Hier, dans une tribune publiée dans Le Figaro, 100 sénateurs ont dénoncé le contenu du programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle. L’un des signataires de la tribune, Olivier Paccaud était invité de la matinale de Public Sénat. Le sénateur de l’Oise estime que cet enseignement ne doit pas être réalisé par des associations, mais par les parents ou par les enseignants.
Paroles de caissières
Par Pierre-Henri Gergonne
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« On est venu. On n’a pas reculé et on a continué à travailler ». Il y a dans le regard de Sylvie la responsable presse du magasin et caissière « à l'occasion » quelque chose de cette détermination qui soulève parfois des montagnes. Une détermination partagée par ses collègues caissières. Dès le début de l'épidémie, tout le monde a bien réagi » poursuit-elle.
Il a fallu bien sûr s'adapter et vite dans des conditions où le pragmatisme garantissait souvent l'efficacité. « C'est vrai, il n'y a pas eu de réticence majeure même si au début c'était compliqué, insiste Bruno Anselme, le directeur cette « moyenne surface » normande. Tout de suite, les caisses ont été considérées comme les zones les plus sensibles du magasin ». Affichage, marquage au sol de distance de sécurité et équipement des caissières, en quelques jours l'essentiel était mis en place. Les stocks de gants étaient suffisants et le groupement Intermarché a assuré l'approvisionnement en masques. D'abord des FFP2 puis des masques chirurgicaux.
« Mais les premiers étaient pénibles à porter et c'était compliqué pour les employés, précise Bruno Anselme. Les masques chirurgicaux sont plus aisés à porter. On respire mieux ». Aujourd'hui les règles d'hygiène et sanitaires semblent satisfaisantes « même si le panneau de plexiglas est un peu court » et que selon les jours les hôtesses achètent elles-mêmes leurs flacons de gel hydroalcoolique. Un état des lieux partagés par les intéressées.
« Nous sommes méritants même si on est des petits »
Dans ces conditions, après un mois de confinement et de conditions de travail aussi inédites que difficiles, les propos d'Emmanuel Macron mettant en avant dans sa récente intervention l'abnégation des caissières dans les commerces a fait chaud au cœur dans les rayonnages brionnais. « J'ai été surprise réagit Sylvie qui a regardé le Président de la République. Ça m'a fait plaisir. Il y a évidemment les personnels soignants, mais nous aussi nous sommes méritants même si on est des petits ».
Même tonalité dans la bouche d'Aurélie, elle aussi caissière. « Oui ça fait du bien de se sentir un peu valorisée, dit-elle. Si on n’était pas là, les clients ne pourraient plus s'alimenter. Et après tout, la nourriture est aussi une sorte de médicament ».
Charlène, elle aussi se réjouit de cette nouvelle reconnaissance. « On était un peu mises de côté, dit dans un sourire cette jeune étudiante désormais « à plein temps » derrière sa caisse. Alors oui les propos du Président font plaisir ». Mais qu'en attendre ? A cette question, un certain fatalisme teinté d'un vrai scepticisme reprend le dessus. « On aimerait bien croire que ces discours débouchent sur quelque chose. Mais on n’y croit pas, soupire Sylvie la responsable des caisses du magasin. On est blasé ».
Son homonyme du rayon presse espère quand même plus de reconnaissance, c'est à dire une rémunération supplémentaire via peut-être des ajustements sur l'ancienneté ou les grilles d'échelons de salaires. « Nous sommes au Smic » rappelle-t-elle. « Il y aura une prime », indique le directeur.
L’agressivité de certains clients qui ne retombe pas
Pour l'heure, le quotidien de l'Intermarché de Brionne s'est réglé sur le rythme du confinement. Il y a moins de passage en caisse. Entre 600 et 800 par jour contre largement plus de 1 000 avant l'épidémie.
Des chiffres trompeurs qui reflètent mal une « ambiance anxiogène » que décrit Aurèlie. « Les clients sont nerveux, ils ne respectent pas forcément les règles, explique la caissière. Et cette situation s'aggrave. Il est temps que ça se termine ». Mêmes remarques chez Charlène : « le regard des clients n'a pas changé contrairement à ce que j'aurais pu croire. Il y a une agressivité croissante. Peut-être la conséquence d'un confinement qui dure ».
« Il y a des comportements difficiles à gérer » admet laconique Bruno Anselme. Depuis peu, une étiquette collée à l'entrée de chaque caisse intime aux clients plus de respect à l'égard des hôtesses de caisses tout en les invitant à plus d'amabilité et de courtoisie…
Dans ces conditions, « les nerfs des collègues commencent à lâcher. Le stress existe déjà à la maison, explique Aurélie, mère de 3 enfants, et je n'ai pas envie d'y importer celui du travail ». Alors parfois, la caissière de Brionne de retour chez elle le soir s'arrête quelques minutes dans la forêt toute proche. Pour y hurler seule son trop-plein d'angoisses.