance, l’aide financière s’organise.
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L’ouragan Irma, avec ses vents dévastateurs, faiblit mais n’a pas encore achevé sa progression. Aux États-Unis, la Floride, se prépare à affronter le cyclone, rétrogradé en catégorie 4.

Le bilan humain risque de s’alourdir : 9 morts, 7 disparus et 112 blessés. Derrière lui, le cyclone laisse des paysages apocalyptiques, sur les îles de Saint-Barthélémy et de Saint-Martin (détruite à 95% selon la préfecture). Édouard Philippe a assuré ce vendredi que la mobilisation de l’État était « exceptionnelle et à la hauteur de la situation ». Selon le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, les équipes de secours continuent d’affluer vers les îles touchées. 455 membres des forces de sécurité sont en cours d'acheminement, un contingent de 187 personnes est attendu samedi.

Outre les moyens humains, le déploiement des aides matérielles et financières a lui aussi commencé. L’arrêté reconnaissant l’état de catastrophe naturelle doit être signé ce vendredi. C’est ce qu’a annoncé le Premier ministre Édouard Philippe la veille. Cette publication au Journal officiel marque le début du régime d’indemnisation pour des milliers de sinistrés, qui pourront faire jouer la garantie « catastrophe naturelle » auprès de leur assureur.

« L’une des plus grandes catastrophes de ces 40 dernières années »

L’étendue des dégâts s’annonce sans équivalent dans l'histoire récente des deux îles françaises touchées, la reconnaissance du terrain ne faisant que débuter. Les destructions matérielles se chiffrent en centaines de millions d’euros : « bien supérieur » à 200. Au niveau français, « c’est l’une des plus grandes catastrophes de ces quarante dernières années en termes de dommages assurés », déclare à Public Sénat Bertrand Labilloy, directeur général de la Caisse Centrale de Réassurance (CCR). Ce réassureur public, détenu à 100% par l’État, prend en charge indirectement les indemnisations après une catastrophe naturelle, en remboursant les compagnies d’assurance.

« La particularité, c’est que ce montant est concentré sur un petit territoire : cela donne la mesure du cataclysme. »
Bertrand Labilloy, directeur général de la Caisse Centrale de Réassurance

Bertrand Labilloy précise que « quel que soit le montant, la CCR aura les réserves » suffisantes pour répondre à l’ampleur des dégâts. La Caisse dispose en effet de 3,5 milliards d’euros, alimentés par une prime sur les assureurs et provisionnés pour faire à ces situations. Il peut compter en outre sur deux milliards d’euros de fonds propres.

Parmi les catastrophes les plus destructrices ayant touché la France, on relève les inondations et les crues de juin 2016 (1,2 milliard d’euros de dégâts), et les tempêtes de décembre 1999 (l’équivalent de 7,5 milliards d’euros).

Les indemnisations pourraient débuter dans trois mois, le temps pour les équipes des compagnies d’assurance d’aller au contact des populations sinistrées, évaluer les dégâts. Un processus qui risque également d’être tributaire du rythme de reconstruction.

Une part très importante de ménages non-assurés à Saint-Martin

Mais contrairement à la métropole, où 99% des foyers disposent d’une assurance habitation, les départements d’Outre-mer se caractérisent par une souscription faible aux assurances habitation. Selon le Commissariat général au développement durable, 48% des habitants des départements d’Outre-mer n’étaient pas protégés en 2010, particulièrement dans les Antilles. Sur l’île de Saint-Martin, cette part serait comprise entre un tiers et 50%, selon la Caisse centrale de réassurance.

Bertrand Labilloy, le directeur général de la CCR explique :

« Les gens possèdent des habitations qui ne sont pas assurables, compte tenu de la nature de l’habitat, ou alors ils sont en très grande précarité financière. »

L’aide publique sera donc indispensable pour les sinistrés les plus précaires et les plus exposés par la catastrophe.

Des fonds étatiques mobilisables

Mercredi soir, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’un fonds d’urgence pour les territoires frappés par l’ouragan Irma. Objectif : déployer un « plan national de reconstruction le plus rapidement possible ».

L’État a également la possibilité d’activer le Fonds de secours pour l’Outre-mer (FSOM), mobilisable pour les opérations d’urgence liées aux premiers secours, mais aussi dans l’optique de la reconstruction. Alimenté par les crédits de l’État, le FSOM aide aussi bien les particuliers, les très petites entreprises, les exploitations agricoles ou encore les collectivités territoriales. À titre d’exemple, après les destructions du cyclone tropical Gamède (catégorie 3) sur l’île de La Réunion en février 2007, près de 15,5 millions d’euros avaient été débloqués par le FSOM, dont plus de 9 pour les agriculteurs de l’île.

Depuis 2002, la solidarité intervient même au niveau européen, avec la politique régionale. La demande doit être adressée à la Commission européenne. Depuis sa création, le Fonds de solidarité de l’Union européenne  a été mobilisé pour 76 catastrophes et a distribué plus de cinq milliards d’euros à 24 États. La France avait par exemple reçu 109 millions d’euros après le passage de la tempête Klaus en janvier 2009.

La solidarité s’organise du côté des ONG

De leur côté, les organisations humanitaires et les associations s’organisent en parallèle pour les produits de première nécessité et ont lancé des appels aux dons. La Fondation de France a débloqué 100 000 euros, et le Secours populaire un fonds d’urgence de la même somme.

Le Parlement a également mobilisé des fonds issus de la réserve parlementaire dès le 6 septembre. La présidence du Sénat va reverser au ministère de l’Intérieur, 300 000 euros de la dotation d'action parlementaire non utilisés en 2017, afin de soutenir les territoires touchés par l’ouragan.

Le passage d’un nouveau cyclone, José, au large de Saint-Martin et Saint-Barthélémy, José (qui s’est renforcé en catégorie 4, selon les services de météorologie américains), risque de compliquer la tâche des secours et des ONG.

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